Enjeux des industries électro-intensives
Question de :
Mme Émilie Bonnivard
Savoie (3e circonscription) - Les Républicains
Mme Émilie Bonnivard appelle l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances au sujet des enjeux des industries hyper électro-intensives implantées sur les territoires. Ceux-ci concernent d'une part la durée des contrats d'électricité, qui devraient être en moyenne de 15 ans et non de 5 ans comme c'est le cas actuellement pour l'essentiel, afin de favoriser les investissements productifs indispensables au secteur, et d'autre part le coût du MW/h, qui devrait se situer entre 20 et 30 euros maximum, s'il s'agit de permettre aux industries d'être compétitives par rapport à un marché mondial particulièrement concurrentiel. Si « la boîte à outils » votée en 2016 a permis d'atténuer à court terme les effets de la fin des tarifs régulés et des contrats historiques, certaines mesures emblématiques, qui ont permis de réduire le coût du MW/h, restent encore incertaines au regard des exigences de la direction générale concurrence de la Commission européenne (interruptibilité et rabais du tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité), et ne donnent pas suffisamment de visibilité aux industries (appels d'offres annuels sur l'interruptibilité et contrats de trop court terme). Aussi, elle souhaiterait connaître les actions qu'il entend porter afin de donner aux industries hyper électro-intensives les moyens de rester compétitives au niveau international, de par la durée des contrats d'énergie, la lisibilité et la compétitivité du coût de l'énergie.
Réponse publiée le 16 janvier 2018
Le prix de l'électricité et ainsi que sa prévisibilité, sont des enjeux majeurs pour la compétitivité des industries électro-intensives. Le prix de l'électricité en France est l'un des plus compétitifs de l'Union européenne. Pour autant, les entreprises électro-intensives sont souvent exposées à la concurrence internationale, qui bénéficie parfois de prix de l'électricité plus compétitifs, notamment en Amérique du Nord, où du fait d'un gaz moins cher, et aussi, dans certaines régions, d'une hydroélectricité localement très abondante, l'électricité est sensiblement moins chère que la moyenne européenne. Différents mécanismes sont mis en œuvre pour permettre aux entreprises françaises, et en particulier les entreprises électro-intensives, de continuer à bénéficier de prix de l'électricité compétitifs. Ainsi, les entreprises électro-intensives bénéficient d'un niveau de taxe réduit sur leur consommation d'électricité. Le principe de ces exonérations a été maintenu, et renforcé, dans le cadre de la réforme de fin 2015. Les entreprises peuvent bénéficier de taux réduit de la Contribution au Service Public de l'Electricité (CSPE), en fonction du niveau de leur électro-intensivité et de leur exposition à la concurrence internationale. Elles bénéficient d'un taux de CSPE compris entre 7,5 et 0,5 € par mégawattheure. Enfin, un dispositif de « compensation carbone » a été mis en place, comme le permet la réglementation européenne, afin de compenser le coût du CO2 répercuté dans les prix de marché de l'électricité. Il vise les entreprises exposées à un risque important de « fuite de carbone » au titre des coûts indirects, c'est-à-dire celles pour lesquelles l'impact du prix des quotas européens de carbone répercuté dans les prix de l'électricité est fort, les exposant à la concurrence d'entreprises situées en dehors de l'Union européenne. Par ailleurs, l'accès Régulé à l'Electricité Nucléaire Historique, en place depuis 2011, permet à l'ensemble des consommateurs, y compris les consommateurs électro-intensifs, de bénéficier de la compétitivité du parc nucléaire historique lorsque les prix de marché de l'électricité sont élevés. Ces dispositifs ont tous fait l'objet d'une approbation par la Commission européenne, ce qui donne de la visibilité et de la sécurité juridique aux consommateurs électro-intensifs. Par ailleurs, les industries grandes consommatrices d'électricité ont souvent la faculté d'interrompre et de reporter leur consommation, ce qui peut être particulièrement utile pour l'équilibrage du réseau électrique. Plusieurs dispositifs permettent de valoriser ces services au réseau. Ainsi, le dispositif d'interruptibilité, mis en place depuis 2013, vise à valoriser la possibilité qu'ont certains sites à interrompre très rapidement leur consommation, avec un préavis très court. Cette capacité d'interruption est particulièrement utile lorsque le fonctionnement normal du réseau public de transport est menacé de manière grave et immédiate. Les entreprises sélectionnées s'engagent à interrompre leur consommation, en cas de sollicitation par RTE, en un temps très court (entre 5 et 30 secondes). Plus généralement, différents dispositifs ont été développés pour permettre aux industriels dont la consommation est flexible de valoriser leur flexibilité, qui contribue à l'équilibre du système électrique. Les industriels peuvent ainsi réduire leur facture parfois de plusieurs euros par MWh. Il s'agit par exemple de la valorisation directe des effacements sur le marché de l'électricité ou sur le marché d'ajustement, ou encore de la possibilité désormais ouverte aux capacités d'effacement de contribuer aux réserves pour les réglages en fréquence et en tension mises en place par Réseau de Transport d'Électricité (RTE). En complément, le Gouvernement a lancé pour 2018 un appel d'offre visant à développer davantage les capacités d'effacement en France. Enfin, les industries qui présentent un profil de consommation utile au système électrique (par exemple si ce profil est plat ou anticyclique) peuvent bénéficier d'une réduction des tarifs de transport. Cette réduction peut atteindre jusqu'à 90% pour les sites les plus électro-intensifs. Pour bénéficier de cette réduction, l'entreprise doit mettre en œuvre une politique de performance énergétique, qui est contrôlée par l'État. Au-delà de ces dispositifs, les consommateurs industriels souhaitent disposer de visibilité sur le prix de leur approvisionnement en électricité sur plusieurs années, en particulier via des contrats de long-terme. Rien n'interdit actuellement la conclusion de tels contrats de droit privé, portant sur des périodes supérieures à 5 ans. Afin de permettre un cadre davantage favorable à la conclusion de contrats de long-terme, les autorités françaises défendent, dans le cadre de la révision du règlement européen portant sur le fonctionnement du marché de l'électricité, l'adoption de mesures favorisant la conclusion de tels contrats.
Auteur : Mme Émilie Bonnivard
Type de question : Question écrite
Rubrique : Énergie et carburants
Ministère interrogé : Économie et finances
Ministère répondant : Transition écologique et solidaire
Dates :
Question publiée le 28 novembre 2017
Réponse publiée le 16 janvier 2018