15ème législature

Question N° 309
de M. Éric Coquerel (La France insoumise - Seine-Saint-Denis )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Affaires européennes
Ministère attributaire > Affaires européennes

Rubrique > politique extérieure

Titre > situation des migrants en Libye

Question publiée au JO le : 22/11/2017
Réponse publiée au JO le : 22/11/2017 page : 5297

Texte de la question

Texte de la réponse

SITUATION DES MIGRANTS EN LIBYE


M. le président. La parole est à M. Éric Coquerel, pour le groupe La France insoumise.

M. Éric Coquerel. Monsieur le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, plutôt deux fois qu'une, étant donné la gravité du sujet : le 14 novembre, CNN diffusait un reportage sur une vente aux enchères, en Libye, portant sur une douzaine de migrants, tous originaires d'Afrique noire. D'autres médias ont depuis confirmé l'existence de ces marchés aux esclaves.

Le 13 mai 1791, devant l'Assemblée nationale, Robespierre répliqua à ceux qui voulaient protéger l'esclavage par la Constitution, au nom des intérêts des colonies : « Périssent les colonies plutôt qu'un principe ! ». Il n'est en effet pas de République, il n'est pas de valeurs universelles sans la défense de ce principe. Or, depuis le 14 novembre, rares sont les voix qui se sont émues de cette abomination. Une manifestation spontanée de plusieurs milliers de personnes, samedi dernier, n'a guère valu d'autres réactions officielles que celle de condamner les rares incidents survenus lors de sa conclusion.

Alors que l'OIM – Organisation internationale pour les migrations – s'insurge contre la marchandisation des êtres humains, que le président de l'Union africaine a exprimé son indignation, que le Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l'homme a directement mis en cause la responsabilité de l'Italie et de l’Union européenne, je n'ai vu qu'un tweet d'Emmanuel Macron. Pourtant, la responsabilité de la France dans le désordre et le vide sécuritaire qui se sont installés en Libye, à la suite de son intervention militaire de 2011, sont gravissimes.

On n'a vu ni démocratie, ni paix en Libye, mais l'émergence de milices qui, depuis les accords avec l’Union européenne, traitent directement la question des migrants en tant que passeurs, gardiens de centres de rétention et, maintenant, trafiquants d'esclaves.

Il y a quelques semaines, Emmanuel Macron voyait en la Libye un « pays tiers sûr » dans le parcours d'asile pour gérer les migrations. Le Gouvernement se rend-il compte aujourd'hui de l'inanité de ce dispositif ? Que compte faire la France pour dénoncer les accords entre l’Union européenne et la Libye, qui s'avèrent aussi inefficaces qu'inhumains ? Comptez-vous réagir plus vigoureusement que par un tweet devant l'abominable ? Il ne faut pas seulement pleurer, il faut aussi agir ! (Applaudissements sur les bancs des groupes FI, GDR et NG.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre chargée des affaires européennes.

Mme Nathalie Loiseau, ministre chargée des affaires européennes. Monsieur le député, vous avez raison : ce qui se passe en Libye constitue une abomination. Vous avez raison : c'est parce qu'aujourd'hui, il n'y a pas d'État stable et sûr que l'on ne peut pas espérer y faire respecter les droits de l'homme. Là où je ne vous rejoins pas, c'est lorsque vous semblez penser que nous considérerions la Libye comme un État tiers sûr. Les efforts que déploie le Président de la République vont dans le sens d'une stabilisation de la Libye. C'est la raison pour laquelle il a réuni à La Celle-Saint-Cloud le président du conseil présidentiel du gouvernement d'entente nationale de Libye et le maréchal Haftar. C'est la raison pour laquelle nous soutenons les efforts du secrétaire général des Nations unies et de son représentant spécial, Ghassan Salamé. Souvenons-nous qu'il y a quelques années, la Libye était un pays de destination de très nombreux migrants, notamment subsahariens. Aujourd'hui, c'est devenu le pays de leur martyre.

Ce que nous faisons aujourd'hui, c'est aller chercher les demandeurs d'asile en besoin manifeste de protection avant qu'ils n'aient à subir un calvaire en Libye. C'est ce que nous avons fait la semaine dernière, avec la mission que nous avons envoyée au Niger. Nous demandons à nos partenaires européens d'agir de même.

M. Olivier Faure. C'est du pipeau !

Mme Nathalie Loiseau, ministre . Ce que nous faisons, c'est soutenir l'Organisation internationale pour les migrations, le Haut-Commissariat des Nations unies aux réfugiés, pour qu'ils puissent travailler dans de meilleures conditions en Libye. Ce que nous faisons, je l'ai déjà dit, je le répète, c'est travailler avec les pays d'origine des migrations pour offrir à tous ces jeunes qui risquent leur vie un avenir dans leur pays et sur leur continent. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe REM.)