15ème législature

Question N° 29040
de M. Sébastien Jumel (Gauche démocrate et républicaine - Seine-Maritime )
Question écrite
Ministère interrogé > Collectivités territoriales
Ministère attributaire > Collectivités territoriales

Rubrique > tourisme et loisirs

Titre > Avenir des campings municipaux - covid-19

Question publiée au JO le : 28/04/2020 page : 3042
Réponse publiée au JO le : 07/07/2020 page : 4746

Texte de la question

M. Sébastien Jumel alerte M. le ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé des collectivités territoriales, sur l'avenir des campings municipaux face à la crise économique qui frappe le secteur du tourisme, et la baisse des recettes des collectivités locales. « L'univers du camping », comme pouvait le nommer Pierre Sansot dans Les gens de peu, n'a rien d'anodin. Il dessine une certaine idée de la France, pionnière en matière de congés payés et de vacances ouvertes à l'ensemble de la population. Le camping municipal représente un de ces symboles du tourisme populaire et accessible, dont le coût modeste permet à des milliers de familles françaises de pouvoir partir en vacances chaque année. Le camping est en ce sens la « meilleure des républiques », celle d'une culture tout à fait particulière. Néanmoins les campings publics risquent aujourd'hui d'être exposés à l'effondrement de tout le secteur du tourisme. Les campings publics constituent pourtant aujourd'hui près d'un cinquième de l'offre en la matière. Une étude de l'Insee en 2017 révélait que leur part était décroissante, et que les campings gérés par des collectivités locales accueillaient en moyenne un peu moins d'une trentaine d'emplacements en moins que les campings privés. Ils connaissaient également des taux d'occupation « inférieurs à ceux des campings privés, en raison notamment d'une localisation plus rurale que littorale, et du poids important des emplacements nus ». Ce constat pourrait s'aggraver avec la crise du covid-19. Les campings publics doivent aujourd'hui répondre à un intérêt public communal et ne pas constituer une concurrence illégale faite aux terrains privés. Ils sont en mesure de pouvoir bénéficier d'un financement par tarification « comme pour l'ensemble des services publics locaux » et sont soumis également à la taxe de séjour. Toutefois la baisse des dotations aux collectivités locales, notamment la réduction de la part forfaitaire de l'État de 11,5 milliards d'euros entre 2014 et 2017, a contribué à la fragilisation du maintien de tels services présentés comme facultatifs. En ce sens, la gestion en propre des campings tend à décroître depuis ces dernières années, au profit d'un abandon total des équipements ou bien d'une externalisation de la gestion notamment via les délégations de service public. La crise sanitaire et économique que traverse la France va profondément affecter les recettes des collectivités locales. L'augmentation des dépenses immédiates « relatives à la protection de la population » et la baisse induite des recettes fiscales sont deux facteurs conjugués qui vont représenter un coût très important pour les finances locales. M. le député s'inquiète en ce sens du risque qui porterait sur les services publics locaux non obligatoires. Les campings municipaux, dont le coût de gestion implique la mobilisation d'agents territoriaux, subiront la dramatique asphyxie de l'économie et du tourisme. Les collectivités locales s'inquiètent de devoir se séparer de ces services, pourtant essentiels dans le paysage social français, à la faveur d'une défaillance budgétaire. Ces lieux de vacances populaires publics ne doivent pas être abandonnés. Il l'interroge sur les mesures mises en place pour soutenir les collectivités locales afin de préserver les services publics non obligatoires et plus particulièrement les campings publics.

Texte de la réponse

Afin d'identifier les modalités de financement du service public de camping municipal, il convient de distinguer la nature du service public qui peut-être à caractère administratif ou à caractère industriel et commercial. Dans la grande majorité des cas, le service public de camping municipal constitue un service à caractère administratif. Ce service public peut être géré directement sous la forme d'une régie municipale, dont le régime juridique est prévu aux articles L.2221-2 et suivants du code général des collectivités territoriales (CGCT), ou bien dans le cadre d'une gestion déléguée sous la forme d'une délégation de service public (article L.1411-1 du CGCT). Cette qualification de service public à caractère administratif facilite les relations financières entre la commune et son service public géré en régie (sous la forme d'un budget annexe dans le cadre d'une régie dotée de la seule autonomie financière ou sous la forme d'un établissement public dans le cadre d'une régie dotée de l'autonomie financière et de la personnalité morale). En effet, le budget principal de la commune pourra abonder le budget spécifique de son service via une subvention afin de couvrir un éventuel déséquilibre entre les dépenses et les recettes. Dans le cadre d'une gestion déléguée, le délégataire doit assumer une part du risque d'exploitation (Conseil d'État, Syndical intercommunal des transports publics de la région de Douai, 15 juin 1994) ce qui limite mais n'interdit pas le soutien financier du délégant en cas de difficultés financières. Toutefois, le service public de camping municipal peut parfois relever de la catégorie des services publics à caractère industriel et commercial (SPIC). En effet, le juge judiciaire considère qu'un camping municipal constitue un SPIC dans les cas où les modalités particulières de sa gestion impliquent que la commune a entendu lui donner ce caractère (Cour de cassation, 1ère civ, 31 mars 2010, n° 09-12821). En matière de SPIC, l'alinéa 1 de l'article L.2224-2 du CGCT pose une interdiction pour les communes de prendre en charge, dans leur budget propre, des dépenses au titre des services publics à caractère industriel et commercial. Toutefois, l'alinéa 2 de ce même article prévoit certaines dérogations et notamment « lorsque les exigences du service public conduisent la collectivité à imposer des contraintes particulières de fonctionnement ». Certaines dépenses supplémentaires engendrées par la crise sanitaire, notamment pour les budgets annexes en charge de campings municipaux, pourraient justifier la mise en œuvre de cette dérogation et donc permettre à la collectivité de subventionner de manière exceptionnelle son service public de camping municipal. Le Gouvernement est soucieux d'accompagner les collectivités territoriales qui sont, aux côtés de l'État, pleinement investies afin d'assurer la gestion de la crise actuelle et d'aider les acteurs économiques et associatifs de leurs territoires. C'est pourquoi, afin d'établir un constat partagé quant aux conséquences de cette crise sur la situation des finances locales et de proposer des mesures pour accompagner les collectivités les plus touchées, le Premier ministre a confié une mission dédiée au député Jean-René Cazeneuve, président de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation de l'Assemblée nationale. Suite à la remise de son rapport, le Premier ministre a annoncé des mesures actuellement examinées par le Parlement dans le cadre du projet de loi de finances rectificative. Pour les communes et intercommunalités, le Gouvernement a proposé au Parlement un mécanisme de compensation des recettes fiscales et domaniales, qui seront garanties à hauteur de la moyenne des années 2017, 2018 et 2019. Evalué à un montant de 750 millions d'euros, il devrait bénéficier, en première analyse, à un peu moins de 12 000 communes. Ces mesures, d'une ampleur inédite, doivent permettre au bloc communal de faire face aux difficultés financières rencontrées.