15ème législature

Question N° 316
de M. Guillaume Peltier (Les Républicains - Loir-et-Cher )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Économie et finances
Ministère attributaire > Économie et finances

Rubrique > emploi et activité

Titre > Fermeture de l'usine Carrier à Romorantin-Lanthenay

Question publiée au JO le : 08/05/2018
Réponse publiée au JO le : 16/05/2018 page : 3747

Texte de la question

M. Guillaume Peltier interroge M. le ministre de l'économie et des finances sur la fermeture de l'usine Carrier de Romorantin-Lanthenay (Loir-et-Cher), laissant 90 salariés abandonnés à leur sort alors même que l'entreprise avait déjà conduit un plan social et supprimé 50 emplois en 2013. Selon la direction de l'entreprise, cette usine ne serait pas assez compétitive par rapport à d'autres situées en Europe de l'est. La vraie raison : une course folle à « l'argent-roi » et le règne du profit immédiat au détriment de ceux qui se lèvent chaque matin pour travailler, souvent durement, et faire vivre leur famille. Dans cette usine qui fabriquait plus de 2 000 vitrines par an il y a quelques années, la direction n'a jamais véritablement investi dans de nouvelles machines pour gagner en compétitivité et s'est retrouvée avec un seul client. De plus de 300 salariés il y a une vingtaine d'années, il en reste aujourd'hui un peu moins d'une centaine. Il lui demande donc les mesures concrètes qu'il compte prendre pour lutter contre ces délocalisations qui n'osent pas dire leur nom et cette obsession de la rentabilité qui ruine les territoires. Il l'interroge également sur les mesures concrètes qu'il compte prendre pour accompagner, aider, soutenir et offrir un avenir à ces 90 salariés.

Texte de la réponse

USINE CARRIER À ROMORANTIN-LANTHENAY


M. le président. La parole est à M. Guillaume Peltier, pour exposer sa question, n°  316, relative à l'usine Carrier à Romorantin-Lanthenay.

M. Guillaume Peltier. Madame la secrétaire d'État, je voudrais, devant la représentation nationale, vous parler de la situation dramatique dans laquelle sont plongés 88 salariés de ma circonscription, à Romorantin, dans le Loir-et-Cher, et qui témoigne du déclassement industriel que connaît notre pays. Le 17 avril dernier, en effet, le comité d'entreprise de l'entreprise Carrier, qui est une filiale du conglomérat américain UTC et fabrique des vitrines réfrigérées pour la grande distribution, a décidé de manière unilatérale, sans consulter les élus locaux ni les parlementaires, de fermer l'usine de Romorantin.

Chacun s'est alors interrogé sur les raisons de cette fermeture soudaine. Était-elle due à des problèmes de rentabilité de l'usine elle-même ? Non, car le site de Romorantin dégage 1 million d'euros de bénéfices nets en 2017. Était-elle due, plus largement, à un problème de rentabilité du groupe UTC au niveau mondial ? Non, car ce groupe a réalisé 5 milliards d'euros de bénéfices nets en 2017. Était-elle due, alors, à un problème de compétence des salariés ? Non, car dans le Loir-et-Cher et dans toute la région Centre-Val-de-Loire, chacun s'accorde à reconnaître le savoir-faire et la compétence remarquables des salariés du site de Romorantin.

La véritable raison, hélas, est bien connue : c'est la course folle à l'argent roi et aux profits immédiats. Les conséquences sont dramatiques : 88 salariés perdent leur emploi, 88 familles sont plongées dans la détresse. Ils sont emplis d'une colère légitime.

Mes questions sont simples et concrètes. Premièrement, le Gouvernement est-il prêt à nous aider pour trouver un repreneur au site de Romorantin, qui est solide et sain ? Deuxièmement, que ferez-vous pour obliger le groupe Carrier à rembourser toutes les sommes qu'il a perçues au titre du CICE ? Lorsqu'une entreprise délocalise de manière aussi soudaine, sans qu'il y ait aucun fondement à cette décision, elle devrait rembourser toutes les aides qu'elle a perçues, car ces aides ont été payées par les contribuables français. Troisièmement, que comptez-vous faire pour nous permettre d'accompagner dignement la reconversion et la formation des 88 salariés de Romorantin ?

En un mot, que comptez-vous faire pour nous aider à lutter contre la financiarisation redoutablement dangereuse de l'économie, afin de rétablir le seul capitalisme qui vaille, le capitalisme populaire ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances.

Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances. Monsieur le député, vous appelez mon attention sur la fermeture de l'usine Carrier de Romorantin. Comme vous l'avez dit, la décision de fermer ce site d'ici à l'été est en effet lourde de conséquences : 88 emplois sont affectés. Elle est d'autant plus regrettable que le Gouvernement se mobilise fortement pour favoriser la compétitivité de notre industrie.

C'est pourquoi il a été demandé aux dirigeants du groupe UTC France de tout mettre en œuvre pour rechercher une solution de reprise ou de transformation du site. Plusieurs manifestations d'intérêt ont d'ores et déjà été identifiées. Soyez assuré, monsieur le député, que les services de l'État sont pleinement mobilisés : le délégué interministériel aux restructurations d'entreprises a déjà rencontré les dirigeants du groupe. Toutes les options doivent être sérieusement explorées pour préserver l'activité industrielle du site.

En outre, le Gouvernement se soucie particulièrement de la mise en place de mesures d'accompagnement favorisant un retour rapide des salariés vers l'emploi, notamment en termes de reclassement et de formation. Le groupe UTC France devra par ailleurs respecter scrupuleusement ses obligations en matière de revitalisation de ce territoire fortement éprouvé par les conséquences des mutations industrielles.

Soyez assuré, monsieur le député, que je serai particulièrement attentive à ce que tout soit mis en œuvre pour que ce projet de fermeture s'opère de la manière la plus responsable possible. Je veillerai aussi à ce que les solutions de reconversion du site soutiennent effectivement des initiatives créatrices de valeur et d'emplois.

M. le président. La parole est à M. Guillaume Peltier.

M. Guillaume Peltier. Madame la secrétaire d'État, l'entreprise Carrier et le groupe UTC ont perçu, grâce au CICE, des aides d'État. Leur décision brutale et inopportune rend nécessaire le remboursement de ces aides. C'est une demande forte, légitime et juste non seulement des élus locaux et des parlementaires, mais aussi des salariés et des représentants syndicaux. Il s'agit d'une question de justice : ces sommes doivent être remboursées et transmises aux salariés en vue de leur reclassement.

Pouvez-vous nous indiquer si vous comptez, avec fermeté, faire droit à cette demande, qui est conforme à l'idéal de justice ?

M. le président. Madame la secrétaire d'État, vous ne souhaitez pas reprendre la parole.