15ème législature

Question N° 31596
de M. Dominique Potier (Socialistes et apparentés - Meurthe-et-Moselle )
Question écrite
Ministère interrogé > Économie, finances et relance
Ministère attributaire > Économie, finances et relance

Rubrique > entreprises

Titre > Plafonnement des écarts de salaire

Question publiée au JO le : 04/08/2020 page : 5216
Réponse publiée au JO le : 16/02/2021 page : 1404
Date de signalement: 10/11/2020

Texte de la question

M. Dominique Potier interroge M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance, sur le montant des recettes fiscales que génèrerait une nouvelle législation sur le plafonnement des écarts de rémunérations au sein des entreprises. La proposition de loi pour une limite décente des écarts de revenus, déposée le 16 juin 2020 par le groupe Socialistes et apparentés, détaille deux dispositifs pour redistribuer la valeur ajoutée au sein de l'entreprise et résorber les inégalités à la source de la distribution des revenus. Le premier est un mécanisme incitatif à la diminution des écarts de revenu au sein de chaque entreprise. Au-delà d'un plafond de rémunération correspondant à douze fois la rémunération moyenne du décile de salariés disposant de la rémunération la plus faible, les rémunérations concernées et les cotisations qui y sont associées ne sont plus déductibles du calcul de l'impôt sur les sociétés. Le second pose une limite à l'indécence des écarts de rémunération. Le montant annuel du salaire maximal appliqué dans une entreprise, calculé en intégrant tous les éléments fixes, variables ou exceptionnels de toute nature qui la composent, ne peut être supérieur à vingt fois le montant annuel du salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC). Malgré une modeste avancée grâce à la loi PACTE, les entreprises sont faiblement transparentes sur les écarts de revenu qu'elles pratiquent. L'article 187 oblige les entreprises cotées à communiquer les écarts entre la rémunération des dirigeants et les salaires moyens des salariés, ainsi qu'avec le salaire médian de ces derniers. Néanmoins, la loi ne prévoit pas la publication du ratio entre la plus haute rémunération et le décile des rémunérations les plus faibles, alors qu'il s'agit là d'un indicateur bien plus révélateur de la capacité de l'entreprise à redistribuer sa valeur ajoutée. À l'heure de la relance et de la reconstruction, il n'y a aucune raison que le coût des rémunérations excessives pèse indirectement sur la collectivité. L'enjeu est donc d'avoir une idée précise de la réalité économique à laquelle on fait face. Combien d'entreprises présentent des écarts de revenus en leur sein supérieurs au ratio de 1 à 12 ? Quel montant de recettes fiscales serait généré par le mécanisme incitatif de non-déductibilité de l'impôt des sociétés au-delà d'un écart supérieur à 12 fois la moyenne des rémunérations du dernier décile ? Combien d'entreprises pratiquent des rémunérations supérieures à 20 fois le SMIC ? Il lui demande donc si les services du ministère peuvent communiquer ces informations afin d'éclairer le débat public sur la juste rémunération du travail et la résorption des inégalités à la source.

Texte de la réponse

L'article 187 de la loi n° 2019-489 du 22 mai 2019 relative à la croissance et à la transformation des entreprises complété par l'ordonnance n° 2019-1234 du 27 novembre 2019 répondent de manière équilibrée et exigeante à la question de la transparence des rémunérations dans les entreprises. Ils procèdent à l'enrichissement des informations se rapportant aux rémunérations des mandataires sociaux contenues dans le rapport sur le gouvernement d'entreprise qui doit dorénavant mentionner des ratios entre, d'une part, le niveau de la rémunération du président du conseil d'administration, du directeur général et de chaque directeur général délégué de ces dirigeants et, d'autre part, la rémunération moyenne et médiane, sur une base équivalent temps plein des salariés de la société autres que les mandataires sociaux. Le législateur et le Gouvernement, qui ont accentué l'exigence issue de la directive 2017/828 du Parlement européen et du Conseil du 17 mai 2017 modifiant la directive 2007/36/CE en vue de promouvoir l'engagement à long terme des actionnaires, n'ont pas choisi d'imposer aux entreprises concernées de diffuser d'autres informations sur la structure des rémunérations dans les entreprises. Ainsi, en l'absence de modalités déclaratives spécifiques pour les entreprises, la direction générale des finances publiques ne dispose pas, dans les liasses fiscales, des informations statistiques générales sur les écarts de revenus dans les entreprises. Pour mémoire, la seule obligation déclarative en ce domaine, prévue par l'article 54 quater du code général des impôts (CGI), concerne la déclaration des rémunérations versées aux 10 ou 5 personnes les mieux rémunérées, suivant que l'effectif du personnel dépasse ou non 200 salariés, ou 50 000 € pour l'une d'entre elles prise individuellement et lorsque le montant total des rémunérations directes ou indirecte dépasse 300 000 € ou 150 000 €, selon qu'il se rapporte aux dix ou cinq personnes les mieux rémunérés. La proposition de rendre non déductibles du calcul de l'impôt sur les sociétés les rémunérations et les cotisations qui y sont associées excédant douze fois la rémunération moyenne du décile de salariés disposant de la rémunération la plus faible n'est donc pas chiffrable à partir des données fiscales disponibles. En ce qui concerne le coût pour la collectivité des rémunérations excessives versées par les entreprises, il résulte des dispositions de l'alinéa 2 du 1° du 1 de l'article 39 du CGI que les dépenses de personnel ne sont, par principe, admises en déduction des résultats que dans la mesure où elles correspondent à un travail effectif et ne sont pas excessives eu égard à l'importance du service rendu. Le contrôle, lorsqu'il est exercé, a pour objet de vérifier que la rémunération globale allouée à un dirigeant ou à un salarié correspond à un travail réel et ne présente pas un caractère disproportionné. Parmi les critères habituellement retenus pour qualifier une rémunération d'excessive, l'administration apprécie notamment le niveau de rémunération des personnes occupant un emploi analogue, l'importance de la rémunération par rapport aux bénéfices sociaux ou aux salaires des autres membres du personnel, l'importance de l'activité déployée ou encore la qualification professionnelle.