15ème législature

Question N° 36278
de M. Éric Pauget (Les Républicains - Alpes-Maritimes )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture et alimentation
Ministère attributaire > Agriculture et alimentation

Rubrique > agriculture

Titre > Dispositions spécifiques à l'agriculture urbaine - refonte du statut du fermage

Question publiée au JO le : 16/02/2021 page : 1280
Réponse publiée au JO le : 15/06/2021 page : 4870

Texte de la question

M. Éric Pauget attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation au sujet de la nécessité d'adapter la réglementation et d'impliquer les collectivités locales pour offrir à l'agriculture urbaine un cadre favorable à son épanouissement. Les terres agricoles en zone périurbaine sont soumises, depuis plus de cinquante ans, à une double pression. D'une part, la pression foncière et immobilière sur ces zones périurbaines dont la population a triplé menace les traditionnelles exploitations agricoles qui disparaissent à un rythme effréné. D'autre part, la crise sanitaire de la covid-19 a clairement mis en exergue la fragilité de la souveraineté alimentaire ainsi que le besoin impérieux de développer sur le territoire une agriculture plus proche géographiquement des bassins de population. Afin de freiner la disparition de ces terres nourricières, il est essentiel de proposer des dispositifs qui permettent de favoriser le développement de l'agriculture de proximité et de soutenir l'installation de nouveaux agriculteurs. En théorie, une palette d'outils juridiques permet de conventionner l'installation de projets d'agriculture urbaine. Mais, issus du monde rural, ils ne sont pas pleinement adaptés aux spécificités de la production en ville. Parmi eux, le dispositif le plus utilisé est le statut du fermage et du métayage qui organise les relations entre les propriétaires et les locataires de biens agricoles autour d'un bail rural conclu pour une durée de 9 ans minimum. Dans les faits, les contrats de baux ruraux sont fréquemment requalifiés en baux dits « de petites parcelles », lesquels n'offrent pas les mêmes garanties de stabilité et exposent à des risques accrus les agriculteurs qui ont souvent besoin d'inscrire leurs projets et investissements dans le long terme. De même, les conventions consenties par les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) ou les collectivités publiques échappent au statut du fermage, limitant fortement leur capacité d'action. Aussi, pour lever ces freins, M. le député a identifié des leviers juridiques bâtis sur ses échanges avec des élus locaux de sa circonscription qui sont confrontés dans leur quotidien à ces réalités. Il propose ainsi la création d'une dérogation au statut du fermage en introduisant « une réserve supplémentaire au terme de l'article L. 411-2 du code rural et de la pêche maritime, prévoyant que les dispositions de l'article L. 411-1 du même code ne sont pas applicables aux conventions portant sur un immeuble situé en zone urbaine d'un document d'urbanisme ». Également, il suggère de créer dans le code de l'urbanisme un nouveau zonage pour des surfaces inférieures à 2 hectares, délimitant des espaces à la périphérie des zones urbaines sur lesquels il serait possible de maintenir une activité agricole dans un cadre contractuel beaucoup plus souple et moins contraignant que le statut du fermage. Parce qu'aujourd'hui, plus que jamais, les territoires agricoles en zone périurbaine ont un rôle majeur à jouer pour satisfaire les besoins alimentaires, il lui demande s'il envisage d'intégrer ces dispositions spécifiques dans le cadre d'une refonte du statut du fermage.

Texte de la réponse

La pression qu'exerce l'urbanisation sur les zones agricoles périurbaines est un phénomène déjà ancien et très documenté, auquel plusieurs lois apportent des réponses par la création de différents dispositifs, de portée juridique variable, que les collectivités territoriales sont invitées à mobiliser. Il s'agit en premier lieu de la planification urbaine qui permet à la collectivité territoriale, lorsqu'elle élabore son plan local d'urbanisme, de créer le zonage approprié afin de marquer la limite juridique à la possibilité d'extension urbaine. Par ailleurs, le renforcement de la protection des espaces dédiés à l'agriculture peut être apporté par la création d'une zone agricole protégée en application de l'article L. 112-2 et suivants du code rural et de la pêche maritime (CRPM), ou par la création d'un périmètre de protection et de mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains, en application de l'article L. 113-15 et suivants du code de l'urbanisme. En second lieu, la collectivité territoriale peut solliciter l'intervention d'un opérateur foncier pour acquérir des parcelles périurbaines mises sur le marché, dans le but de favoriser l'installation d'agriculteurs. Les opérateurs fonciers habilités à intervenir à la demande des collectivités, sur leurs zones d'interventions respectives, sont les établissements publics fonciers et les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural. Ces dernières, aux termes de l'article L.141-1 du CRPM, œuvrent prioritairement à la protection des espaces agricoles, naturels et forestiers. Elles peuvent, par ailleurs, apporter leur concours technique aux collectivités territoriales pour la mise en œuvre d'opérations foncières conformément à l'article L.141-5 du CRPM. Ces stratégies foncières peuvent par ailleurs être déployées dans le cadre d'une coopération intercommunale. La voie d'une amélioration des dispositions relatives au statut du fermage peut également être explorée. Cependant, du fait notamment de son caractère d'ordre public et de l'équilibre de la relation entre bailleurs et preneurs, toute modification du statut nécessite un examen approfondi et l'atteinte d'un consensus entre les parties prenantes. Il est à noter à cet égard que les parlementaires se sont saisis de la question et le rapport d'information établi par les députés Jean Terlier et Antoine Savignat publié le 22 juillet 2020, a formulé 18 recommandations en vue d'une amélioration du régime des baux ruraux. Pour autant, des outils juridiques peuvent être mobilisés, dans le cadre du droit en vigueur, pour développer l'agriculture urbaine. Portée selon les cas par des jardins familiaux, des fermes pédagogiques, des entreprises pluriactives ou des acteurs de l'économie sociale et solidaire, cette nouvelle modalité d'exercice de l'agriculture connaît un succès croissant en répondant aux attentes sociétales vis-à-vis d'une alimentation locale et de qualité. Dans ce domaine, le rôle d'initiative et d'accompagnement des collectivités territoriales reste prépondérant. En effet, par leur capacité à identifier et mobiliser le foncier disponible, elles peuvent donner aux projets l'impulsion nécessaire. Afin de soutenir cette impulsion, le ministère de l'agriculture et de l'alimentation a doté de 30 millions d'euros un dispositif de soutien à l'agriculture urbaine et aux jardins partagés dans le cadre du plan France Relance. Ce dispositif a pour ambition d'accompagner des projets locaux à visée environnementale et sociale pour les populations des zones urbaines et périurbaines, notamment dans les quartiers prioritaires et zones de renouvellement urbain.