Rubrique > enseignement supérieur
Titre > Statut et conditions de recrutement des vacataires dans l'enseignement supérieur
M. Matthieu Orphelin attire l'attention de Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation sur le statut et les conditions de recrutement des vacataires dans l'enseignement supérieur français, après avoir été alerté par des enseignants et des formateurs. À l'heure actuelle et en l'état du droit positif, les universités françaises peuvent notamment recruter des vacataires soit sous le statut de chargé d'enseignement vacataire (CEV) qui exercent une activité professionnelle principale, soit sous le statut d'agent temporaire vacataire (ATV) qui sont inscrits en vue de la préparation d'un diplôme du 3e cycle de l'enseignement supérieur. Les universités françaises ont recours massivement au service des enseignants vacataires. Cette situation est parfois contrainte, en raison des gels de postes substantiels dans les différentes composantes des universités, du sous-encadrement structurel des étudiantes et des étudiants dans l'enseignement supérieur public (qui découle des gels de postes précités) ou encore de l'obligation dans certaines formations universitaires de faire appel, en vertu de dispositions législatives ou réglementaires du code de l'éducation, à des intervenants professionnels extérieurs, comme dans les licences professionnelles. Mais cette situation est aussi une chance, en raison notamment de la souplesse apportée par ces interventions ponctuelles, ou encore en raison de la richesse que peuvent apporter les enseignants vacataires et notamment les CEV, que ce soit en termes d'expériences professionnelles ou de compétences, qui peuvent être complémentaires des enseignements théoriques plus traditionnels. Cependant, un constat semble largement partagé parmi les personnels enseignants et administratifs (BIATSS) des universités : la lourdeur de leur recrutement et l'insécurité juridique découlant de pratiques contra legem en raison d'interprétations divergentes des articles 2 et 3 du décret n° 87-889 du 29 octobre 1987. En effet, l'article 2 prévoit que les CEV doivent avoir une activité principale consistant soit en la « direction d'une d'entreprise » (premier tiret), soit en « une activité non salariée à condition d'être assujetties à la contribution économique territoriale ou de justifier qu'elles [les personnalités] ont retiré de l'exercice de leur profession des moyens d'existence réguliers depuis au moins trois ans » (troisième tiret). Le problème de cet article est que la direction d'une entreprise est une notion générique et vaste qui devrait englober celle d'une activité non salariée. Or, dans les faits, quid d'un entrepreneur sous forme de société qui vivrait de ses revenus depuis plus de 3 ans et modifierait son statut pour devenir micro-entrepreneur, par exemple ? Devrait-il ne plus pouvoir exercer son activité de vacataire, alors qu'il est toujours dirigeant (non salarié) d'une entreprise et qu'il en tire depuis plusieurs années des revenus réguliers ? Il semble, en outre, que la notion de « moyens d'existence réguliers » peut être sujette à interprétation variable selon les composantes au sein d'une même université, ou entre universités, ce qui est une rupture d'égalité regrettable. Également, lorsqu'une personne cumule plusieurs conditions pour assurer des vacations (par exemple, un fonctionnaire exerçant une activité accessoire libérale, ou bien un salarié ayant un contrat de droit privé qui serait aussi doctorant), sur quel fondement juridique doit-elle postuler ? Les conditions se cumulent-elles et pourraient-elles empêcher un tel recrutement ? Il existe ainsi dans cet article 2, mais aussi dans l'article 3, des ambiguïtés sources d'insécurité juridique. Ainsi, l'article 3 du même décret dispose que « les agents temporaires vacataires doivent être inscrits en vue de la préparation d'un diplôme du troisième cycle de l'enseignement supérieur. Les personnes, âgées de moins de soixante-sept ans, bénéficiant d'une pension de retraite, d'une allocation de préretraite ou d'un congé de fin d'activité, à la condition d'avoir exercé au moment de la cessation de leurs fonctions une activité professionnelle principale extérieure à l'établissement, peuvent être recrutées en qualité d'agents temporaires vacataires dans les disciplines dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé de l'enseignement supérieur et lorsqu'elles n'assurent que des vacations occasionnelles dans toutes les disciplines. » Pour faire écho aux développements précédents, cet article pourrait-il faire obstacle à ce qu'une personne retraitée âgée de soixante-huit ans (condition de l'alinéa 2 non remplie) mais préparant un doctorat (condition de l'alinéa 1er remplie) ne puisse être recrutée comme ATV ? De plus, la condition exigeant que la personne doive avoir exercé une activité professionnelle principale extérieure à l'établissement ne semble pas comprise par les personnels enseignants qui recrutent des vacataires. Quelle est la ratio legis de cette disposition réglementaire ? Enfin, pour sécuriser le cadre juridique applicable au statut des vacataires, ne serait-il pas pertinent de légiférer pour clarifier et simplifier les conditions de recrutement des vacataires ? Cela permettrait de sortir du cadre réglementaire actuel, d'éviter des éventuelles interprétations divergentes de la part d'universités ou in fine du juge administratif en cas de contentieux et de minimiser le risque de requalification du contrat du vacataire devant les tribunaux administratifs (même si ces hypothèses restent très marginales). Parce qu'il est essentiel que les enseignants et personnels BIATSS des universités ne perdent pas leur énergie en raison d'un cadre juridique inutilement contraignant, parce que le recrutement de certains vacataires est parfois compliqué et chronophage en raison de la technicité et de la rareté des profils recherchés, et afin que les personnels de l'université puissent mener dans des conditions correctes leurs missions fondamentales de service public, il souhaiterait connaître les précisions relatives à la portée des dispositions susmentionnées du décret de 1987 et, le cas échéant, quels sont les projets du Gouvernement pour sécuriser juridiquement le recrutement des vacataires dans l'enseignement supérieur.