Rubrique > santé
Titre > Effet des inégalités économiques et sociales face au coronavirus
M. Dominique Potier attire l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé sur la nécessité de documenter l'effet des inégalités sur la pandémie de covid-19. Avec la pandémie, on fait l'apprentissage tragique du lien entre la santé humaine et l'écologie. Cette prise de conscience, dont le concept « One Health » est devenu l'emblème, ne doit pas faire oublier la modernité du lien entre politique sanitaire et sociale dans une perspective de prévention des maladies chroniques et de résistance aux risques pandémiques. Déjà, des premières enquêtes montrent l'inégalité face au virus. En touchant plus durement les personnes les plus vulnérables et les plus précaires de la société, la crise sanitaire a montré, s'il en était besoin, que les inégalités sociales et économiques se traduisaient également dans l'inégal accès aux soins et à la qualité de vie. En témoigne notamment la surmortalité constatée au sein des professions les plus dévalorisées et dans certaines zones géographiques où les handicaps économiques, sociaux et sanitaires se cumulent. Ce n'est pas un hasard si le département de la Seine-Saint-Denis, à la fois le plus jeune et le plus pauvre de France, est celui qui a connu la plus forte hausse du taux de surmortalité en mars et avril 2020 (une augmentation de 130 % par rapport à l'année 2019). Il y a fort à parier que ces écarts de surmortalité se retrouvent également à sein même des métropoles du Grand Est, d'un quartier à l'autre. Deux hypothèses sont régulièrement avancées pour expliquer la surmortalité des catégories les plus démunies de la population : une surexposition au virus en amont et une plus grande vulnérabilité en cas d'infection. La première s'explique d'abord par l'occupation des professions en première ligne pendant l'épidémie (agent-hospitalier, aides-soignants, caissier, livreur, etc.) qui présentent un plus grand risque de contamination que la moyenne. La surexposition passe également par la promiscuité des espaces familiaux et collectifs pour les personnes les plus précaires, qui favorise la transmission du virus. La seconde résulte d'une articulation entre des inégalités sociales et des inégalités sanitaires : il existe une double peine pour les personnes les plus précaires qui sont aussi, en moyenne, les plus vulnérables. Cela est notamment lié à la permanence de déserts médicaux dans certaines régions qui rendent l'accès aux soins plus difficile qu'ailleurs. À cela s'ajoute chez les plus précaires une plus grande propension des facteurs de comorbidité en cas de contagion (diabète, obésité, pathologies chroniques respiratoires...). Les inégalités économiques, sociales et sanitaires semblent donc avoir aggravé le bilan de la pandémie. Au même titre que les études en cours sur l'efficacité des traitements des patients contaminés et les recherches engagées pour développer un vaccin, une étude qui documente plus précisément la sociologie des personnes atteintes de la covid-19 et des personnes qui en sont décédées serait un levier puissant pour engager une authentique politique de prévention susceptible de limiter les conséquences dramatiques d'une nouvelle pandémie. Dans une logique préventive, il lui demande donc s'il est possible de commander une telle étude afin de tirer toutes les leçons sanitaires et politiques utiles de la pandémie.