15ème législature

Question N° 321
de M. Cyrille Isaac-Sibille (Mouvement Démocrate et apparentés - Rhône )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Agriculture et alimentation
Ministère attributaire > Agriculture et alimentation

Rubrique > eau et assainissement

Titre > Protection des zones agricoles irriguées

Question publiée au JO le : 08/05/2018
Réponse publiée au JO le : 16/05/2018 page : 3769

Texte de la question

M. Cyrille Isaac-Sibille interroge M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la protection des terres agricoles irriguées pour maintenir une agriculture en zone péri-urbaine et favoriser les circuits courts. Dans son discours aux états généraux de l'alimentation du 22 octobre 2017, le Président de la République a réaffirmé en ces termes l'objectif poursuivi : accompagner le monde agricole, dans le modèle productif, énergétique et environnemental qu'il porte aujourd'hui. Une civilisation peut être appréciée par sa capacité à bien gérer collectivement sa ressource en eau. L'eau comme un marqueur de civilisation (facteur de santé, d'hygiène, de confort), a toujours constitué un élément de progrès et pris une place dans l'expression culturelle. M. le député prend pour exemple la civilisation d’Égypte antique, la civilisation de l'Indus et la civilisation de la Chine antique. La ressource en eau revêt trois volets : l'irrigation, la consommation domestique et l'étiage des rivières. En France dans les années 1980 un immense effort a été fait pour l'irrigation des terres de l'ouest lyonnais grâce à la création d'un réseau d'irrigation performant structuré autour de stations de pompage dans le Rhône qu'il serait actuellement impossible à financer (2MM). Il demeure la question du coût énergétique de ces dispositifs et de leurs difficultés d'accès pour les agriculteurs. Il lui demande de devenir une nouvelle divinité de la pluie en : facilitant la création et la gestion de retenues collinaires collectives pour les eaux hivernales ; baissant les coûts énergétique par l'application de la la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité (TICFE) aux syndicats mixtes hydrauliques agricoles organisés en association syndicale autorisée (ASA) ; et enfin en favorisant la location des terres irriguées aux agriculteurs. À l'instar des mesures prises pour favoriser la location de logements vacants et avoir recours à la fiscalité des terrains pourvus d'équipements d'irrigation, non utilisés à des fins agricoles. Afin de ne pas biaiser cette mesure il semble important de faire sortir de l'activité agricole la location de prés pour les équidés (à fort rendement financier, demandant que peu d'eau et ne produisant aucun bien agricole). Il souhaiterait donc connaître ses intentions sur ces questions.

Texte de la réponse

PROTECTION DES TERRES AGRICOLES IRRIGUÉES


M. le président. La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille, pour exposer sa question, n°  321, relative à la protection des terres agricoles irriguées.

M. Cyrille Isaac-Sibille. Monsieur le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, comment maintenir une agriculture en zone périurbaine, et même urbaine, et faciliter les circuits courts ? Comment protéger les terres agricoles irriguées ? Dans son discours devant les états généraux de l'alimentation, le 22 octobre 2017, le Président de la République a réaffirmé en ces termes l'objectif poursuivi : « accompagner le monde agricole dans le modèle productif, énergétique et environnemental qu'il porte aujourd'hui. »

Une civilisation peut être appréciée par sa capacité à bien gérer collectivement sa ressource en eau. L'eau est un marqueur de civilisation. Elle a toujours constitué un élément de progrès – pensons aux civilisations d'Égypte ou d'Extrême-Orient. La question de la ressource en eau revêt trois volets : la consommation domestique, l'étiage des rivières et l'irrigation.

Sur le territoire du Rhône, dans les années 1980, un immense effort a été accompli pour l'irrigation des terres de l'ouest lyonnais, très proches de la ville, grâce à la création d'un réseau d'irrigation performant, structuré autour de stations de pompage dans le Rhône. Ce réseau serait actuellement impossible à financer – on pourrait estimer son coût à 2 milliards.

Monsieur le ministre, peut-on réduire le coût énergétique, qui est de plus en plus important pour les agriculteurs ? Il s'agit en l'occurrence du coût en électricité pour remonter l'eau du Rhône jusque dans les collines. Il conviendrait de faire bénéficier les syndicats mixtes agricoles hydrauliques organisés en associations syndicales autorisées d'un montant minoré de la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité.

Par ailleurs, peut-on réserver la location des terres irriguées aux agriculteurs ? Il semble important de faire sortir de l'activité agricole la location des prés pour les équidés – à fort rendement financier, utilisant peu d'eau et ne produisant aucun bien agricole. Pour ceux-ci, on pourrait éventuellement, à l'instar des mesures prises pour favoriser la location des logements vacants, avoir recours à la fiscalité des terrains pourvus d'équipements d'irrigation et non utilisés à des fins agricoles.

Enfin, pourrait-on faciliter la création et la gestion de retenues collinaires collectives pour éviter une politique de Shadok consistant à faciliter l'écoulement des eaux de pluie durant les périodes humides et à pomper en période sèche, à un coût énergétique de plus en plus important pour les agriculteurs ?

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

M. Stéphane Travert, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Monsieur le député, comme vous venez de le rappeler, les enjeux liés à la ressource en eau sont particulièrement aigus pour l'agriculture. L'eau est un intrant indispensable à l'agriculture, menacé par le changement climatique. Elle en est aussi la première victime.

Vous le savez, une cellule d'expertise de l'eau a été installée le 14 novembre dernier. Sous la présidence du préfet Pierre-Étienne Bisch, elle associe le CGAAER – Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux –, le CGEDD – Conseil général de l’environnement et du développement durable –, l'APCA – Assemblée permanente des chambres d'agriculture – et FNE – France nature environnement. Cette commission doit examiner les projets de territoire en cours, proposer des pistes d'accélération de leur réalisation et d'amélioration de leur contenu, et rendre compte des enseignements de cette analyse. Le rapport de la cellule « eau » du préfet Bisch est attendu dans les tout prochains jours.

Je suis particulièrement attentif au respect des principes de travail par les membres de la cellule : une recherche de consensus, le respect des engagements, une non-instrumentalisation des informations examinées et produites au sein de la cellule, ainsi que la confidentialité.

Je suis également attentif au positionnement de la cellule et de ses travaux, dont la mission n'est pas de se substituer aux services de l'État : les responsabilités des acteurs territoriaux, en termes, notamment, de maîtrise d'ouvrage et d'autorisation restent inchangées. La réalisation de projets utiles et durables me tient particulièrement à cœur. Vous avez cité quelques exemples, notamment les projets de stockage hivernal de l'eau pour éviter les prélèvements en période sèche lorsque l'eau est rare. Je souhaite que nous avancions sur ces sujets, que nous déverrouillions les projets qui attendent depuis très longtemps et grèvent la capacité des producteurs à irriguer correctement en respectant la ressource en eau. Cela leur offrira, demain, ces points de compétitivité dont ils ont besoin pour la qualité de leurs exploitations.

Il s'agit là d'un signal fort pour le stockage de l'eau que nous souhaitons porter dans la perspective du changement climatique. Il n'en reste pas moins nécessaire de travailler à l'amélioration de la performance de l'utilisation de l'eau en agriculture – à déterminer comment bien gérer cette ressource en eau.

Enfin, ma façon de travailler étant ainsi faite, je tiens à ce qu'un dialogue constructif, permanent, sur les territoires soit maintenu. Je compte bien évidemment sur les élus, les représentants des producteurs et tous les acteurs concernés pour participer à ces échanges dans le respect des uns et des autres. Cela nous permettra d'identifier des solutions de protection de notre ressource mais aussi de développement de nos modèles agricoles sur le territoire français.

M. le président. La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille.

M. Cyrille Isaac-Sibille. Je suis particulièrement attentif à l'agriculture périurbaine. Des agriculteurs sont présents non seulement à proximité mais aussi au sein de la métropole de Lyon. Il est important de favoriser ces circuits courts.