Lutte contre les violences conjugales
Question de :
Mme Bérangère Couillard
Gironde (7e circonscription) - La République en Marche
Question posée en séance, et publiée le 17 juin 2020
LUTTE CONTRE LES VIOLENCES CONJUGALES
M. le président. La parole est à Mme Bérangère Couillard.
Mme Bérangère Couillard. Madame la garde des sceaux, nous ne le savons que trop bien : une femme meurt tous les deux ou trois jours sous les coups de son conjoint ou de son ex-conjoint. Ce chiffre nous a alertés. Les parlementaires de la majorité se sont fortement mobilisés, à travers la proposition de loi visant à protéger les victimes de violences conjugales, qui traduit les conclusions du Grenelle des violences conjugales initié par le Premier ministre et la secrétaire d'État Marlène Schiappa.
De nombreuses avancées ont été votées dans ce cadre : la levée du secret médical, la suspension du droit de visite et d'hébergement, l'interdiction de la médiation, la saisie des armes, ou encore la lutte contre l'espionnage numérique – autant de dispositions que je suis fière d'avoir défendues en tant que rapporteure de ce texte, qui a été adopté à l'unanimité au Sénat le 9 juin dernier. J'y vois là le signe d'un véritable consensus, dont j'espère qu'il conduira à un accord en commission mixte paritaire, afin de pouvoir appliquer très rapidement ces mesures, qui sont attendues.
Nous avions également, à travers la loi du 28 décembre 2019 visant à agir contre les violences au sein de la famille, créé la possibilité de délivrer une ordonnance de protection sous six jours. Chacun ici connaît l'importance cruciale de ce dispositif pour les victimes. Seulement, pour qu'il soit applicable, il importe de respecter le principe du contradictoire et d'assurer au défendeur un délai suffisant pour faire valoir ses droits – le pire étant, pour la victime, l'annulation de la procédure. Vous avez pris un décret en ce sens.
Je sais que vous avez à cœur une meilleure protection des victimes, mais ce décret a suscité de nombreuses interrogations, notamment parmi les associations d'aide aux victimes. Pour y répondre, vous avez créé un comité de pilotage regroupant les acteurs concernés, afin qu'une solution adaptée voie le jour. C'est pourquoi je souhaite que vous apportiez des précisions quant à l'avancée des discussions relatives à ce décret. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LaREM.)
M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice. L'engagement du Gouvernement dans la lutte contre les violences conjugales est très fort et pérenne. Il accompagne le vôtre. Depuis plusieurs mois, le chiffre toujours glaçant des féminicides semble connaître une légère inflexion : trente-six féminicides ont été comptabilisés depuis le début de l'année, contre 150 en 2019. Ce chiffre nous encourage à poursuivre notre politique volontariste.
Celle-ci se traduit par différentes mesures, outre celles que vous avez évoquées et qui figureront dans la proposition de loi en cours de débat. Je songe à l'augmentation du nombre de « téléphones grave danger » distribués, qui est passé de 300 à 1 000 en un an ; aux circuits d'urgence créés dans les juridictions pour mieux accompagner les victimes ; à l'éviction des conjoints violents, qui constitue un enjeu très important – la secrétaire d'État chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et moi-même avons notamment, pendant l'épidémie de covid-19, financé la création d'une plateforme d'hébergement des conjoints violents ; ou aux 4 000 ordonnances de protection délivrées en 2019, dont nous souhaitons encore accroître le nombre.
Comme vous l'avez rappelé, le Parlement a voté un texte prévoyant la délivrance de ces ordonnances dans un délai de six jours une fois le juge saisi. Nous avons publié, le 27 mai dernier, un décret d'application tenant compte à la fois du principe du contradictoire et de l'exigence de délivrance. Ce décret a suscité des inquiétudes auxquelles il m'appartenait de répondre. J'ai donc beaucoup discuté avec les associations, et nous sommes convenues de plusieurs évolutions, parmi lesquelles figurent l'accompagnement des victimes tout au long de la procédure, l'aide juridictionnelle, le passage de l'assignation de vingt-quatre à quarante-huit heures, et la fin de la caducité.
Ces éléments, qui trouveront leur traduction dans le décret rectifié, me semblent de nature à apaiser les inquiétudes et à conforter l'objectif que nous partageons : lutter contre les violences conjugales. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – M. Jean-Louis Bourlanges et Mme Géraldine Bannier applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme Bérangère Couillard.
Mme Bérangère Couillard. Merci pour ces précisions, madame la ministre. En tant que parlementaires de la majorité, nous serons particulièrement attentifs à ce que ce décret soit favorable aux victimes. Nous veillerons également à ce que le délai de six jours voté par le Parlement soit respecté. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)
M. Fabien Di Filippo. Vous ne semblez pas très confiants !
Auteur : Mme Bérangère Couillard
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Femmes
Ministère interrogé : Justice
Ministère répondant : Justice
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 17 juin 2020