Épandage des boues d'épuration
Publication de la réponse au Journal Officiel du 16 novembre 2021, page 8282
Question de :
M. Jérôme Nury
Orne (3e circonscription) - Les Républicains
M. Jérôme Nury attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la problématique du recyclage des boues d'épuration. L'arrêté du 8 janvier 1998 fixant les prescriptions techniques applicables aux épandages de boues sur les sols agricoles sera modifié par un arrêté pris suite à la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire dont les dispositions afférentes à cette problématique entreront en vigueur le 1er juillet 2021. Comme le précise l'article 86 de cette loi, les référentiels règlementaires sur l'innocuité environnementale et sanitaire applicables aux boues d'épuration sont révisés afin de prendre en compte, désormais, les métaux lourds, les particules de plastiques, les perturbateurs endocriniens, les détergents ou les résidus pharmaceutiques tels que les antibiotiques. Avec ces nouvelles exigences, le projet risque d'exclure des boues d'épuration qui ne respecteraient pas totalement les nouveaux référentiels règlementaires s'ils sont trop restrictifs. Ces dispositions pourraient donc sérieusement impacter les filières d'épandage des boues d'épuration notamment dans les territoires ruraux. Les services d'assainissement dans ces petites collectivités territoriales sont déjà fortement impactés par la crise sanitaire depuis le printemps 2020, avec des coûts qui ont fortement augmenté - une multiplication pouvant aller jusqu'à 10 ou 15 fois le prix habituel du recyclage - pour hygiéniser les boues avant leur épandage. Face à l'impossibilité pour de nombreux territoires de traiter les eaux usées, les seules alternatives pourraient consister à créer des capacités d'incinération ou enfouissement sur l'ensemble du territoire, vers lesquels les boues seraient ensuite acheminées. Cela conduirait à alourdir drastiquement la facture pour les contribuables et serait loin d'être souhaitable en termes de respect de la trajectoire carbone. L'économie circulaire, pourtant promue par cette loi, serait ainsi mise à mal et ce d'autant plus que nombre d'agriculteurs utilisent la boue issue des stations d'épuration et seraient alors contraints de recourir à une part plus importante d'engrais chimiques. Les territoires ruraux et les professionnels de l'agriculture sont donc inquiets et craignent d'être particulièrement impactés par ce texte. Aussi, il lui demande si le nouvel arrêté qui remplacera celui du 8 janvier 1998 pourra tenir compte des réalités du terrain et donc avoir des prescriptions tenables pour les différents acteurs des territoires ruraux.
Réponse publiée le 16 novembre 2021
L'article 125 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire (dite loi AGEC) a habilité le Gouvernement à transposer par ordonnance des directives européennes relatives aux déchets. Ainsi, l'article 14 de l'ordonnance n° 2020-920 du 29 juillet 2020 relative à la prévention et à la gestion des déchets a complété le code rural et de la pêche maritime avec l'article suivant : « Art. L. 255-9-1. - Un décret, pris après consultation de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), fixe les critères de qualité agronomique et d'innocuité selon les conditions d'usage pour les matières fertilisantes et les supports de culture, afin de s'assurer que leur mise sur le marché et leur utilisation ne porte pas atteinte à la santé publique, à la santé animale et à l'environnement. » Ce décret s'appliquera à toutes les matières fertilisantes mises sur le marché ou utilisées en France, dont les boues d'épuration. L'article 86 de la loi AGEC précise que les référentiels réglementaires sur l'innocuité environnementale et sanitaire applicables à ces boues d'épuration en vue de leur retour au sol doivent être révisés au plus tard le 1er juillet 2021. Il ajoute qu'à compter de la même date, l'usage au sol de ces boues, seules ou en mélanges, brutes ou transformées, est interdit dès lors qu'elles ne respectent pas les normes ainsi définies. Le décret susmentionné fixera le cadre pour la révision des référentiels réglementaires sur l'innocuité des boues. Les travaux sont en cours et ont déjà donné lieu à une consultation préliminaire des parties prenantes et à un avis de l'Anses publié en mars 2021. Le projet fait l'objet d'une nouvelle phase de consultation des parties prenantes en octobre-novembre 2021, puis d'un examen pour avis du conseil national d'évaluation des normes, du comité national de l'eau et du conseil supérieur de la prévention des risques technologiques. Par la suite, une consultation du public ainsi qu'une notification à la Commission européenne au titre des règles techniques devront avoir lieu. Le décret devra répondre au double objectif de protéger les terres agricoles et de faire progresser l'économie circulaire. Les nouvelles dispositions relatives à l'innocuité comme à l'efficacité des matières fertilisantes auront vocation à s'appliquer progressivement, en fonction notamment des données scientifiques disponibles, de la nature de ces matières fertilisantes, des risques qu'elles peuvent présenter, des moyens existants pour les maîtriser et des délais d'adaptation pour les acteurs. Dans l'attente de l'entrée en vigueur du décret, les épandages de boues d'épuration urbaines et industrielles pourront se poursuivre, conformément aux dispositions de l'arrêté du 8 janvier 1998 pour les boues urbaines et de l'arrêté du 2 février 1998 pour les boues industrielles.
Auteur : M. Jérôme Nury
Type de question : Question écrite
Rubrique : Déchets
Ministère interrogé : Agriculture et alimentation
Ministère répondant : Agriculture et alimentation
Signalement : Question signalée au Gouvernement le 17 mai 2021
Dates :
Question publiée le 16 février 2021
Réponse publiée le 16 novembre 2021