15ème législature

Question N° 31632
de M. Pierre-Henri Dumont (Les Républicains - Pas-de-Calais )
Question écrite
Ministère interrogé > Justice
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > lieux de privation de liberté

Titre > Question relative à la récente circulaire sur la régulation carcérale

Question publiée au JO le : 04/08/2020 page : 5241
Réponse publiée au JO le : 11/05/2021 page : 4091
Date de signalement: 24/11/2020

Texte de la question

M. Pierre-Henri Dumont attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la récente circulaire relative à la régulation carcérale. Le 24 mai 2020, la fin de la surpopulation carcérale était annoncée : sur 61 137 places opérationnelles en prison, 58 926 détenus étaient incarcérés dans les 188 prisons françaises, soit 13 649 de moins que depuis le début du confinement. Ce qui représente une densité moyenne de 96 %. Toutefois, si le confinement a ralenti l'activité pénale, la baisse du nombre de détenus est avant tout la conséquence de la mise en place d'une circulaire sur la régulation carcérale préconisant des mesures de libération anticipée pour éviter une crise sécuritaire et sanitaire en détention. En effet, cette circulaire prévoit de limiter les entrées en prison et de favoriser les sorties : elle allège les conditions d'incarcération et le suivi des mesures de restriction de libertés prévues pour les sorties de prisons et les primo-délinquants. Dans le cadre judiciaire, il est désormais demandé un nouvel examen des peines d'emprisonnement en diffusion pour exécution. Dans ce contexte, les peines inférieures à un mois ne seront pas exécutées et celles inférieures ou égales à six mois feront l'objet d'un réexamen afin de proposer des solutions alternatives à l'incarcération. Cette nouvelle échelle des peines sera aussi effective pour les décisions d'incarcération non abouties à ce jour. Ces décisions devront être reconsidérées. Les parquets pourront ainsi s'affranchir des jugements déjà rendus par les magistrats. Outre l'allègement des peines carcérales, la circulaire amène à un relâchement sur le suivi à l'extérieur des condamnés, notamment ceux devant effectuer des travaux d'intérêt général. L'obligation de réaliser le nombre d'heures de travaux assignées est suspendue. Il est estimé qu'en moyenne, sur une peine de 105 heures, les condamnés pourront se délester de 35 heures. Il faut noter également à cet effet le manque de suivi dans le cadre des libérations sous contrainte, qui ont été massivement privilégiées pendant le confinement. Vider les prisons ne saurait être une solution à la surpopulation carcérale et il devient nécessaire de se pencher sur la question de la régulation carcérale afin d'y apporter une solution à la hauteur du problème. Aussi, il lui demande de préciser les mesures qu'entend prendre le Gouvernement pour assurer que les peines, quelle qu'en soit la nature, soient bel et bien appliquées, tout en limitant la surpopulation carcérale.

Texte de la réponse

Face à l'évolution de l'épidémie de la Covid-19, le Gouvernement a rapidement pris des mesures afin d'éviter l'entrée et la propagation du virus dans les prisons et garantir la continuité du service public pénitentiaire. L'ordonnance n° 2020-303 du 25 mars 2020, portant adaptation de règles de procédure pénale sur le fondement de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence sanitaire pour faire face à l'épidémie de la Covid-19 a ainsi facilité, pour la durée de la crise, le prononcé de mesures existantes comme la suspension de peine pour raison médicale, la libération sous contrainte sous forme de libération conditionnelle et la conversion de peine. En complément, elle a créé deux dispositifs transitoires et exceptionnels, applicables dans les conditions strictes : la réduction supplémentaire de peine liée aux circonstances exceptionnelles et l'assignation à domicile de fin de peine. Ces dispositions ne sont donc plus en vigueur depuis le 10 août 2020. La circulaire du 27 mars 2020 signée par le directeur de l'administration pénitentiaire et la directrice des affaires criminelles et des grâces, a par ailleurs suspendu l'exécution des peines de travail d'intérêt général, sauf cas particulier, pendant toute la durée de l'état d'urgence sanitaire. Cette mesure était justifiée par les risques encourus tant par le personnel des structures d'accueil que par les personnes condamnées. En effet, il était alors impossible de fournir à chacun des condamnés les équipements de protection individuels adaptés, la plupart des structures d'accueil ayant par ailleurs été fermées pendant cette période. Il s'agissait également d'appliquer l'article R.131-33 du code pénal qui dispose qu'en cas de danger immédiat pour le condamné ou pour autrui, le responsable de la structure d'accueil peut suspendre l'exécution du travail d'intérêt général en informant sans délai le juge de l'application des peines ou l'agent de probation. Cette circulaire invitait, par ailleurs, les magistrats à prévoir un délai d'exécution maximal de 18 mois pour les condamnations prononcées pendant le confinement, afin de garantir au mieux l'exécution de la peine. L'exécution des mesures de travail d'intérêt général a repris progressivement à compter de la mi-mai 2020 en respectant les mesures d'hygiène et de sécurité prévues par le Gouvernement. En outre, une circulaire du 20 mai 2020 a proposé aux procureurs de la République d'accueillir favorablement les demandes de classement des mesures de travail d'intérêt général dont le reliquat à exécuter était inférieur à 35 heures, mais uniquement dans l'hypothèse d'un bon comportement du condamné et d'une exécution sans incident d'une proportion significative du nombre d'heures. A cet égard, il convient de rappeler que la durée moyenne d'un travail d'intérêt général s'élève à 105 heures. Cette proposition avait pour objectif de faire face aux difficultés prévisibles d'exécution de la mesure dans les premières semaines de sortie de confinement et de tenir compte de la surcharge d'activité à laquelle devaient faire face les personnels judiciaires et pénitentiaires lors de la reprise. Le ministère de la justice veille tout particulièrement à ce que les peines de travail d'intérêt général prononcées par les juridictions puissent être exécutées dans les meilleurs délais et dans des conditions permettant à la personne condamnée de se réinsérer socialement et professionnellement afin de mieux lutter contre la récidive. Pour cela, 61 référents territoriaux sont déployés sur tout le territoire afin de procéder à la recherche de postes de travail d'intérêt général et à l'animation du réseau des structures d'accueil. Les méthodes de travail innovantes mises en œuvre, et notamment l'utilisation de nombreux outils numériques, ont permis aux référents territoriaux de continuer à travailler sans relâche pendant la période de confinement. L'exécution des peines de travail d'intérêt général a été maintenue durant le second confinement dans le respect des règles de sécurité sanitaire, détaillées dans la note de la direction de l'administration pénitentiaire du 6 mai 2020.