Prise en compte des droits de l'enfant dans les affaires étrangères de la France
Question de :
M. Jean-Luc Lagleize
Haute-Garonne (2e circonscription) - Mouvement Démocrate (MoDem) et Démocrates apparentés
M. Jean-Luc Lagleize appelle l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la nécessité d'une meilleure prise en compte des droits de l'enfant dans la politique internationale de la France. La crise sanitaire actuelle rappelle plus que jamais la vulnérabilité des enfants. En effet, la situation engendrée par la covid-19 ne doit pas limiter l'acheminement de l'aide humanitaire dont dépendent 420 millions d'enfants vivant dans des zones en situation de conflit. Au-delà des contextes de crise, de nombreux enfants ne sont aujourd'hui pas scolarisés et les mesures de confinement prises en réponse à la pandémie n'ont fait qu'aggraver ce constat. Malheureusement, l'expérience de crises antérieures apprend que beaucoup de ces enfants ne reviendront jamais à l'école, endommageant leurs perspectives pour la vie. Sans la protection offerte par les systèmes éducatifs, y compris l'accès aux programmes d'alimentation scolaire, des millions d'enfants, en particulier les filles, sont plus à risque de violence, d'exploitation, de négligence, de malnutrition et d'abus. Alors que la France a ratifié la Convention relative aux droits de l'enfant (CIDE) il y a 30 ans, elle est à ce titre tenue de tout mettre en oeuvre afin d'assurer les prestations nécessaires à l'effectivité des droits de l'enfant, d'assurer leur protection ainsi que leur participation aux décisions qui les concernent, y compris dans sa politique de coopération et de solidarité internationale, comme le précise l'article 4 de la Convention. Si des engagements sectoriels des pouvoirs publics français pour faire progresser les droits de l'enfant dans le cadre de la coopération internationale ont déjà été pris (protection des enfants dans les conflits armés, actions en faveur de l'éducation et de la formation des filles), ceux-ci ne font pourtant pas l'objet d'une attention affirmée sur les plans stratégique, programmatique et financier et restent parfois malheureusement dans l'angle mort des politiques de développement. Dans ce contexte, il l'interroge sur les intentions du Gouvernement pour s'assurer d'une meilleure effectivité des droits de l'enfant dans sa politique internationale, par exemple en consacrant les droits de l'enfant comme une priorité transversale de la politique de coopération et de solidarité internationale de la France ; en promouvant la Convention relative aux droits de l'enfant (CIDE) et l'approche basée sur les droits de l'enfant dans la diplomatie française ; ou en adoptant, à l'instar du marqueur « genre », un marqueur « droits de l'enfant » dans les projets de coopération internationale de la France.
Réponse publiée le 12 janvier 2021
Lors de son discours à l'UNESCO prononcé le 20 novembre 2019 à l'occasion du trentième anniversaire de la Convention relative aux droits de l'enfant (CIDE), le Président de la République a rappelé l'attachement de la France aux droits de l'enfant, qui constituent un axe important de l'engagement international de la France. La France a adhéré à l'ensemble des textes internationaux les protégeant et promouvant leurs droits, au premier rang desquels la Convention des Nations unies relative aux droits de l'enfant, qu'elle a signée et ratifiée en 1990, ainsi que les trois protocoles facultatifs sur l'implication d'enfants dans les conflits armés (2000), sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (2000), et établissant une procédure de présentation de communications (ratifié en 2014). Tous les deux ans, en tant que membre de l'Union européenne et aux côtés des États du Groupe Amérique latine et Caraïbes, la France présente une résolution réaffirmant les droits de l'enfant à l'Assemblée générale des Nations unies et au Conseil des droits de l'Homme. Elle y promeut activement la défense des droits de l'enfant face aux défis contemporains. Parmi ces derniers, elle fait de l'accès à l'éducation, la lutte contre toutes les formes de violence et la protection particulière qu'appelle le droit des filles, une priorité. La France a également joué un rôle moteur dans l'adoption des résolutions 1539 (2004) et 1612 (2005) du Conseil de sécurité, qui ont mis en place un mécanisme de surveillance et de communication des violations graves commises contre les enfants en temps de conflit armé. La France est particulièrement attachée à son partenariat avec le Fonds des Nations unies pour l'enfance (UNICEF), avec lequel elle collabore sur plusieurs programmes d'éducation, d'enregistrement des naissances et de lutte contre le recrutement d'enfants soldats, ainsi qu'avec son comité national en France. En 2007, en lien avec l'UNICEF, la France s'est ainsi impliquée activement dans la définition des Principes de Paris sur les enfants associés aux forces armées ou aux groupes armés, dont elle promeut toujours l'endossement par de nouveaux États. Aux côtés du Comité UNICEF France, la France a lancé en 2020 un fonds de contrepartie (matching fund) en faveur de l'autonomisation des filles en Mauritanie, reposant sur des financements innovants : l'État versera un euro pour chaque euro récolté dans le cadre d'une campagne d'appel aux dons en faveur de ce projet. En outre, la France est, depuis 2019, pays pionnier de l'Alliance 8.7 contre le travail des enfants et collabore à ce titre avec la société civile dans la lutte contre le travail forcé et le travail des enfants. La prise en compte des droits de l'enfant dans l'action internationale de la France se traduit également par le financement de nombreux projets visant à la réalisation effective de ces droits. Ainsi, dans le domaine de l'éducation, la France s'est engagée dans le Partenariat mondial pour l'éducation, avec une contribution historique de 200 millions d'euros sur la période 2018 à 2020. De même, l'initiative « Priorité à l'égalité », lancée sous la présidence française du G7 en 2019, vise à soutenir la mise en place d'environnements protecteurs pour les filles au sein des écoles. Face à la crise sanitaire, la France a développé, avec l'UNESCO, la plateforme d'enseignement « Ma classe à la maison » pour les écoliers de pays d'Afrique francophone. Dans le domaine de la santé, la France fournit une aide matérielle aux acteurs de la santé maternelle et infantile dans les territoires les plus précaires et les plus isolés. À travers le Fonds français Muskoka, 9 pays d'Afrique de l'Ouest et d'Afrique centrale bénéficient de programmes pour réduire la mortalité infantile. Dans le contexte de la crise sanitaire, la France soutient la stratégie de GAVI, l'Alliance du vaccin, qui axe ses efforts sur les enfants. L'engagement de la France se poursuivra au cours des prochaines années. Ainsi, dans sa stratégie internationale pour la sécurité alimentaire, la nutrition et l'agriculture durable (2019-2024), la France place les enfants parmi les destinataires prioritaires, en luttant contre la sous-nutrition sur leurs 1000 premiers jours. De même, le projet de loi de programmation relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales renforce la prise en compte des droits de l'enfant. Le Cadre de partenariat global (CPG), « livre blanc » de la politique de développement prévu par la loi, devra ainsi consacrer une place importante à l'enfance et à ses besoins spécifiques, notamment en termes d'éducation et de sécurité alimentaire. Enfin, conformément à l'annonce faite par le Président de la République à l'occasion du trentième anniversaire de la CIDE en 2019 à l'UNESCO, et réitérée cette année par le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports à l'occasion de la Journée internationale des droits de l'enfant, des travaux ont été lancés en faveur d'une déclaration de politique internationale qui portera sur la protection des enfants dans le monde numérique.
Auteur : M. Jean-Luc Lagleize
Type de question : Question écrite
Rubrique : Enfants
Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères
Ministère répondant : Europe et affaires étrangères
Dates :
Question publiée le 20 octobre 2020
Réponse publiée le 12 janvier 2021