15ème législature

Question N° 31931
de M. José Evrard (Non inscrit - Pas-de-Calais )
Question écrite
Ministère interrogé > Justice
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > lieux de privation de liberté

Titre > Surpopulation pénitentiaire et surdélinquance

Question publiée au JO le : 25/08/2020 page : 5594
Réponse publiée au JO le : 12/01/2021 page : 331

Texte de la question

M. José Evrard interroge M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les objectifs poursuivis concernant la neutralisation de la délinquance. En faisant de l'insécurité une cause nationale, le Premier ministre est salué par la communauté nationale qui attend depuis des lustres que soient mis hors état de nuire les délinquants, criminels et multirécidivistes qui semblent désormais agir en toute impunité. Or, le message risque de rester un vœu pieux dans la mesure où l'écart s'accroît entre la délinquance en général et le manque de places en prison. Dans le contexte d'explosion des crimes et délits que la France connaît depuis plusieurs années, il n'a pas été, il n'est pas prévu de construire suffisamment de prisons pour accueillir les condamnés à la détention. C'est dans ce contexte tendu que se mettent en places de nouvelles règles pour résorber la surpopulation carcérale en cours, en un mot, d'améliorer la qualité de l'hébergement. Par un hasard bienvenu, la France vient d'être condamnée par la Cour européenne des droits de l'homme pour sa surpopulation carcérale. Le dispositif trouve un renfort pour maintenir un niveau stable de pensionnaires et promouvoir d'autres moyens, comme le bracelet électronique, pour surveiller, autant que faire se peut, les délinquants, dont les gravités des actes, et les condamnations consécutives, seront minorées pour la cause. La contrôleuse générale des prisons a précisé que la construction de prisons pourrait provoquer un appel d'air pour de nouvelles condamnations qui remettraient en cause le recul de la surpopulation carcérale par des libérations anticipées effectuées en mai 2020 au prétexte de l'épidémie de covid-19. Dans les faits, la protection des populations des crimes et délits n'est plus l'objectif de l'État mais la conservation d'un équipement pénitentiaire autour de 60 000 places. Dans ces conditions, les condamnations à la prison se feront en fonction du nombre de place dans la circonscription judiciaire. Aux procureurs de prendre connaissance des places disponibles. Le discours du Premier ministre reçoit de fait un désaveu. Pour conforter ce qui se met en place, le discours convenu est désormais de qualifier la prison d'école du crime, raison qui justifierait d'en user qu'à dose homéopathique, voire à s'en dispenser. Quant aux Français qui s'émeuvent de l'extension de la violence, il est reproché une mauvaise appréciation de l'insécurité. La sécurité des personnes et des biens est ce qui fonde l'État. Comment peut-il être envisagé de s'en abstraire, précisément au moment où les menaces sont les plus fortes, où le pays est confronté à une délinquance de masse. Il lui demande s'il n'est pas temps de mettre en place, afin de rendre crédible le discours du Premier ministre, un programme ambitieux de constructions de prisons.

Texte de la réponse

Le programme immobilier pénitentiaire, qui vise à réduire la surpopulation carcérale dans les maisons d'arrêt et à atteindre l'objectif de 80% d'encellulement individuel, permettra d'améliorer la prise en charge des détenus et les conditions de travail des personnels. 7 000 places nettes seront ainsi livrées ou très engagées en 2022, tandis que 8 000 places supplémentaires seront lancées d'ici la fin du quinquennat. La typologie des établissements sera diversifiée pour mieux adapter les régimes de détention aux profils des détenus selon leur parcours, leur peine et leur projet de réinsertion. Le programme prévoit ainsi des maisons d'arrêt sécurisées et à sureté adaptée pour les profils de détenus nécessitant un régime de détention sécurisé. Le programme comprend en outre la création de 2 000 places au sein de structures d'accompagnement vers la sortie (SAS), accueillant des condamnés à des peines de moins de deux ans ou en fin de peine orientés vers la réinsertion. Avec le projet INSERRE, il prévoit enfin l'expérimentation d'établissements tournés vers le travail afin de privilégier le retour à l'emploi en fin de peine et mieux prévenir la récidive. La majeure partie de ces établissements sera implantée dans les territoires qui connaissent les taux de surpopulation les plus importants. L'objectif de créer 7 000 places durant le quinquennat sera tenu, dans la mesure où tous les établissements de cette première phase seront livrés ou en passe de l'être en 2022. En effet, pour cette première tranche, l'acquisition du foncier a été réalisée pour 73 % des places et le choix du groupement effectué pour 87 % d'entre elles. Le programme des opérations est validé pour 82 % des places du programme et les travaux sont lancés pour 34% des places. Durant l'exercice 2020, le calendrier des opérations du programme 15 000 a dû être ajusté pour prendre en compte l'impact de l'épidémie de Covid-19. En moyenne, les opérations en phase d'études ont subi un retard très moderé d'un mois et demi, tandis que les opérations dont le chantier avait déjà débuté (Lutterbach, Bordeaux-Gradignan, Basse-Terre et la SAS de Caen) subissent un décalage de 2 mois du fait du confinement. Un retard de livraison, de quelques mois seulement, est donc à prévoir. S'agissant des 8 000 places suivantes qui doivent être lancées en 3 vagues de 5 à 6 établissements entre 2020 et 2022, pour être livrées à l'horizon 2027, les opérations sont en cours. Celles de Saint-Laurent du Maroni, Tremblay-en-France, Avignon Entraigues, Toulouse-Muret et Perpignan-Rivesaltes sont déjà engagées. Ces nouvelles constructions permettront d'augmenter la capacité carcérale de la France de 60 000 places en 2017 à 75 000 places à l'horizon 2027.