15ème législature

Question N° 35944
de M. François Ruffin (La France insoumise - Somme )
Question écrite
Ministère interrogé > Éducation nationale, jeunesse et sports
Ministère attributaire > Éducation nationale, jeunesse et sports

Rubrique > enseignement

Titre > La fin des « Rep + » ?

Question publiée au JO le : 02/02/2021 page : 835
Réponse publiée au JO le : 20/07/2021 page : 5786

Texte de la question

M. François Ruffin interroge M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports sur les réseaux d'éducation prioritaire « REP + ». Il vient de recevoir un tableau plein de chiffres, la « Dotation horaire des collèges de la Somme ». Tout en haut, dans les premières lignes, figurent les établissements qui vont perdre le plus d'heures : en 1, médaille d'or : « Rosa Parks », en 2, argent : « César Franck », en 3, en bronze : « Arthur Rimbaud » et juste au pied du podium, en 4 : « Guy Maréschal ». Il lui demande si cela ne lui dit rien, ces noms-là car à lui, si. Les quatre se trouvent à Amiens, et les quatre dans des « quartiers populaires », « en difficultés », « politiques de la ville » : Etouvie, Amiens-Nord, Guy Mareschal. Tous les quatre sont d'ailleurs notés « Rep + », et eux vont perdre 95 h, soit l'équivalent de cinq postes. Il les connaît d'autant mieux, ces établissements, que c'était déjà le même classement, à peu près, l'année d'avant. Et la même chose, en fait, l'année d'avant, scénario qui se répète depuis que M. le ministre est arrivé au ministère et M. le député à l'Assemblée : les « Rep + » en première ligne pour la fonte des heures. Avec les enseignants, donc, et des parents d'élèves, M. le député a participé à des manifestations, assisté à des AG, et même à une « Nuit des collèges », avec matelas, sacs de couchage et machine à café dans une salle de classe. « Il y a encore quatre ans, avant l'arrivée d'Emmanuel Macron, me décrivait un prof de Guy Mareschal cette après-midi, c'était 18 ou 19 élèves par classe, jamais au-delà de 20. Maintenant, on monte à 24. Et ils parlent de relever le plafond à 26. Comment on peut avoir un accompagnement individualisé, dans des classes, avec des gamins formidables, mais quand même pas faciles, des Ulis, des allophones, des dyslexiques, avec des troubles de lecture qui persistent, comment on peut adapter notre enseignement dans une classe de vingt quatre ? Y a pas de miracle : on ne peut pas. » Et un enseignant de Rosa Parks l'alertait par courriel : « Est-il nécessaire de rappeler que notre établissement scolarise les élèves dont les difficultés scolaires sont les plus aigües ? 15 élèves de 6e ayant une notification Ulis sont scolarisés dans les classes-type faute de place. Certains ne savent pas lire. Les scores de fluence font apparaître que 41,9% de nos élèves de 6e n'ont que les attendus de fin de CE2 (contre 15% dans l'échantillon national). Seuls 23.8% d'entre eux ont les attendus de début de 6 ème (contre 54% dans l'échantillon national). Le taux de maîtrise insuffisante ou fragile aux évaluations 6e en Français et en mathématiques n'a fait que croître entre 2017 et 2020 (43% en Français et 64% en mathématiques). L'écart aux valeurs départementales aussi. Evidemment, les autres cohortes éprouvent elles aussi des difficultés très marquées. » Et devant ces soucis cumulés, il ne faudrait pas plus de moyens, pour redresser la barre ? Ou alors, M. le ministre considère qu'en sixième, il est déjà trop tard ? Tel semble l'implicite, le non-dit, de sa politique : miser sur le primaire, c'est vrai, le dédoublement des classes. Et ensuite, ce serait fichu, le destin scolaire, et même professionnel, serait tracé et du coup, autant sacrifier les collèges Rep +, avec une érosion des dotations. Si c'est le projet de M. le ministre, il lui demande de le dire, de l'afficher, d'en débattre, plutôt que de le mener en douce, sans le dire. Enfin, il souhaite savoir jusqu'à quel effectif M. le ministre imagine monter dans ces établissements : 24, 25, 26... et s'il existe un plafond.

Texte de la réponse

Le ministère de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports veille à l'équité des dotations d'enseignement scolaire public du second degré qu'il répartit entre académies. L'analyse des moyens tient compte notamment du poids de l'académie, de la démographie des élèves et des disparités géographiques et sociales. A ce titre, il est fait recours à plusieurs indicateurs reflétant des préoccupations qualitatives : respect des caractéristiques du réseau scolaire académique, maintien du service public dans les zones rurales et réussite scolaire des élèves issus des catégories sociales les plus défavorisées. Dans le respect de leur dotation, les autorités académiques veillent à une répartition équitable des moyens entre les différentes catégories d'établissements et niveaux de formation, compte tenu de leur situation géographique et de leurs caractéristiques sociales. Le classement en REP et REP+ est naturellement pris en compte lors de la répartition des moyens. Ainsi, à la rentrée 2020, le nombre moyen d'élèves par division (E/D) en collège dans l'académie d'Amiens s'établit à 24,1, soit un taux sensiblement plus favorable que le E/D national (24,8). Le E/D des collèges classés en éducation prioritaire dans cette même académie est de 21,4, soit là aussi un taux sensiblement plus favorable que le E/D de 22,3 constaté au niveau national. Enfin, le E/D des collèges REP+ de l'académie d'Amiens (21) est lui aussi plus favorable que pour le reste du pays (21,9). À la rentrée 2021, les 50 collèges publics du département de la Somme devraient accueillir 21 544 élèves, effectif très stable par rapport à 2020 (+ 73 élèves). La méthode de répartition de la dotation au sein du département prend en compte plusieurs éléments : l'évolution des effectifs, en lien avec le nombre de divisions dans chaque collège au regard des équilibres locaux, la ruralité, les taux d'encadrement dans et hors éducation prioritaire, la configuration des locaux, et la consolidation des mesures relatives à l'école inclusive, avec l'ouverture de deux ULIS collège. Au regard des effectifs, le principe « pas plus d'une fermeture de division par collège » a été retenu ; il a par exemple permis d'éviter que le collège Rosa Parks d'Amiens ne perde deux divisions à la rentrée prochaine. La dotation départementale allouée pour la Somme conduit, à ce stade de l'année, au retrait de 12 divisions dans 12 collèges et à 6 ajouts dans 6 collèges. Les retraits touchent en majorité des collèges hors éducation prioritaire. D'une manière générale, les autorités académiques travaillent en lien étroit avec les établissements pour ajuster le nombre d'heures à la réalité RH de chaque structure afin de tendre vers le meilleur équilibre pour chaque collège dans le respect de la dotation départementale. La situation des collèges classés REP et REP+ fait l'objet d'un suivi particulier avec les communautés éducatives concernées, mais aussi dans le cadre des instances dédiées. Pour sa part, le collège Rosa Parks d'Amiens connaît des effectifs très stables depuis 2019 (à peine 400 élèves). L'évolution du nombre de divisions est directement liée à l'effectif des cohortes d'élèves, avec l'ouverture d'une division en 6ème en 2020, puis sa fermeture prévue pour 2021. Une nouvelle analyse, s'appuyant sur la présence d'élèves allophones, a conduit à maintenir le nombre total de divisions en ouvrant cette fois-ci une nouvelle division en 5ème. Dans ce collège, le nombre moyen d'heures d'enseignement par élèves (H/E) s'établit à 1,56, soit un niveau très supérieur au H/E académique (1,20), montrant ainsi la prise en compte des besoins de ce collège et de son classement REP+. S'agissant du collège César Franck d'Amiens, il devrait accueillir 383 élèves en 2021, contre 401 en 2019. Aucune division n'y fermera. Il en est de même pour le collège Arthur Rimbaud d'Amiens qui accueille un peu moins de 500 élèves. Enfin, le collège Guy Mareschal d'Amiens devrait scolariser 278 élèves à la rentrée 2021, soit un effectif quasi identique à celui de 2020 (+ 4) et inférieur à 2019 (283 élèves). Dans ce collège, le E/D est actuellement de 21,1, assez variable d'une année à l'autre en raison de l'effet cohorte rapporté à un collège scolarisant relativement peu d'élèves. Il convient de noter que le H/E y est particulièrement élevé, s'établissant à 1,82, très au-dessus des taux d'encadrement habituellement constaté, le H/E étant de 1,17 au niveau national.