Fraude à la carte bancaire
Question de :
M. Vincent Ledoux
Nord (10e circonscription) - Agir ensemble
M. Vincent Ledoux appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance sur la fraude à la carte bancaire. La crise sanitaire a imposé les paiements par carte bancaire « sans contact » et par internet comme frein à la propagation du virus. Le quatrième rapport annuel de l'Observatoire de la sécurité des moyens de paiement (OSMP) relève en effet une progression de 67 % du paiement « sans contact » et de 13 % du paiement à distance depuis le premier déconfinement. À la hausse des moyens de paiement dématérialisés correspond hélas une augmentation de la fraude bancaire. Les paiements « sans contact » et à distance sont respectivement deux et dix-sept fois plus fraudés que les transactions avec composition du code secret. Une estimation à taux de fraude et volume de paiement global constants à partir des statistiques du rapport annuel 2019 de l'OSMP peut laisser accroire une hausse de 20 % des escroqueries pour atteindre plus de 660 millions d'euros en 2020. Or une enquête conduite en septembre 2020 par l'UFC-Que choisir montre que 30 % des fraudes ne sont pas remboursées par les banques. Pour le paiement à distance deux raisons sont invoquées : la négligence du consommateur alors même que les banques accusent un retard technologique pour la sécurisation des transactions à distance ; des « pratiques visant à décourager les consommateurs dans leurs démarches ». En ce qui concerne le « sans contact », l'association de consommateurs relève : « À l'occasion du déconfinement, les consommateurs se sont vu imposer une augmentation systématique du plafond du paiement "sans contact" à 50 euros, sans pouvoir s'y opposer. Pourtant, la sécurité de cette technologie est préoccupante puisqu'elle expose à des fraudes plus nombreuses et de montants plus élevés. Pire, faire opposition à sa carte bancaire en cas de vol ne permet pas d'y échapper. En effet, tant que le plafond de paiements sans contact successifs n'est pas atteint (jusqu'à cinq opérations ou un montant cumulé de 150 euros), cette fonction demeure utilisable, puisque le code secret n'est pas demandé et que la carte n'a pas à se connecter au réseau de la banque émettrice. Il est dès lors indispensable de rendre aux consommateurs le contrôle sur ce mode de paiement ». Il demande donc au ministre ce qu'il envisage faire pour renforcer les droits des consommateurs et sanctionner le cas échéant les manœuvres dilatoires des banques.
Réponse publiée le 25 janvier 2022
La sécurisation des transactions en ligne est une préoccupation constante du Gouvernement, qui s'attache à promouvoir des moyens de paiements rapides, efficaces et sûrs, dans le cadre de la Stratégie nationale sur les moyens de paiement. Depuis la loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne, la Banque de France est chargée expressément « d'assurer la sécurité des moyens de paiement ». Cette loi a également institué l'Observatoire de la sécurité des cartes de paiement (OSCP) que la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 a remplacé par l'Observatoire de la sécurité des moyens de paiement (OSMP). L'OSMP, au sein duquel est représenté le ministre de l'économie, des finances et de la relance, réunit les acteurs concernés (administrations publiques, secteur bancaire, représentants des consommateurs et des commerçants, etc.). Il permet de coordonner en amont des actions de prévention et de lutte contre ce type de fraude. Il établit chaque année un bilan annuel sur les taux de fraude constatés sur les transactions par carte. Le rapport annuel de l'Observatoire pour l'année 2019 fournit une première approche des impacts de la crise sanitaire intervenue au début de l'année 2020 sur la répartition des moyens de paiements utilisés et leur sécurité. Il est ainsi constaté que, si l'augmentation de la part des paiements sans contact et des paiements en ligne, structurellement plus exposés à la fraude que les paiements par carte en mode contact, peut, à terme, avoir une influence sur le taux de fraude global, ce risque est pris en compte par un suivi spécifique de l'OSMP. Le droit existant (code monétaire et financier) prévoit, en outre, un dispositif de protection des consommateurs en cas de fraude à la carte bancaire. Lorsque le consommateur conteste avoir autorisé une opération de paiement, il appartient au prestataire de services de paiement de prouver que l'opération en question a été authentifiée, dûment enregistrée, comptabilisée et qu'elle n'a pas été affectée par une déficience technique ou autre (article L. 133-23 du code monétaire et financier). Le prestataire de service de paiement doit, de surcroît, effectuer immédiatement le remboursement de l'opération non autorisée, si celle-ci lui a été signalée dans les délais fixés par la réglementation (au plus tard dans les 13 mois suivant la date de débit du compte bancaire), sauf s'il a de bonnes raisons de soupçonner une fraude de l'utilisateur du service de paiement, et s'il communique ces raisons par écrit à la Banque de France (article L. 133-18 du code monétaire et financier). À l'issue de son enquête réalisée en 2020, l'UFC-Que-Choisir a indiqué que 30 % des fraudes ne seraient pas remboursées par les banques, en infraction de la réglementation précitée. Les données dont disposent la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) ne permettent pas de corroborer ce chiffre. La dernière enquête réalisée par les services de la DGCCRF en matière de paiement non autorisé par carte a conduit au constat d'anomalies dans un nombre limité d'établissements (3 sur 26 établissements contrôlés). Les contrôles ont permis de conclure que la réglementation était globalement respectée, même si des pratiques de contournement avaient marginalement été constatées, comme des délais de remboursement anormalement longs, ou des remboursements conditionnés à un dépôt de plainte auprès des services de police ou de gendarmerie, alors que la réglementation ne prévoit nullement cette condition préalable. S'agissant des paiements en ligne, la directive européenne sur les services de paiement n° 2015/2366 du 25 novembre 2015 (DSP 2) a introduit le recours à l'authentification forte du payeur pour l'initiation d'un paiement électronique. Ce dispositif clé en matière de sécurisation des moyens de paiement est actuellement en cours de déploiement, et fait l'objet d'un suivi périodique mis en place par l'OSMP. La finalisation du plan de migration des acteurs de la place française, bien que retardé par le contexte de crise sanitaire et économique, est en cours. Par ailleurs, dans le contexte de la crise sanitaire, les pouvoirs publics ont recommandé les paiements dématérialisés pour éviter tout contact entre l'agent de caisse et le client, sans pour autant autoriser les professionnels à refuser les paiements en espèces. À cet égard, à la suite d'un travail étroit entre le ministère de l'économie et des finances et le GIE Cartes Bancaires, les banques ont décidé de permettre, à partir du 11 mai 2020, aux consommateurs de payer de manière facilitée et sans contact physique les achats du quotidien sur plus d'un million de terminaux de paiement. Cette évolution participe au renforcement de la sécurité sanitaire dans le commerce de détail et à la simplification du quotidien pour tous les Français. Le relèvement du plafond du paiement sans contact, constitue surtout un geste barrière important pour protéger la santé des consommateurs et des commerçants. L'élévation du plafond de paiement par carte en sans contact à 50 € a été réalisée conformément aux dispositions de la seconde directive européenne sur les services de paiements, et dans des conditions assurant un haut niveau de sécurité selon l'Observatoire, qui soutient le développement des modes de paiement sans contact sécurisés au point de vente, par l'utilisation des technologies de paiement sans contact par carte ou par mobile. En cas de litige avec la banque sur une demande de remboursement, le consommateur peut saisir le médiateur bancaire puis, en cas de difficultés persistantes, le juge civil. Ce dispositif est de nature à assurer la protection des consommateurs.
Auteur : M. Vincent Ledoux
Type de question : Question écrite
Rubrique : Moyens de paiement
Ministère interrogé : Économie, finances et relance
Ministère répondant : Économie, finances et relance
Dates :
Question publiée le 17 novembre 2020
Réponse publiée le 25 janvier 2022