15ème législature

Question N° 297
de M. Jean Lassalle (Non inscrit - Pyrénées-Atlantiques )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Premier ministre
Ministère attributaire > Action et comptes publics

Rubrique > services publics

Titre > Disparition des Services Publics

Question publiée au JO le : 10/04/2018
Réponse publiée au JO le : 18/04/2018 page : 2994
Date de changement d'attribution: 17/04/2018

Texte de la question

M. Jean Lassalle interpelle M. le Premier ministre sur la disparition de ce qui reste des services publics dans la circonscription dont il est l'élu et, de manière générale, à travers tous les territoires de France. M. le député, M. le maire d'Oloron et l'ensemble des élus concernés ont assisté à la fermeture de la maternité d'Oloron-Sainte-Marie, malgré un combat magnifique et une belle mobilisation de toutes les forces vives qui se sont retrouvées sous la bannière de Robert Bareille. Les médecins nécessaires étaient là et rien ne justifiait cette fermeture ! Et pourtant rien n'y a fait ! La directrice en poste avait été expressément nommée par l'ARS avec une seule feuille de route : fermer cette maternité. Avec sa hiérarchie, elle s'est livrée à un véritable lavage de cerveaux de la plupart des chirurgiens et médecins. Le personnel a été divisé avec un cynisme qui fait froid dans le dos. Résultat : au moment où l'égalité homme-femme tente de se hisser à son juste niveau, les femmes des vallées, sur un territoire immense où vivent tout de même 60 000 personnes, se voient porter leur enfant à 2 h 30 de la maternité la plus proche : Bayonne ou Pau ! Les femmes vivant dans la ville sous-préfecture d'Oloron se trouvent à plus d'une heure de la maternité de Pau, sur une route qui n'ose pas dire ni son nom ni son état. La fermeture de la maternité va précéder de quelques mois celle de l'hôpital d'Oloron, comme partout ailleurs. Ce territoire est devenu une zone de sous-citoyens sans espoir, sans perspective de vie puisqu'un territoire qui renonce à voir naître ses enfants est un territoire qui se prépare à mourir. Que deviendront les plus de 400 salariés de cet hôpital ainsi que leur famille ? À Saint-Claude, dans le Jura, au soir du mardi 3 avril 2018 des centaines de femmes pleuraient devant les lourdes chaînes et les cadenas, emprisonnant leur maternité où le matin même des enfants voyaient encore le jour. Ce Gouvernement s'apprête à fermer la compagnie de gendarmerie de Mauléon, avec leurs gradés, en un lieu où plus qu'ailleurs les populations ressentent le besoin d'être protégées. Sur ce territoire, il a été perdu plus de postes scolaires que jamais perdu auparavant. C'est autant de regroupements pédagogiques mis en danger, autant de maternelles fermées, de cours de basque, d'occitan parfois même de français non dispensés, autant d'écoles définitivement fermées ou promises à la fermeture. La fondation des apprentis d'Auteuil quitte la commune d'Audaux, dans laquelle elle était installée depuis 80 ans. Elle donnait du travail à plus de 80 salariés et nourrissait leur famille. Elle se voit délocaliser à Pau dans un contexte de division et de cynisme fomenté par cette grande fondation caritative. Qui viendra compenser tant d'emplois perdus ? Ni M. le Premier ministre, ni aucun membre du Gouvernement, n'a cru bon de bouger le petit doigt pour aider dans ce combat où mille fois, ils ont été appelé au secours. Quel terrifiant message délivré aux territoires de France par une fondation qui, durant si longtemps, sauva tant d'orphelins, forma tant et tant d'apprentis aux métiers de chez nous. Ce territoire n'est même plus habilité à former des apprentis ! Quel message d'espoir pour les jeunes qui s'y accrochent encore ? Aussi, il lui demande quel avenir il voit pour ces territoires, et les territoires de France malheureusement tous logés à la même enseigne ? Ils veulent y croire. Ils sont désemparés. Leur population est désespérée. Elle ne croit plus en rien ni en personne.

Texte de la réponse

DISPARITION DES SERVICES PUBLICS


M. le président. La parole est à M. Jean Lassalle, pour exposer sa question, n°  297, relative à la disparition des services publics.

M. Jean Lassalle. Mon temps de parole étant limité, je suis contraint, monsieur le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics, de vous présenter une série de questions en cascade et j'en suis désolé.

Compte tenu des bonnes relations que j'entretenais avec le Président de la République avant son élection, je lui ai adressé une demande de rendez-vous le 19 juillet 2017 afin de lui présenter mon immense circonscription, qui allie mer et montagne, en vue de la constitution d'un laboratoire pour une nouvelle politique des territoires. Or m'a été opposée une fin de non-recevoir.

Lorsque le tunnel routier du Somport fut ouvert, voilà près de vingt ans, la route nationale 134 – rebaptisée européenne 7 – y conduisant devait être améliorée, avec notamment des déviations pour les communes les plus touchées. Rien n'a jamais été fait.

Malgré des années d'initiatives et de propositions, et le fait que le maire d'Oloron-Sainte-Marie ait trouvé les médecins nécessaires, la maternité d'Oloron, tout comme celle de Saint-Claude dans le Jura et tant d'autres, a été fermée. Au moment où l'on parle d'égalité entre hommes et femmes, certaines femmes qui habitent dans un territoire de piémonts et de vallées se trouvent en 2018 à deux heures trente de la maternité la plus proche ! L'hôpital d'Oloron est lui-même, avec ses 400 employés, condamné d'ici quelques mois, alors qu'il couvre un bassin de vie de 60 000 habitants.

Vous vous apprêtez à fermer la compagnie de gendarmerie de Mauléon. L'abattoir de Mauléon se trouve, lui aussi, en grande difficulté.

Notre territoire n'a jamais perdu autant de postes scolaires que cette année.

La fondation caritative des Apprentis d'Auteuil a licencié ses quatre-vingts salariés d'Audaux, dans la campagne béarnaise, pour se délocaliser à Pau – avec l'accord de François Bayrou, le maire actuel. Notre territoire n'est même plus reconnu apte à former des apprentis ! Quel message d'espoir pour nos jeunes !

J'ai présenté au mois de décembre dernier avec Marc Lassus, le créateur et le diffuseur mondial de la carte à puce, à l'entourage du Président un très beau projet susceptible d'apporter de l'eau pure, de l'énergie, le wifi et le développement de la permaculture. Ce serait la solution aux difficultés de Saint-Barthélemy et Saint-Martin et de tous les territoires victimes des typhons, et aussi un grand outil de coopération avec les pays en quête de développement ; des centaines d'emplois en perspective dans notre département. Vous m'avez personnellement, monsieur le secrétaire d'État, très bien répondu sur ce sujet il y a quelques jours.

Enfin, jugeant certainement le moment opportun, le Gouvernement s'apprête à introduire – ce qui en fera six au total – deux ours slovènes chez nous, dans les Pyrénées, dès le mois de septembre prochain, ruinant ainsi un pastoralisme renaissant.

Le Gouvernement envisage-t-il enfin d'apporter quelques réponses à tant de questions et à l'immense sentiment d'abandon que ressentent mes compatriotes ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics. Monsieur le député, vous avez effectivement évoqué de nombreuses questions et de nombreux projets qui vous sont chers et qui, je n'en doute pas, pourront prospérer dans les semaines qui viennent.

Permettez-moi de ne répondre que sur deux points : les questions médicales d'une part et l'ambition du Gouvernement pour la ruralité d'autre part.

Depuis quelque temps effectivement, la maternité d'Oloron-Sainte-Marie a connu une succession d'événements indésirables graves qui ont suscité de réelles interrogations quant à la sécurité et la qualité de la prise en charge des femmes et des nourrissons du territoire. Depuis 2014, la maternité a en effet enregistré quatre événements indésirables graves, alors que seuls vingt-deux événements du même type ont été recensés dans l'ensemble des maternités de Nouvelle-Aquitaine au cours de la même période. Au vu du risque avéré, les professionnels du centre hospitalier et les médecins libéraux du territoire ont, à plusieurs reprises, alerté les autorités concernées sur la nécessité de trouver une alternative à cet établissement.

La maternité était en outre confrontée à un important problème de démographie médicale. Le seul gynécologue-obstétricien avait annoncé l'arrêt de ses gardes obstétricales à la fin de 2017 ; parmi ses deux remplaçants habituels, l'une était une praticienne âgée de 69 ans ; en outre, depuis le mois de mai 2015, la maternité ne comptait plus de pédiatre titulaire ; enfin, elle recourait massivement à l'intérim. La permanence des soins en pédiatrie n'ayant pu être assurée dans des conditions réglementaires, cela avait conduit, à trois reprises, à la fermeture du plateau d'accouchement.

Au regard de ce mode de fonctionnement extrêmement dégradé, l'agence régionale de santé de Nouvelle-Aquitaine n'a pu laisser perdurer la situation. Dès le mois de novembre 2015, la commission médicale d'établissement du centre hospitalier s'était prononcée, avec le soutien des directions des centres hospitaliers de Pau et d'Oloron, en faveur de la mise en place d'un centre périnatal de proximité – CPP – en lieu et place de la maternité. Elle s'est à nouveau exprimée en ce sens, et à l'unanimité, au mois d'octobre 2017.

L'agence régionale de santé a souhaité s'appuyer sur les compétences présentes au sein de la maternité. Un véritable projet de santé publique, construit avec les réseaux de périnatalité et les sages-femmes libérales, a donc été envisagé. Ce CPP permettra d'assurer, sur le territoire concerné, un suivi prénatal et post-natal des femmes comme des nouveau-nés, et dans des conditions de sécurité qui seront bien meilleures.

J'en viens à un autre volet de votre question, l'accompagnement de la ruralité. Le Gouvernement est pleinement mobilisé sur ce sujet et agit notamment au travers du maintien des dotations de fonctionnement comme d'investissement, du développement du haut débit et du numérique sur l'ensemble des territoires à un rythme accéléré par rapport à ce qui était prévu initialement, au travers enfin, sous l'égide de Jacques Mézard et de Julien Denormandie, d'outils spécifiques au profit des villes-centres.

Le Gouvernement a un objectif : faire en sorte que les territoires les plus ruraux, comme votre circonscription, monsieur le député, soient mieux accompagnés par l'État.

M. le président. La parole est à M. Jean Lassalle.

M. Jean Lassalle. Monsieur le secrétaire d'État, vous qui avez fait preuve il y a quelques jours de compréhension à mon égard, je vous demande simplement une chose : que quelques-uns de vos collègues – peut-être vous-même – me reçoivent, afin que je puisse faire directement état de ces problèmes.