Question au Gouvernement n° 3255 :
Projet de loi bioéthique

15e Législature

Question de : Mme Agnès Firmin Le Bodo
Seine-Maritime (7e circonscription) - Agir ensemble

Question posée en séance, et publiée le 29 juillet 2020


PROJET DE LOI BIOÉTHIQUE

M. le président. La parole est à Mme Agnès Firmin Le Bodo.

Mme Agnès Firmin Le Bodo. Monsieur le Premier ministre, après une consultation menée par le CCNE – le Comité consultatif national d'éthique –, un rapport de l'OPECST – l'office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques –, une mission d’information conduite par Xavier Breton et Jean-Louis Touraine, et un avis rendu par le Conseil d’État, le projet de loi relatif à la bioéthique a fait son entrée à l’Assemblée nationale en août 2019. Depuis, plus de 200 heures de travaux ont été menées, notamment dans le cadre de la commission spéciale que j’ai l’honneur de présider.

« Science sans conscience n’est que ruine de l’âme », disait Rabelais. Mais science, conscience, éthique, l’articulation est difficile, l’équilibre précaire, car tout cela est terriblement humain, redoutablement humain. Les lois Bioéthique, dites à la française, ont cette fonction ; nous devons faire preuve de sagesse, ce qui nécessite de savoir ce que la science peut et ce que nous, humains, pouvons accepter… Vaste ambition. Ces lois sont structurées par trois grands principes : la dignité, la solidarité et la liberté.

Vaste ambition, disais-je, que nous avons collectivement partagée, avec humilité et force travail, et qui a abouti en première lecture à un texte à mon sens équilibré, juste et adapté aux besoins actuels des Françaises et des Français. Je tiens d’ailleurs à remercier l’ensemble de mes collègues qui ont permis ce travail passionnant, souvent passionné mais toujours dans le respect des idées des uns et des autres. Nous avons eu de beaux débats : je retiendrai notamment nos échanges sur la PMA post mortem qui resteront comme un moment important dans mon expérience parlementaire. Ce projet de loi Bioéthique a bel et bien un objet multiple puisque se manifestent des inquiétudes liées aux progrès en génétique, au développement dans le domaine de l’intelligence artificielle et du champ des neurosciences, mais aussi des préoccupations au regard des aspirations sociétales devant l’accès à la PMA pour les couples de femmes et les femmes seules, et qu'il s’agit également d’accompagner la solidarité dans le cadre du don d’organes, de tissus et de cellules.

Le possible – ce que la science permet – n’est pas le probable – ce que l’humain peut accepter – et encore moins le réalisé – ce que la loi autorise. Dès lors, monsieur le Premier ministre, alors que débute l'examen en deuxième lecture du projet de loi Bioéthique, pouvez-vous nous donner votre position et celle du Gouvernement sur ce texte ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM ainsi que sur quelques bancs des groupes MODEM et Agir ens. – « Ah ! » sur les bancs du groupe LR.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Jean Castex, Premier ministre. Je vous remercie beaucoup de me donner l'occasion de m'exprimer, pour la première fois (Protestations sur de nombreux bancs du groupe LR) sur ce sujet majeur.

M. Maxime Minot. Vous auriez pu le faire la semaine dernière !

M. le président. On se calme, mes chers collègues.

M. Jean Castex, Premier ministre. Je voudrais rendre hommage à votre assemblée et à la majorité parlementaire pour la richesse et la qualité du texte qu'elle a voté à l'issue de la première lecture, en octobre dernier. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) Je tiens à le faire d'abord en raison du travail de concertation particulièrement dense qui a été mené, et le sujet le mérite, faisant suite à six mois de travaux et d'échanges avec le Conseil national d'éthique,…

M. Pierre Cordier. C'est dur d'avaler son chapeau !

M. Jean Castex, Premier ministre . …ensuite et surtout pour le caractère très approfondi et très fécond des discussions en commission et sur tous les bancs dans cet hémicycle.

M. Éric Diard. Il a besoin d'une fiche pour dire ça !

Un député du groupe LR . On veut une réponse !

M. Jean Castex, Premier ministre. Sur le fond (« Ah ! » sur de nombreux bancs du groupe LR), à l'initiative du gouvernement dirigé par mon prédécesseur et dans le cadre des engagements pris devant la nation par le Président de la République,…

M. Pierre Cordier. Il n'en a rien dit !

M. Jean Castex, Premier ministre . …on a abouti à un texte représentant une avancée considérable pour les familles, pour les patients et pour la recherche. Il s'agit bien sûr, vous l'avez rappelé, des dispositions relatives à la PMA et à ses conséquences sur le droit à la filiation et à l'accès aux origines.

M. Pierre Cordier. Vous disiez le contraire il y a un mois ! Parlez avec le cœur !

M. Jean Castex, Premier ministre. Derrière tout cela, il y a parfois des drames mais aussi beaucoup d'espoirs, autant de situations humaines que nous allons alléger sinon régler. Et nous pouvons tous en être fiers. Comme nous pouvons être fiers des autres dispositions qui vont permettre d'importants progrès en matière de recherche scientifique, de dons d'organe et de thérapies ; je pense également aux avancées en matière d'éthique et d'encadrement de certaines pratiques (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LR)…

M. Raphaël Schellenberger. Ce n'est pas un encadrement mais une ultralibéralisation !

M. Jean Castex, Premier ministre . …dont le traitement de données issues de l'intelligence artificielle pour les actes de soins.

Oui, mesdames, messieurs les députés, je parle d'avancées très significatives et d'un équilibre qui a su être trouvé, sans drame (Exclamations sur les bancs du groupe LR), sur des sujets dont je n'ignore pas la grande sensibilité, qui font miroir aux évolutions de notre société et interpellent le plus profond de nos consciences.

M. Raphaël Schellenberger. Zéro respect pour le vivant !

M. Jean Castex, Premier ministre. Le Gouvernement demande solennellement à l'Assemblée de préserver l'équilibre issu du vote en première lecture. (Applaudissements sur les bancs du groupe Agir ens et sur quelques bancs du groupe LaREM.) Et c'est bien d'ailleurs parce que la volonté du Gouvernement est de ne pas compromettre cet équilibre par l'adoption de nouvelles dispositions autres que mineures qu'il a choisi de vous le soumettre en fin de session extraordinaire. (Vives exclamations sur les bancs du groupe LR.)

M. Thibault Bazin. Allez-vous combattre la GPA ?

M. Jean Castex, Premier ministre. La GPA demeure notre ligne rouge ! (Mêmes mouvements.) D'autres sujets viendront légitimement en débat, telle la réservation des ovocytes pour le partenaire, la PMA postmoderne (Rires et exclamations sur les bancs du groupe LR)…

M. Pierre Cordier. Le Premier ministre ne sait pas lire !

M. Jean Castex, Premier ministre . …ou encore le diagnostic préimplantatoire des aneuploïdies ou les tests génétiques en population générale : ils ne recueilleront pas plus qu'avant l'approbation du Gouvernement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Agir ens et sur quelques bancs du groupe LaREM. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

M. le président. Un peu de silence ! Monsieur Minot, premier avertissement !

Plusieurs députés du groupe LR . Mais sa réponse n'est pas sérieuse, monsieur le président !

M. Jean Castex, Premier ministre. Ce projet de loi, dans la version équilibrée correspondant parfaitement à la pensée du Président de la République et de moi-même, va constituer une avancée majeure. Et je suis persuadé que votre assemblée, sur de nombreux bancs, en a parfaitement conscience. (Applaudissements sur les bancs du groupe Agir ens et sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.)

M. Philippe Gosselin. Ce n'est pas du niveau d'un premier ministre !

M. le président. Je vais vous demander un peu de silence pour écouter tant les questions des collègues que les réponses du Gouvernement.

Données clés

Auteur : Mme Agnès Firmin Le Bodo

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Bioéthique

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 29 juillet 2020

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