Plateforme d'écoute des femmes victimes de violences
Question de :
Mme Bénédicte Taurine
Ariège (1re circonscription) - La France insoumise
Question posée en séance, et publiée le 25 novembre 2020
PLATEFORME D'ÉCOUTE DES FEMMES VICTIMES DE VIOLENCES
M. le président. La parole est à Mme Bénédicte Taurine.
Mme Bénédicte Taurine. Ma question s'adresse à Mme la ministre déléguée chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances. Depuis 1992, la fédération nationale Solidarité femmes assure la permanence téléphonique d’écoute et d’orientation pour toutes les femmes victimes de violences. Le succès de cet engagement est reconnu : le 3919 est devenu la ligne de référence nationale d’aide à ces femmes. (Applaudissements sur les bancs du groupe FI et parmi les députés non inscrits.) La FNSF entretient des liens étroits avec les associations de prise en charge. Elle prodigue une écoute de très grande qualité, grâce à trente ans de pratique. Son expérience et l’implication de ses bénévoles et professionnels sont irremplaçables. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe FI.)
L’an dernier, lors du Grenelle des violences conjugales, le Président de la République s’était rendu au siège du 3919 et avait posé la question de son agrandissement et de son ouverture vingt-quatre heures sur vingt-quatre ; tout semblait parfait ! Et c’est vrai, depuis trente ans, cette association pallie les insuffisances de l’État.
Voilà pourquoi et comment elle est remerciée aujourd’hui ! Votre gouvernement s’empare de cette ligne et s’apprête à lancer un marché public pour organiser sa gestion. (Huées sur les bancs du groupe FI.) Un tel procédé est honteux. Vous devriez être à l’écoute des associations et de leurs propositions d’amélioration du fonctionnement de l’État concernant ses devoirs envers les femmes, plutôt que remettre en question des associations et des dispositifs qui ont fait leurs preuves. Les places d’hébergement, par exemple : où sont-elles ? Qu’en est-il de la généralisation des tribunaux spécialisés ou encore du bracelet anti-rapprochement ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe FI.) Où est le milliard d’euros nécessaire pour prendre cette question à bras-le-corps et ne plus en rester aux incantations et à la communication ? (Applaudissements sur les bancs du groupe FI et parmi les députés non inscrits.) C’est aux problèmes des femmes que vous devriez répondre, plutôt que démanteler des associations qui fonctionnent et qui les soutiennent.
M. Alexis Corbière. C'est vrai !
Mme Bénédicte Taurine. Comment pouvez-vous imaginer que la lutte contre les violences puisse obéir à une logique de marché ?
Voici la question simple que je vous pose, madame Moreno : à la veille de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, comptez-vous abandonner l’ouverture à la concurrence de la ligne d’urgence du 3919, comme toutes les associations féministes vous le réclament ? (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe FI, sur quelques bancs des groupes GDR et SOC ainsi que parmi les députés non inscrits.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances.
Mme Elisabeth Moreno , ministre déléguée chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances. Je vous remercie pour votre question, madame Taurine, qui me permet de faire le point sur un sujet qui suscite des interrogations. De quoi parle-t-on ? Dans le cadre du Grenelle des violences conjugales, le Gouvernement s’est fixé un objectif très ambitieux : rendre accessible la plateforme d’écoute téléphonique des femmes victimes de violences conjugales, vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept, en garantissant son accès non seulement dans les territoires ultramarins – où, à cause du décalage horaire, ce n'est actuellement pas possible – mais aussi aux femmes sourdes et aphasiques.
La FNSF, qui a créé cette plateforme et la gère, accomplit, c'est exact, un travail remarquable (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM) – je le dis comme je l’ai dit à ses membres – et il n’est absolument pas question que l’État s’approprie cette ligne. (Exclamations sur les bancs du groupe FI.) Au reste, l’État a accompagné cette association de façon continue ; en 2020, par exemple, nous lui avons octroyé un financement de 2 millions d’euros.
La procédure de commande publique n’a rien d’une nouveauté. Elle a été utilisée à plusieurs reprises, notamment pour les lignes d’urgence comme le 116 000, pour les enfants disparus, et le 0800 360 360, dédié aux personnes en situation de handicap.
M. Gaël Le Bohec. Eh oui !
Mme Elisabeth Moreno , ministre déléguée . Pourquoi ne pas choisir la voie de la subvention publique, comme nous le suggèrent certaines associations et comme vous le relayez ? Tout simplement parce que, dès lors qu’il s’agit d’une commande de l’État, où celui-ci définit les modalités et le contenu du projet et en finance l’intégralité, nous n’avons pas d’autre choix que de passer par un marché public. (Exclamations sur les bancs du groupe FI.)
Le choix qu’ont fait le Gouvernement et ma prédécesseure consiste précisément à vouloir le meilleur service public possible pour toutes les femmes. Je le dis avec les responsabilités qui m’incombent : prendre le risque avéré d’un contentieux sur un sujet aussi important serait juridiquement et politiquement irresponsable ! (Exclamations sur les bancs du groupe FI.)
Mme Mathilde Panot. C'est vous qui êtes irresponsable !
Mme Elisabeth Moreno , ministre déléguée . Je veux que toutes les femmes victimes de violences, qu’elles vivent dans l’Hexagone ou outre-mer, y compris les femmes handicapées, sachent qu’elles seront entendues ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe Dem.)
Auteur : Mme Bénédicte Taurine
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Femmes
Ministère interrogé : Égalité femmes-hommes, diversité et égalité des chances
Ministère répondant : Égalité femmes-hommes, diversité et égalité des chances
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 25 novembre 2020