liste noire des paradis fiscaux
Question de :
Mme Bénédicte Peyrol
Allier (3e circonscription) - La République en Marche
Question posée en séance, et publiée le 29 novembre 2017
LISTE NOIRE DES PARADIS FISCAUX
M. le président. La parole est à Mme Bénédicte Peyrol, pour le groupe La République en marche.
Mme Bénédicte Peyrol. Monsieur le ministre de l'économie et des finances, le 5 décembre prochain, la Commission européenne doit publier sa liste noire des paradis fiscaux. Fruit d'une négociation entamée il y a plus d'un an entre ministres européens, cette liste doit se substituer à celles établies par les pays membres de l'Union européenne, dont celle de la France, qui ne répertorie que sept États et territoires jugés non coopératifs. Alors que l'organisation non gouvernementale Oxfam vient de publier sa propre liste de trente-cinq pays, hors Union européenne, assimilables à des paradis fiscaux selon les critères européens du code de conduite, nous ne pouvons que maintenir la pression pour que cette liste commune européenne soit à la fois ambitieuse, cohérente et contraignante.
Ambitieuse, car cette liste pourrait constituer une avancée majeure pour les pays de l'Union européenne. Les travaux menés par le Forum mondial de l'Organisation du commerce et du développement économiques – OCDE – sur la définition des paradis fiscaux existent maintenant depuis plus de quinze ans. La nouvelle vague de révélations des Paradise papers nous exhorte à aller plus loin pour envoyer un message clair à nos concitoyens. Il y va de la crédibilité de l'Europe.
Cohérente, car elle ne doit pas occulter les pratiques fiscales de certains États qui vident de leur substance les principes mêmes des conventions fiscales et des règles de coopération définies avec l'OCDE. Les travaux du consortium pour le journalisme d'investigation, que je salue, ont mis le doigt sur cette frontière ténue entre fraude et optimisation fiscales. Il revient au politique de clarifier ses lignes et sa volonté de combattre l'évasion fiscale sous toutes ses formes.
M. Aurélien Pradié. Vous êtes le politique, c'est incroyable !
Mme Bénédicte Peyrol. Contraignante, enfin, car nous avons dépassé le stade des jugements moraux, et le régime appliqué à ces États devra être dissuasif pour les inciter à s'aligner sur nos standards de bonne gouvernance fiscale.
Monsieur le ministre, nous connaissons votre engagement pour la lutte contre l'évasion et la fraude fiscales internationales.
M. Aurélien Pradié. Cirage !
Mme Bénédicte Peyrol. Dès lors, pouvez-vous nous assurer des efforts de la France dans cette négociation, et nous garantir que cette liste sera un véritable outil de lutte contre l'évasion et la fraude fiscales et que des sanctions réelles seront appliquées contre ces États ? (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie et des finances.
M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie et des finances. Madame la députée, l'évasion fiscale est tout simplement intolérable. Comment voulez-vous que les plus modestes acceptent encore de payer leurs impôts quand certains parmi les plus riches se soustraient à cette obligation ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe REM.)
M. Pierre Cordier. Cahuzac !
M. Bruno Le Maire, ministre. Comment voulez-vous qu'il y ait du consentement fiscal dans notre pays si certains échappent à la règle commune ? Ce n'est pas une question de droite, ce n'est pas une question de gauche, c'est un engagement national, qui a été poursuivi par tous les Présidents de la République, et pour lequel Emmanuel Macron est totalement déterminé à avancer.
Nous avons signé la convention fiscale de l'OCDE, qui vise à lutter contre l'érosion des bases fiscales, et nous veillerons à sa mise en œuvre concrète. Nous avons envoyé, à travers la Commission européenne, des demandes à soixante-douze États qui, aujourd'hui, ne remplissent pas suffisamment leurs obligations en matière de transparence fiscale. Les États qui n'apporteront pas les informations demandées par l'Union européenne sur l'évasion fiscale et sur les moyens de lutter contre elle, seront inscrits, le 5 décembre prochain, à l'occasion du conseil des ministres des finances, sur la liste européenne des États qui seront sanctionnés au nom de la lutte contre l'évasion fiscale.
Nous voyons également la nécessité de durcir les règles. Celles-ci ne sont pas respectées, cette situation exigeant, nous le savons, un combat de tous les instants.
M. Pierre Cordier. Nous verrons !
M. Bruno Le Maire, ministre. Eh bien s'il faut durcir les règles et les sanctions, nous le ferons ! La France propose que les États inscrits sur cette liste européenne n'aient plus accès ni aux mécanismes de soutien européens ni aux modalités de financement de la Banque mondiale ou du Fonds monétaire international.
Une liste noire doit être une liste noire, et non simplement une liste. Elle doit entraîner une série d'actions et de sanctions contre ceux qui se soustraient à la règle commune. (Applaudissements sur les bancs du groupe REM.)
Auteur : Mme Bénédicte Peyrol
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Impôts et taxes
Ministère interrogé : Économie et finances
Ministère répondant : Économie et finances
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 29 novembre 2017