15ème législature

Question N° 3132
de M. Loïc Prud'homme (La France insoumise - Gironde )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Agriculture et alimentation
Ministère attributaire > Agriculture et alimentation

Rubrique > produits dangereux

Titre > Réévaluation du glyphosate par l'ANSES

Question publiée au JO le : 25/06/2020
Réponse publiée au JO le : 25/06/2020 page : 4627

Texte de la question

Texte de la réponse

RÉÉVALUATION DU GLYPHOSATE PAR L'ANSES


M. le président. La parole est à M. Loïc Prud'homme.

M. Loïc Prud'homme. Fin 2017, le Président Macron promettait la fin de l'usage du glyphosate d'ici à trois ans. Alors que nous sommes à quelques semaines de cette échéance, tout le monde le sait désormais : cette promesse, comme tant d'autres, c'était du flan ! Mais s'agissant du glyphosate, les choses vont plus loin. Nous assistons à de sombres manœuvres visant à nous en imposer jusqu'en 2027.

En effet, la France fait partie des quatre pays européens choisis pour réévaluer ce pesticide. Début 2018, le Gouvernement saisit donc l'ANSES, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, pour qu'elle lance des études indépendantes.

C'est à ce moment que les embrouilles commencent, avec les nominations discrétionnaires – sans appel à candidatures – de cinq experts pas trop virulents sur la question des pesticides, plutôt que la constitution d'un groupe ouvert de vingt experts.

Ces cinq bons génies mettront ensuite un an à rédiger le cahier des charges censé définir les critères des études et les compétences des laboratoires. Et là, c'est un festival ! Le cahier des charges est écrit de façon si restrictive qu'un seul consortium peut y répondre – lequel comprend étonnamment trois des cinq rédacteurs dudit cahier des charges.

M. Thibault Bazin. Magouilles, magouilles…

M. Loïc Prud'homme. Celui-ci est validé par un comité d'expertise scientifique, dirigé, là encore, par l'un des rédacteurs du cahier des charges, M. Nesslany.

L'ANSES mettra cinq mois de plus à le publier, mais ne laissera que deux mois et demi, au cœur de l'été 2019, pour répondre à l'appel à projets relatif à ces études d'évaluation de la cancérogénicité du glyphosate.

De plus, le cahier des charges oublie opportunément les tests sur les formulations commerciales, évacuant ainsi le problème central des co-formulants.

Notons enfin que l'ANSES a procédé à cette attribution hors marché public pour la bagatelle de 1 million d'euros.

Tout cela sent le conflit, voire la collusion d'intérêts à plein nez ! Monsieur le Premier ministre, quand allez-vous mettre fin à ces méthodes opaques au cœur même de l'ANSES, qui jettent un discrédit définitif sur cette agence nationale ? Quand allez-vous mettre fin à ces manigances, qui ont pour but de faire perdurer l'épandage de ces pesticides qui nous empoisonnent ? (Applaudissements sur les bancs du groupe FI.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

M. Pierre Cordier. Ex-futur maire de Biarritz !

M. Jean-Luc Mélenchon. Renégat ! Quelle honte !

M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Le combat politique ne vous oblige pas au mensonge, à la diffamation et à dire n'importe quoi. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, MODEM et Agir ens.)C'est bien dommage, monsieur le député : en ces temps troublés, il convient, lorsqu'on est responsable politique, de mettre de la sérénité dans le débat et de ne pas enflammer la société ; je pense que vous devriez agir de la sorte. (Exclamations sur les bancs du groupe FI.)

M. Jean-Luc Mélenchon. Gardez vos leçons, renégat !

M. Didier Guillaume, ministre . Oui, le Président de la République s'est engagé et la France sortira bien du glyphosate et des pesticides comme nous l'avons annoncé ; il n'y a aucun problème. (Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas applaudit.)

S'agissant de la décision de l'ANSES, contrairement à ce que vous dites, ce n'est pas un choix discrétionnaire qui a été fait : c'est un appel d'offres qui a été lancé par l'Agence.

M. Loïc Prud'homme. Non !

M. Didier Guillaume, ministre . Il n'y a pas eu cinquante réponses à cet appel d'offres, mais deux, qui ont été examinées par l'ANSES, et ce n'est pas un candidat individuel qui a été retenu, mais une équipe pluridisciplinaire.

M. Loïc Prud'homme. Ils étaient trois !

M. Didier Guillaume, ministre . Ce que souhaite le Gouvernement, tout comme l'ANSES, c'est s'appuyer sur la rationalité et sur la science, et non sur les peurs, et regarder ce qu'il en est vraiment.

M. Loïc Prud'homme. Vous mentez !

M. Didier Guillaume, ministre . Cela dit, étant donné que les appels d'offres sont de plus en plus pointus, et compte tenu du nombre de molécules à traiter, il est vrai que de moins en moins d'équipes pluridisciplinaires et de consortiums sont en mesure d'y répondre ;…

M. Loïc Prud'homme. Ce n'est pas cela !

M. Didier Guillaume, ministre . …vous avez raison sur ce point.

M. Loïc Prud'homme. Il y a conflit d'intérêts du début à la fin !

M. Didier Guillaume, ministre . Il sera certainement nécessaire, demain, de revoir la manière dont l'ANSES…

M. Loïc Prud'homme. Non, aujourd'hui !

M. Didier Guillaume, ministre . …et d'autres instituts indépendants lancent ces appels d'offres pour les rendre encore plus performants. Mais il ne faut pas remettre l'indépendance de ces organismes en cause, sans quoi je serais au regret de vous dire que nous ne sommes plus dans la rationalité, mais que nous nous rapprochons de l'obscurantisme – et je sais que ce n'est pas votre volonté. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)

M. Loïc Prud'homme. Ce n'était pas un appel d'offres !