15ème législature

Question N° 329
de M. Jean-Philippe Nilor (Gauche démocrate et républicaine - Martinique )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Europe et affaires étrangères
Ministère attributaire > Europe et affaires étrangères

Rubrique > politique extérieure

Titre > traite des migrants en Libye

Question publiée au JO le : 23/11/2017
Réponse publiée au JO le : 23/11/2017 page : 5387

Texte de la question

Texte de la réponse

TRAITE DES MIGRANTS EN LIBYE


M. le président. La parole est à M. Jean-Philippe Nilor, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

M. Jean-Philippe Nilor. Monsieur le Premier ministre, arrière-petit-fils d'Africain réduit en esclavage, je partage avec tous les humanistes de notre planète l'émotion suscitée par les images d'êtres humains vendus aux enchères en Libye. Pourtant, de nombreuses organisations non gouvernementales – ONG – ont alerté la communauté internationale depuis longtemps. Et que dire du rapport accablant de l'Organisation internationale pour les migrations d'avril 2017 ?

L'Afrique a enrichi l'Europe. Qu'a-t-elle eu en retour ? Rien ! Malgré la résolution des Nations unies votée il y a quarante-sept ans, la main sur le cœur, aucun pays développé n'accorde 0,7 % de son produit intérieur brut – PIB – à l'aide au développement. La loi de finances votée hier n'échappe pas à ce désengagement. Les damnés de la terre sont pris en étau entre leur terre qui ne leur offre que l'enfer et ce mur de mer cimetière qui les sépare d'un avenir qui, de toute façon, ne saurait être pire en Europe.

En Libye, pays chargé de la gestion des frontières sud-européennes, des mafias négrières, légitimées de fait par l'Europe, prospèrent sur la misère humaine. L'émotion et l'indignation n'ont d'intérêt que si elles permettent des actions fortes, et pas seulement de « karcheriser » sa propre conscience. Cette tragédie doit nous questionner sur les effets collatéraux de l'intervention française en Libye et sur la diplomatie française en Afrique.

À l'approche de la journée internationale pour l'abolition de l'esclavage, la France s'honorerait à se doter d'un budget pour l'aide au développement digne de son rang et de son image, et à améliorer sensiblement les conditions d'accueil et de traitement de ceux qui, au péril de leur vie, arrivent au pays des droits de l'homme. Vous dites ne pas vouloir accueillir toute la misère du monde, mais que faire de celle que l'on a soi-même provoquée ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, FI et NG.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Je vais revenir sur la question libyenne, puisque vous m'interrogez essentiellement sur ce point, et sur les actes de barbarie sur lesquels le Gouvernement s'est déjà exprimé hier. Je voudrais apporter quatre points complémentaires. Tout d'abord, la France a décidé ce matin de demander la réunion expresse du Conseil de sécurité des Nations unies pour aborder cette question. En tant que membre permanent du Conseil de sécurité, elle a la capacité de le faire, et nous le faisons.

Deuxièmement, nous souhaitons que le Conseil de sécurité s'appuie sur les avis publics des deux organismes des Nations unies que sont l'Organisation internationale pour les migrations et le Haut-Commissariat pour les réfugiés, qui feront un état de la réalité des situations en Libye, notamment la traite des migrants, que vous avez dénoncée à juste titre.

Troisièmement, les autorités libyennes, plusieurs fois alertées, y compris, monsieur le député, par mes soins, car je m'y suis rendu au mois de septembre, ont décidé de lancer une enquête sur les faits. Nous souhaitons que cela aille vite. Si la justice libyenne n'est pas en mesure de mener à bien les procédures, nous devrons engager une procédure internationale de sanction.

Enfin, chacun sait bien que la résolution de ce type de drames ne peut avoir lieu que s'il y a une solution politique, qui est aujourd'hui initiée par l'envoyé spécial du secrétaire général des Nations unies, M. Salamé. Ces discussions avancent lentement, mais elles avancent. Nous souhaitons une prise de conscience par les acteurs libyens de la nécessité de répondre rapidement à ces situations dramatiques. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.)

M. Stéphane Demilly. Très bien !