15ème législature

Question N° 32890
de M. Vincent Descoeur (Les Républicains - Cantal )
Question écrite
Ministère interrogé > Transition écologique
Ministère attributaire > Transition écologique

Rubrique > cours d'eau, étangs et lacs

Titre > Conséquences du décret n°2020-828 - police de l'eau

Question publiée au JO le : 13/10/2020 page : 7021
Réponse publiée au JO le : 19/01/2021 page : 550

Texte de la question

M. Vincent Descoeur appelle l'attention de Mme la ministre de la transition écologique sur les conséquences du décret n° 2020-828 du 30 juin 2020 modifiant la nomenclature et la procédure en matière de police de l'eau. Tous travaux ayant pour unique objet, la restauration des fonctionnalités naturelles des milieux aquatiques pourront être menés sans autorisation, sur simple déclaration, sans étude d'impact ni enquête publique. Il pourra être ainsi procédé facilement à la destruction de tous les milieux aquatiques façonnés par l'homme au cours de l'histoire (biefs, canaux, étangs, plans d'eau). Ceci aura un impact sur l'environnement (avec notamment la destruction des biotopes qui se sont créés dans ces milieux) ainsi que sur le patrimoine. En effet, les moulins qui contribuent à la richesse des paysages et du patrimoine culturel et industriel français, lorsqu'ils seront privés des cours d'eau qui les alimentent, seront condamnés à terme. L'objet sur lequel repose le décret, celui de la « restauration des fonctions naturelles » est infondé. En effet, dans quelle mesure peut-on déterminer si telle fonction est naturelle ou pas sans qu'une étude d'impact ne soit menée ? Ces lieux forgés à la fois par la nature et par l'homme avaient trouvé un équilibre qui va être désormais profondément remis en question. Aussi, il lui demande des précisions sur la finalité d'un tel décret et s'il entend donner suite aux demandes des associations de défense du patrimoine des moulins de retirer ce texte.

Texte de la réponse

Face au double défi de l'effondrement de la biodiversité et d'un maintien de la qualité de l'eau, la restauration de la continuité écologique est une politique importante pour l'atteinte du bon état des cours d'eau et pour respecter nos engagements à préserver la biodiversité d'eau douce. Cette dernière est en effet particulièrement menacée, d'après les derniers chiffres de l'UICN (Union internationale pour la conservation de la nature) datant de 2019, 28 % des crustacés et 39 % des poissons sont menacés, quand 19 % des poissons présentent un risque de disparition. L'importance de cette politique de restauration de la continuité écologique des cours d'eau a été réaffirmée en France par les Assises de l'eau en juin 2019 et le plan biodiversité qui prévoit de restaurer la continuité sur 50 000 km de cours d'eau d'ici à 2030. La stratégie biodiversité 2020 de la Commission européenne en fait également un enjeu majeur, elle inclut un objectif de restauration de 25 000 km de cours d'eau d'ici 2030. La mise en œuvre de cette politique sur le terrain est toutefois délicate car elle doit être conciliée avec le déploiement des énergies renouvelables dont fait partie l'hydroélectricité, la préservation du patrimoine culturel et historique, ou encore le maintien d'activités sportives en eaux vives participant au développement de nos territoires. C'est pourquoi le ministère de la Transition écologique est engagé, depuis quelques années, dans un travail de conciliation des différents enjeux avec les acteurs concernés afin de mettre en œuvre cette politique dans un climat apaisé. S'agissant en particulier de la dimension patrimoniale, des travaux en commun avec le ministère de la Culture et les représentants des propriétaires de moulins ont permis de progresser vers une meilleure prise en compte de la valeur historique et paysagère des ouvrages hydrauliques, mais n'ont pas encore été pleinement déployés localement. Par ailleurs, des difficultés persistent, par exemple en terme de financement de certaines solutions techniques d'intervention sur les ouvrages, points sur lesquels le ministère continue de travailler. Répondant aux objectifs du Gouvernement de simplification administrative, et demandée par les collectivités gestionnaires des cours d'eau et milieux humides, la rubrique 3.3.5.0 relative aux travaux de restauration des fonctionnalités naturelles des milieux aquatiques exclusivement soumise à déclaration au titre de la loi sur l'eau, créée par le décret no 2020-828 du 30 juin 2020, vise principalement à faciliter la réalisation de travaux qui vont dans le sens d'un meilleur fonctionnement des écosystèmes naturels et de l'atteinte des objectifs de la directive cadre sur l'eau. Cette simplification ne met pas en péril le patrimoine et ne remet pas en cause le droit de propriété des riverains (droit à valeur constitutionnelle, qui n'est en rien modifié par les textes précités et demeure préservé par les mêmes dispositions qu'auparavant). La procédure de déclaration comporte une analyse d'incidences adaptée à l'ampleur des interventions envisagées. Les dispositions légales qui prévoient une consultation du public, en application de l'article 7 de la charte de l'environnement, restent par ailleurs applicables. En cas de nécessité (ce qui n'est généralement pas le cas des travaux soumis au régime de déclaration), le public peut donc bien toujours être consulté en application des articles L. 123-19 et suivants du code de l'environnement. A ce jour, la politique de restauration de la continuité écologique a permis d'identifier les cours d'eau sur lesquels il était important d'intervenir (11 % des cours d'eau), et sur ces cours d'eau, de procéder à des interventions sur environ 5 000 ouvrages. Dans la grande majorité des cas, la solution technique trouvée a consisté à aménager l'ouvrage (mise en place d'une passe à poisson, d'une rivière de contournement, abaissement du seuil…), sans qu'il n'y ait suppression du barrage ou du seuil.