Saturation des stocks de lait, de pommes de terre et de lin
Question de :
M. Olivier Dassault
Oise (1re circonscription) - Les Républicains
M. Olivier Dassault attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la saturation des stocks de lait, de pommes de terre et de lin. La fermeture des restaurants, des commerces non alimentaires et l'annulation des évènements rassemblant du public ont eu de lourdes conséquences sur les débouchés habituels de ces secteurs d'activité. Dans les Hauts-de-France, la période du pic de production laitière est en cours et les laiteries sont déjà saturées. Plus de 400 000 tonnes de pommes de terre n'ont pas de débouchés. L'arrêt des entreprises de teillage de France oblige les producteurs de lins à stocker les récoltes de deux années. Que faire des stocks 2019 et de la récolte 2020 de ces trois filières ? La surproduction et l'engorgement qui en résultent risquent de déséquilibrer les marchés agricoles et faire chuter les prix. Les prémices d'une telle crise se font d'ores et déjà sentir. Les professionnels du secteur sollicitent l'activation de l'aide au stockage privé pour le secteur du lin en vertu de l'article 17 du règlement 1308/2013, ainsi que pour le secteur de la pomme de terre transformée. La Commission européenne a prouvé, lors de la crise du lait de 2016, qu'elle pouvait jouer un rôle majeur dans la stabilisation des marchés agricoles grâce à des outils de gestion de crise à sa disposition. Au regard de la situation exceptionnelle, la France doit appuyer l'usage de mesures à la hauteur des enjeux stratégiques, économiques et sociaux. L'indépendance agricole du pays est en jeu. Il souhaite savoir ce qu'entend faire le Gouvernement pour défendre l'agriculture française au niveau européen.
Réponse publiée le 4 août 2020
Pour faire face à l'épidémie de covid-19 le Gouvernement a adopté, au regard de l'état d'urgence sanitaire, des dispositions de limitation de circulation du public et d'accès à certains établissements, dans l'intérêt général des concitoyens. Dans ce contexte, les impacts sont importants pour de nombreuses filières agricoles et agroalimentaires, secteurs essentiels et vitaux à la France. Le déconfinement amorcé le 11 mai 2020 doit permettre à certaines filières de retrouver une part de leurs activités et débouchés. Si la filière de la pomme de terre de consommation a pu maintenir ses débouchés, la filière de la pomme de terre de transformation a été confrontée à de fortes difficultés conjoncturelles, résultant de l'absence de débouchés vers la restauration hors domicile, qui représente 50 % du marché de la pomme de terre transformée en France, et vers les pays tiers. En l'absence de débouchés, plusieurs usines de transformation ont ralenti ou stoppé leur activité, de sorte que de nombreuses tonnes de pommes de terres pour l'industrie sont toujours en attente de transformation. Les filières laitières ont également fait face à des difficultés liées à des pertes de débouchés, compte tenu de la fermeture pendant près de deux mois d'une majorité du secteur de la restauration hors domicile, de celle d'un nombre important de marchés, et de l'orientation des achats alimentaires vers des produits de première nécessité et moins d'achats festifs de produits sous signe de qualité par les consommateurs. En outre, si la période de pic annuel de production laitière a aggravé la problématique, en France les opérateurs de la filière ont réagi rapidement et ont permis de diminuer la collecte par rapport aux années précédentes. Au niveau local, des réorganisations de collecte du lait et de leurs débouchés ont été mises en place pour optimiser les capacités de valorisation du lait, avec notamment la mobilisation de certaines grandes entreprises, en particulier coopératives. Il convient de saluer la solidarité exemplaire qui s'est exercée dans la filière laitière et a permis d'atténuer les difficultés rencontrées par les plus petites entreprises pour lesquelles les alternatives sont réduites. De plus, des efforts ont été entrepris par les enseignes de grande distribution pour maintenir ouverts les rayons à la coupe et préserver au mieux la diversité des produits proposés aux consommateurs. Les dispositions de la loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire ont contribué à améliorer les relations commerciales et le niveau du prix du lait payé aux producteurs, et le ministre chargé de l'agriculture veillera à ce qu'il n'y ait pas de retours en arrière sur les progrès obtenus. S'agissant de la filière lin, des échanges sont en cours entre le ministère chargé de l'agriculture et les députés des zones de production afin d'accompagner au mieux la filière confrontée à un arrêt des exportations vers la Chine depuis le début de la crise dans ce pays. Le ministère de l'agriculture et de l'alimentation maintient des échanges réguliers avec les représentants de ces filières afin d'apporter des réponses les plus adaptées possibles. Le ministère de l'agriculture et de l'alimentation a demandé à la Commission européenne l'activation de mesures de soutien spécifiques aux filières. Celle-ci a apporté une première réponse en autorisant l'activation, au profit de la filière pomme de terre de transformation, de l'article 222 du règlement (UE) n° 1308/2013 qui permet aux organisations interprofessionnelles et aux organisations de producteurs de mettre en œuvre des mesures de prévention et de gestion de crise, financées sur fonds propres, par le biais d'actions concertées visant à stabiliser les marchés. La Commission a également activé, pour six mois, de manière rétroactive à compter du 1er avril 2020, l'article 222 pour le lait afin de permettre la planification de la production laitière. Cette activation a permis à l'interprofession laitière nationale, le centre national interprofessionnel de l'économie laitière, de mettre en place sur le mois d'avril 2020 un dispositif d'aide à la réduction volontaire de la production laitière. Les acheteurs du lait ont également appelé à la responsabilité en demandant aux producteurs de modérer leur collecte sur les mois de printemps. Enfin la Commission a activé, suite à une demande des autorités françaises, des mesures de stockage privé pour la poudre de lait écrémé, le beurre et l'ensemble des fromages, sous indication géographique ou non. Ces mesures sont ouvertes dès à présent. Le ministère de l'agriculture et de l'alimentation poursuit ses efforts auprès de la Commission pour défendre l'agriculture française en vue d'obtenir un soutien financier européen aux entreprises des filières durement impactées. Le ministère de l'agriculture et de l'alimentation a également décidé d'ouvrir un dispositif de soutien exceptionnel pour la filière pommes de terre afin de faciliter l'écoulement des stocks. Le ministère de l'agriculture et de l'alimentation reste, avec l'ensemble du Gouvernement, pleinement mobilisé pour suivre l'évolution de la situation pour toutes les filières agricoles et pour apporter les solutions appropriées le plus rapidement possible. La crise du covid-19 place le monde dans une situation inédite avec un double défi, sanitaire et économique auquel il convient de faire face collectivement.
Auteur : M. Olivier Dassault
Type de question : Question écrite
Rubrique : Agriculture
Ministère interrogé : Agriculture et alimentation
Ministère répondant : Agriculture et alimentation
Dates :
Question publiée le 19 mai 2020
Réponse publiée le 4 août 2020