Calvaire des populations kurdes en Syrie
Question de :
M. Jean-Christophe Lagarde
Seine-Saint-Denis (5e circonscription) - UDI et Indépendants
M. Jean-Christophe Lagarde alerte M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur le calvaire des populations kurdes présentes dans les territoires kurdes syriens occupés par la Turquie. En effet, selon un rapport des Nations unies, les supplétifs syriens de l'armée turque, djihadistes recrutés, organisés et rémunérés par les autorités turques, font régner la terreur au sein de ces territoires. Ainsi, ils font subir aux populations locales des actes ignobles et barbares à l'instar de meurtres, de viols, de déplacements forcés, d'expropriations, de rackets et de destructions du patrimoine. Dans les faits, ces territoires kurdes font l'objet d'une annexion rampante par la Turquie, qui y a installé ses propres réseaux de communication, ses postes, de même que des départements de théologie islamique et des universités turques. Il faut préciser de surcroît que la livre turque est dans la pratique devenue la monnaie locale. Par ces nettoyages ethniques systématiques et par sa politique de terreur, la Turquie cherche, en réalité, à vider lesdits territoires de leur population kurde et à en modifier la démographie, pour qu'ils deviennent ainsi progressivement des fiefs djihadistes où le régime turc puise ses mercenaires afin de les envoyer se battre en Libye. La France et l'Union européenne ne peuvent pas rester dans le silence et doivent condamner ces crimes. De même, le conseil de sécurité de l'ONU doit être saisi afin que ces crimes cessent et que les troupes turques se retirent des territoires occupés. Alors que les Kurdes comptent sur leurs alliés, il lui demande les mesures qui seront prises par la France dans le concert des nations et dans les institutions internationales pour que ces crimes cessent définitivement.
Réponse publiée le 16 février 2021
Dans son dernier rapport, la commission d'enquête internationale sur la Syrie a alerté sur la gravité des violations du droit international humanitaire commises dans les régions d'Afrine et de Ras el-Aïn et imputées aux groupes supplétifs pro-turcs. Ces actes pourraient être constitutifs de crimes de guerre. Ce rapport fait état notamment de violations graves ciblant les communautés kurdes et yézidies. Les forces armées turques sont présentes dans ces régions depuis les opérations unilatérales de janvier 2018 et d'octobre 2019. La France a condamné ces violations, comme les opérations turques dans le nord-est syrien. Au conseil des droits de l'Homme des Nations unies, la France a salué ce rapport de la commission d'enquête et marqué la profonde inquiétude que suscitent ses conclusions quant aux agissements des groupes de supplétifs syriens pro-turcs. Les allégations de déplacements forcés de population à des fins d'ingénierie démographique sont particulièrement inquiétantes. La Turquie doit pleinement respecter, et faire respecter aux groupes sous son contrôle, le droit international humanitaire. La France est fermement engagée dans la lutte contre l'impunité des crimes commis par tous les acteurs du conflit syrien. C'est une question de justice, et c'est la condition d'une paix durable. À cet égard, elle soutient les travaux de la commission d'enquête internationale sur la Syrie, établie par le conseil des droits de l'Homme, et ceux du Mécanisme d'enquête international, impartial et indépendant, dont les travaux de collecte de preuves sont indispensables pour préparer de futures poursuites contre les responsables des crimes les plus graves. Les juridictions nationales y contribuent également. Le recrutement par la Turquie de mercenaires syriens envoyés pour combattre sur d'autres théâtres de guerre représente un autre motif de grave préoccupation. Le ministre de l'Europe et des affaires étrangères s'est exprimé plusieurs fois à ce sujet, en particulier sur les conséquences d'une « syrianisation » du conflit libyen, qui a également touché le Haut-Karabagh. Ces recrutements sont inacceptables et ne font qu'alimenter la poursuite et l'internationalisation de ces conflits. Ils modifient la nature de ces conflits et rendent ainsi leur résolution plus complexe. La France a été la première à dénoncer, avec la plus grande fermeté, les risques sécuritaires de long terme que de tels agissements comportent, et à y sensibiliser ses principaux partenaires, notamment européens. Le chaos syrien et l'internationalisation de ce conflit appellent une action résolue en faveur d'un cessez-le-feu national et d'un processus politique crédible, conforme à la résolution 2254 du Conseil de sécurité. La France est pleinement engagée en faveur d'une solution juste et durable à ce conflit, qui protège les droits des Syriens issus des minorités et qui veille à ce que les auteurs des crimes les plus graves ne restent pas impunis.
Auteur : M. Jean-Christophe Lagarde
Type de question : Question écrite
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères
Ministère répondant : Europe et affaires étrangères
Dates :
Question publiée le 29 septembre 2020
Réponse publiée le 16 février 2021