15ème législature

Question N° 32345
de M. Mansour Kamardine (Les Républicains - Mayotte )
Question écrite
Ministère interrogé > Éducation prioritaire
Ministère attributaire > Éducation prioritaire

Rubrique > outre-mer

Titre > Éducation prioritaire à Mayotte

Question publiée au JO le : 22/09/2020 page : 6411
Réponse publiée au JO le : 05/10/2021 page : 7396

Texte de la question

M. Mansour Kamardine interroge Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de l'éducation prioritaire, sur la situation de l'éducation nationale à Mayotte. En effet, l'immense majorité des habitants de Mayotte vit sous le seuil de pauvreté ce qui entraîne que toutes des écoles de Mayotte scolarisent des enfants très majoritairement issus, selon la terminologie administrative, de classes sociales défavorisées. Il manque actuellement à Mayotte plusieurs centaines de classes dans l'enseignement primaire pour scolariser tous les enfants, alors même qu'une proportion importante des classes fonctionne actuellement en rotation, une partie des enfants étant scolarisée le matin, l'autre partie l'après-midi. De plus, le programme de construction d'école, qui est piloté à Mayotte par les services de l'État, premièrement, prend un retard considérable, deuxièmement, au fur et à mesure des retards pris, ne répond déjà plus aux besoins de rattrapage en terme de nombre de classes. C'est pourquoi il lui demande de lui indiquer ce qu'elle entend entreprendre pour que l'effectivité de l'éducation prioritaire à Mayotte ne reste pas lettre morte.

Texte de la réponse

L'académie de Mayotte compte 100 % de ses écoles et de ses collèges en éducation prioritaire (REP) et, à ce titre, elle bénéficie de moyens renforcés en considération des grandes difficultés sociodémographiques rencontrées par le territoire. Confrontée notamment à une forte pression démographique, l'académie de Mayotte a bénéficié d'une augmentation constante de ses moyens dans un contexte budgétaire contraint. Sur le programme 140 (enseignement scolaire public du 1er degré) du ministère de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports (MENJS), Mayotte a vu sa dotation en emplois d'enseignants du 1er degré augmenter de + 689 entre 2013 et 2020. La classification en éducation prioritaire emporte une série de mesures comme le dédoublement des classes de CEP et CE1. En 2020, la quasi-totalité des classes de CP et de CE1 sont dédoublées. Elles possèdent deux organisations pédagogiques possibles : le co-enseignement ou l'enseignement dit « en solo ». Le nombre de classes de CP est de 506 et se répartissent de la manière suivante : 256 CP en co-enseignement et 250 en solo. Par ailleurs, l'académie possède 503 classes de CE1 qui se répartissent ainsi 321 en duo et 182 en solo. Le classement en éducation prioritaire implique également une politique de gestion des ressources humaines orientée vers l'attractivité de l'académie. Ainsi, les personnels enseignants affectés en éducation prioritaire bénéficient d'une formation renforcée afin de favoriser leur adaptation aux spécificités du territoire. Une action de formation a été menée dans le cadre du plan national de formation depuis 2017 pour les académies de Mayotte et Guyane (formation dite « Maguy ») autour d'un axe essentiel : le plurilinguisme. Il s'agit à travers cette formation nationale de soulever des questions propres à ces deux académies et de leur permettre de créer un réseau de professionnels pour échanger sur des difficultés similaires. Depuis 2018, les formateurs issus du dispositif Maguy continuent de dispenser une formation liée à l'éducation prioritaire sous l'égide du comité de pilotage académique en direction des nouveaux arrivants. Le constat d'un décalage entre la programmation des ouvertures de classe et leur livraison relève d'une problématique différente de celle de l'éducation prioritaire qui assurément ne peut être déployée de manière satisfaisante sans une capacité d'accueil suffisante. À cet égard, le « plan de développement de Mayotte pour améliorer le quotidien des mahorais » présenté en 2018, prévoit un engagement de l'État de 500 M€ d'investissement dans les constructions scolaires du 1er et du 2nd degrés, soit le double du montant décidé pour la période 2012-2017. Par ailleurs, le contrat de convergence et de transformation (CCT), signé le 8 juillet 2019, prévoit, pour le 1er degré, la livraison d'ici 2022, de 232 classes afin de réduire le taux de rotation dans les communes où la situation est la plus tendue, et améliorer ainsi le taux de scolarisation des élèves dès 3 ans. La rénovation de 537 classes existantes y est également inscrite. Dans un contexte marqué par une forte pression démographique (la progression des effectifs scolaires entre 2017 et 2027 sera de l'ordre de 12 300 élèves (+ 23 %) générant un besoin de constructions à 10 ans de 857 classes nouvelles et à la rénovation de 1 000 classes existantes pour le 1er degré), les écarts entre la programmation des constructions et les ouvertures de classes ne peuvent être résorbés qu'à moyen terme. Le ministre chargé de l'éducation nationale rappelle que l'article L. 2121-30 du code général des collectivités territoriales (CGCT) dispose que « le conseil municipal décide de la création et de l'implantation des écoles, des classes élémentaires d'enseignement public après avis du représentant de l'État dans le département ». Il résulte de cette disposition que la maîtrise d'ouvrage pour la construction des écoles appartient bien aux communes, lesquelles peuvent bénéficier de l'assistance des services de l'État sans que leur compétence en matière de constructions scolaires du 1er degré soit remise en cause. Tel est le cas à Mayotte où la direction de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DEAL) placée sous l'autorité du préfet du département, apporte son expertise aux communes dans le cadre de l'assistance à la maîtrise d'ouvrage pour les constructions scolaires du 1er degré. Il peut être précisé par ailleurs que le financement des constructions scolaires du 1er degré à Mayotte est imputé sur le programme 123 du ministère des Outre-mer (conditions de vie en Outre-mer), tandis que la programmation financière relève de la DEAL et des services de la préfecture. Le MENJS intervient uniquement dans le cadre de l'évaluation du besoin scolaire exprimé, notamment par la prévision des effectifs d'élèves à scolariser. Le recteur de l'académie de Mayotte fait le constat d'un écart entre la programmation des ouvertures de classe dans le 1er degré et la livraison : pour 286 salles neuves programmées au cours de la période 2014-2018, 67 ont été livrées soit un taux de réalisation de 23 %. Niveau de réalisation physique de la programmation du premier degré :

2014

2015

2016

2017

2018

total

2019

2020

2021

2022

2023

2024

2025

total

Programmation

Salles neuves

28

83

6

135

34

286

129

73

88

54

21

105

49

519

Salles rénovées

210

65

113

187

156

731

142

52

Réfectoire

11

6

2

11

8

38

17

10

Livraison

Salles neuves

4

30

33

67

46

28

Salles rénovées

25

37

118

101

99

380

Réfectoires

2

8

1

11

Source : direction de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DEAL), Mayotte avril 2019 (corrigé en 2020).
L'effort engagé par l'État sera poursuivi aux côtés des communes lesquelles peuvent être assurées de l'engagement indéfectible de l'État dont les capacités opérationnelles nécessitent un renforcement, afin de relever le défi de l'instruction obligatoire de tous les enfants mahorais dès l'âge de 3 ans comme le prévoit la loi du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance. Le recteur de l'académie de Mayotte se tient prêt à apporter son soutien en matière de programmation immobilière du premier degré, dans le respect des compétences de chacun, en apportant aux maires une aide méthodologique et une analyse pédagogique et technique. Enfin et dans le prolongement des travaux de réflexion engagés au niveau national sur la carte de l'éducation prioritaire, le MENJS souhaite par ailleurs lancer un groupe de travail spécifique aux départements d'Outre-mer afin d'aller vers davantage de différenciation et trouver des solutions plus adaptées à la réalité de chacun de ces territoires.