Question écrite n° 34517 :
Pénuries des médicaments dits d'intérêt thérapeutique majeur

15e Législature

Question de : M. Vincent Ledoux
Nord (10e circonscription) - Agir ensemble

M. Vincent Ledoux appelle l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé sur les pénuries concernant les médicaments dits d'intérêt thérapeutique majeur. L'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) avait relevé 1 200 pénuries de médicaments en 2019, presque trois fois plus qu'en 2016. En 2020, ce seront près de 2 400 ruptures qui devraient être constatées. Les ruptures concernent en grande partie des médicaments anciens et peu onéreux mais bien essentiels pour les patients. La situation s'avère particulièrement préoccupante puisque ces pénuries concernent majoritairement des médicaments dits d'intérêt thérapeutique majeur (MITM). Les médicaments d'intérêt thérapeutique majeur sont des traitements pour lesquels une interruption peut mener à engager le pronostic vital des patients. Même si dans la plupart des cas des solutions de substitution avec d'autres traitements sont possibles, ce n'est pas sans risque puisque les substitutions peuvent entraîner des effets secondaires plus importants, ou nécessiter un temps d'adaptation à la nouvelle posologie, particulièrement pour les patients âgés. Mais dans près d'un cas sur cinq, aucune solution de substitution n'existe pour ces traitements, entraînant pour les malades des annulations de traitements et des conséquences médicales lourdes. La loi permet pourtant de sanctionner les industriels qui ne respecteraient pas les obligations de service public. Alors que la situation n'a jamais été aussi préoccupante, uniquement deux laboratoires ont été sanctionnés en 2019. Plusieurs pays de l'Union européenne ont décidé de mettre en place des stocks de sécurité, d'une durée de 3 à 10 mois, pour lutter contre les pénuries de médicaments. Une coordination européenne pourrait répondre à un certain nombre de problématiques. Ainsi, il lui demande, d'une part, les intentions du Gouvernement pour mettre en place des stocks suffisants pour répondre aux besoins des malades concernés par les médicaments d'intérêt thérapeutique majeur et davantage sanctionner, le cas échéant, les contrevenants aux obligations de service public ; d'autre part, si une coordination avec d'autres pays européens est actuellement envisagée.

Réponse publiée le 25 mai 2021

Les ruptures de stock de médicaments ainsi que les tensions d'approvisionnement ont des origines multifactorielles susceptibles d'intervenir tout au long de la chaîne de production et de distribution. Dans ce cadre, les laboratoires pharmaceutiques sont tenus de prévenir et de gérer les ruptures de stock des médicaments et des vaccins qu'ils commercialisent. Ils doivent assurer un approvisionnement approprié et continu du marché national et prendre toute mesure utile pour prévenir et pallier toute difficulté d'approvisionnement. L'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) est également mobilisée afin d'assurer la continuité de l'accès aux médicaments pour les patients et les professionnels de santé. Pour autant, compte tenu de l'augmentation des signalements de ruptures et risques de ruptures de stock constatée ces dernières années, différents textes sont venus encadrer la gestion de ces ruptures. Dans un premier temps, la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé et son décret d'application du 20 juillet 2016 relatif à la lutte contre les ruptures d'approvisionnement de médicaments a introduit des mesures de prévention et de gestion des ruptures de stock au niveau national afin de redéfinir les instruments à la disposition des pouvoirs publics et de renforcer les obligations qui pèsent sur les acteurs du circuit de fabrication et de distribution. Dans un second temps, la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l'organisation et à la transformation du système de santé a rendu possible le remplacement de médicaments par les pharmaciens d'officine en cas de rupture d'un médicament d'intérêt thérapeutique majeur (MITM), facilitant ainsi la continuité du traitement des patients. Dans un troisième temps, le ministère des solidarités et de la santé a élaboré une feuille de route 2019-2022 pour lutter contre les pénuries et améliorer la disponibilité des médicaments en France. A cet égard, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 a considérablement renforcé la lutte contre les ruptures de stock de médicaments par la mise en place d'un plan de gestion des pénuries pour chaque médicament d'intérêt thérapeutique majeur. En outre, a été adoptée l'importation des alternatives thérapeutiques dans certains cas de pénuries et la constitution d'un stock de couverture des besoins en médicaments. A ce titre, les industriels doivent constituer un stock qui ne peut excéder quatre mois de couverture des besoins en médicaments, calculés sur la base du volume des ventes de la spécialité au cours des douze derniers mois glissants. Cette obligation concerne tout particulièrement les médicaments pour lesquels les ruptures de stock sont récurrentes, ce qui déstabilisent la prise en charge des patients comme les médicaments indiqués dans le cadre du traitement contre le cancer. Les sanctions financières entourant ces obligations ont été renforcées. Un comité de pilotage, sous l'égide du ministère des solidarités et de la santé, regroupant l'ensemble des parties prenantes, se réunit régulièrement pour partager les différentes mesures qui seront mises en place. Enfin, le Gouvernement a présenté, le 18 juin 2020, un plan d'actions pour la relocalisation en France de sites de production de produits de santé. Par ailleurs, près de 200 millions d'euros ont été mobilisés pour développer les industries de santé et soutenir la localisation des activités de recherche et de production en France dans le cadre de la lutte contre la COVID-19. Cette enveloppe sera réévaluée en 2021 pour financer de nouveaux projets. En outre, un travail d'accompagnement vers l'industrialisation, la production et le stockage des produits de santé en France est en cours de réalisation. A cet égard, sur la base du rapport commandé à Jacques Biot par le Gouvernement en 2019, le Comité stratégique de filière (CSF) des « Industries et Technologies de Santé » va élaborer un plan d'actions reposant sur le recensement de projets industriels pouvant faire l'objet de relocalisations. Enfin, la Commission européenne a élaboré une proposition de règlement relatif à un rôle renforcé de l'Agence européenne des médicaments (EMA) dans la préparation aux crises et la gestion de celles-ci en ce qui concerne les médicaments et les dispositifs médicaux afin de permettre une gestion centralisée des ruptures de stock, en cas de crise sanitaire. A ce titre, la Commission propose de surveiller et atténuer les effets des pénuries potentielles et réelles de médicaments et de dispositifs médicaux considérés comme critiques pour répondre à une urgence de santé publique ou à d'autres événements majeurs susceptibles d'avoir une incidence grave sur la santé publique. A cet égard, il est proposé de créer, au sein de l'EMA, les structures appropriées afin de faciliter la surveillance et la notification des pénuries. En outre, il est prévu que l'EMA puisse demander et obtenir des informations auprès des titulaires d'autorisations de mise sur le marché, des fabricants et des Etats membres concernés afin de prévenir ou d'atténuer les effets de pénuries au sein de l'Union européenne.

Données clés

Auteur : M. Vincent Ledoux

Type de question : Question écrite

Rubrique : Pharmacie et médicaments

Ministère interrogé : Solidarités et santé

Ministère répondant : Solidarités et santé

Dates :
Question publiée le 1er décembre 2020
Réponse publiée le 25 mai 2021

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