15ème législature

Question N° 32398
de M. Loïc Prud'homme (La France insoumise - Gironde )
Question écrite
Ministère interrogé > Transition écologique
Ministère attributaire > Transition écologique

Rubrique > produits dangereux

Titre > Pesticides perturbateurs endocriniens dans l'air

Question publiée au JO le : 22/09/2020 page : 6453
Réponse publiée au JO le : 03/11/2020 page : 7855

Texte de la question

M. Loïc Prud'homme attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique sur la présence de perturbateurs endocriniens (PE) « suspectés » dans l'air en Nouvelle-Aquitaine. Le rapport ATMO publié en juillet 2020 sur des données de 2019, atteste de la présence de cyazofamid, cymoxanil, cyprodinil, folpel ou pyrimethanil dans des centres-villes (Poitiers, Bordeaux et Limoges), dans des stations de relevés en zones périurbaines (Parempuyre en Gironde) et rurales (Montoy en Charente-Maritime, Cognaçais en Charente, Médoc en Gironde, Saint-Yrieix-la-Perche en Haute-Vienne, Grands Lacs dans les Landes). Ces 5 substances actives doivent renouveler leur demande d'autorisation de mise sur le marché (AMM) lors du prochain comité permanent des végétaux, des animaux, des denrées alimentaires et de l'alimentation animale (Scopaff). Lors de ce comité, les États membres de l'Union européenne doivent voter pour autoriser ou non les renouvellements des AMM et le vote de chaque État est tenu secret. L'avis de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) du 19 juillet 2016 relatif à « la définition de critères scientifiques définissant les perturbateurs endocriniens » recommande de distinguer les PE en trois catégories : PE « avérés », PE « présumés » et PE « suspectés », comme cela figure dans la stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens (SNPE) et comme cela a été proposé dans l'option 3 de la proposition de définition des PE par la Commission européenne. En cela, l'avis de l'Anses est plus protecteur pour la population que la notion de PE telle que celle finalement reconnue par l'Union européenne en 2017, qui ne prend en compte que les PE « avérés ». Il lui demande donc si elle envisage que la France soit cohérente avec l'avis de l'ANSES de 2016 et ne vote pas le renouvellement des AMM des PE « suspectés », en accord avec le principe de précaution. Il lui demande également si la France compte plaider pour que ces décisions de renouvellement d'AMM soient prises de manières moins obscures et si la France peut demander que les scrutins soient publics.

Texte de la réponse

La France porte des positions ambitieuses sur le sujet du renouvellement des approbations européennes de substances actives suspectées de répondre aux critères de perturbation endocrinienne (PE), eu égard aux impacts sanitaires et environnementaux majeurs des perturbateurs endocriniens. La deuxième stratégie sur les perturbateurs endocriniens (SNPE2) (https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/perturbateurs-endocriniens-gouvernement-presente-deuxieme-strategie-nationale-afin-reduire) a été publiée le 3 septembre 2019. Elle comporte des mesures qui visent à réduire au maximum l'exposition des populations et de l'environnement aux substances ayant des propriétés de perturbateurs endocriniens. En ce qui concerne les critères d'identification des perturbateurs endocriniens définis au titre des législations sur les produits phytopharmaceutiques et les produits biocides, qui ont été adoptés en 2017 et sont entrés en application en octobre 2018, la France est soucieuse qu'ils soient appliqués rapidement pour permettre le retrait du marché des pesticides perturbateurs endocriniens. La France a fait des propositions opérationnelles en ce sens, notamment celle de procéder au réexamen anticipé de toutes les substances des catégories I et II de l'option 3 de l'étude d'impact de la Commission européenne. La France a également incité la Commission à vérifier le caractère PE des substances qui n'ont pas été identifiées par l'étude d'impact au titre des catégories I ou II, mais qui, sur la base d'informations plus complètes ou plus récentes, présenteraient des indices tangibles de caractère PE. Elle est également attentive à la réévaluation des pesticides pour lesquels l'EFSA a mis en évidence des propriétés de perturbation thyroïdienne et qui sont identifiées dans l'EAT 2 (Etude alimentation totale 2) de l'Anses. Cependant, la Commission n'a pas partagé la position des autorités française, et souhaite limiter les réexamens anticipés aux substances de la catégorie I. Pour les autres substances déjà approuvées, la Commission souhaite en rester à l'évaluation du caractère PE lors de la demande de renouvellement et n'a pas l'intention de procéder à une ré-évaluation anticipée. Elle considère que ce réexamen aurait un caractère disproportionné au regard du grand nombre de substances concernées et du nombre de substances dont on peut attendre qu'ils répondent aux critères d'identification. Pour les dossiers en cours d'examen, qui avaient été soumis avant l'entrée en application des critères, la réglementation prévoit que les demandeurs puissent bénéficier d'un délai maximal de 30 mois, fixé au cas par cas par l'EFSA, pour fournir les données permettant de statuer sur le caractère PE, sauf si le renouvellement de l'approbation est refusé pour d'autres raisons. La Commission a rappelé cependant que les règlements sur les produits phytopharmaceutiques et biocides permettent aux États membres de demander le réexamen anticipé des substances actives spécifiques avec les éléments de preuve complémentaires. Nos ministères ont saisi l'Anses pour identifier les substances qui peuvent être considérées comme les plus préoccupantes pour la santé et l'environnement, et transmettra les éléments pertinents à la Commission pour que les conséquences soient tirées au niveau européen. Concernant les dangers que présentent les substances actives Cyazofamid, Cymoxanil, Cyprodinil, Folpet, et Pyrimethanil, la France sera attentive aux conclusions de la réévaluation de ces substances compte-tenu des échéances de l'approbation de ces substances. Elle s'oppose systématiquement aux reports d'approbation dès lors que les substances actives sont fortement suspectées de répondre aux critères d'exclusion et elle a fait valoir cette position dans le cadre de la procédure REFIT du règlement 1107/2009. Enfin, la France continuera à intervenir auprès de la Commission européenne afin que l'ensemble des réglementations pertinentes, prennent en compte la spécificité des perturbateurs endocriniens. Les ministères ont été très mobilisés et la France a fortement contribué à améliorer l'ambition des conclusions adoptées par les Etats membres sur les perturbateurs endocriniens, dans le sens d'une meilleure protection de la santé et de l'environnement. La France souhaite notamment que les dangers et les risques liés aux perturbateurs endocriniens soient gérés de la même façon que ceux liés aux CMR (cancérigène, mutagène, reprotoxique) afin d'atteindre un niveau de protection maximale et prendre les mesures de prévention ou précaution qui s'imposent.