Question au Gouvernement n° 3636 :
Déremboursement des médicaments homéopathiques

15e Législature

Question de : Mme Josiane Corneloup
Saône-et-Loire (2e circonscription) - Les Républicains

Question posée en séance, et publiée le 16 décembre 2020


DÉREMBOURSEMENT DES MÉDICAMENTS HOMÉOPATHIQUES

M. le président. La parole est à Mme Josiane Corneloup.

Mme Josiane Corneloup. Il y a un an, le Président de la République reconnaissait que la crise des gilets jaunes l'avait obligé à changer d'attitude face aux Français ; il affirmait qu'il fonderait l'acte II de son quinquennat sur l'écoute et la proximité. Or, au vu du projet de déremboursement des médicaments homéopathiques, prévu dès le 1er janvier 2021, nous ne pouvons que déplorer, une fois encore, que les actes de l'exécutif soient aux antipodes de ses bonnes paroles. (Murmures sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem.)

Cet oukase, qui obéit à des considérations plus dogmatiques que raisonnables, constitue une faute grave, car il remet en cause la liberté de se soigner des Françaises et des Français. Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, en suivant la Haute Autorité de santé, vous faites fi des 72 % de Français qui font confiance à l'homéopathie, ainsi que du tiers des médecins généralistes, de 78 % des sages-femmes et de 100 % des pharmaciens, qui l'ont intégrée à leur pratique. Une évaluation objective de l'homéopathie est difficile à réaliser, vous le savez, mais le poncif, valant argument scientifique, selon lequel les médicaments homéopathiques ne présenteraient qu'un effet placebo ne tient pas lorsqu'on sait qu'ils sont administrés avec succès aux bébés et aux animaux. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LR et LT.)

M. Philippe Berta. Mais voyons…

Mme Josiane Corneloup. Cela fait deux siècles que la médecine homéopathique procure de nombreux bienfaits à ses utilisateurs. Nos voisins allemands l'ont d'ailleurs bien compris, puisque votre homologue a fort opportunément décidé que les médicaments homéopathiques continueraient à être remboursés. (M. Jean Lassalle applaudit.)

Du fait du déremboursement, se soigner par homéopathie en France coûtera plus cher. C'est une bien mauvaise nouvelle pour les foyers les plus modestes, particulièrement en ces temps où la pauvreté explose.

M. Damien Abad. Absolument !

Mme Valérie Beauvais. Eh oui !

Mme Josiane Corneloup. Monsieur le Premier ministre, à l'heure où les médecines complémentaires, dont fait partie l'homéopathie, jouent un rôle significatif dans le dispositif de santé ; parce qu'il faut préserver une liberté de soins pour tous les patients, riches ou pauvres ; parce que l'homéopathie répond à un réel besoin médical et procure un bénéfice majeur pour la santé, je vous demande solennellement d'écouter enfin des millions de Françaises et de Français et de revenir sur cette décision infondée, inefficace et injuste, qui ne fera que des perdants. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur plusieurs bancs du groupe LT.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'autonomie.

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie. Je ne vous ferai pas l'injure, madame Corneloup, de vous rappeler comment est déterminé le remboursement des médicaments par l'assurance-maladie : la décision revient à la Haute Autorité de santé, dont les experts sont indépendants et n'obéissent à d'autres règles que les données scientifiques.

M. Pierre Cordier. À quoi servent les ministres, alors ?

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée . À partir de l'ensemble des données médicales et scientifiques disponibles, la Haute Autorité de santé a mis en évidence que les produits homéopathiques n'avaient pas démontré leur efficacité dans la lutte contre les affections pour lesquelles des données étaient disponibles, ni dans la réduction de la consommation d'autres médicaments.

M. Jean-Paul Dufrègne. Peut-on lui faire confiance ?

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée . Après avoir écouté les professionnels et les usagers, une procédure a été lancée par les autorités sanitaires, visant à retirer les produits homéopathiques de la liste des médicaments pris en charge à compter du 1er janvier 2021. Cette décision nous oblige à revenir sur le statut dérogatoire dont l'homéopathie disposait depuis les années soixante ; elle ne remet bien sûr pas en cause son utilisation, mais uniquement son remboursement.

M. Pierre Cordier. Cela revient légèrement au même !

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée . Il nous semblait nécessaire de prévoir une étape intermédiaire et transitoire. Le déremboursement ne sera donc effectif qu'au terme d'une période de transition. Cela permettra d'informer et d'accompagner au mieux les patients, et même de laisser le temps aux prescripteurs et aux industriels de s'adapter progressivement au déremboursement total de ces produits.

M. Pierre Cordier. Le « en même temps » est catastrophique !

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée . C'est d'ailleurs par une démarche progressive et accompagnée que le taux de remboursement était passé de 30 à 15 % le 1er janvier dernier.

M. Pierre Cordier. Vous mettez des moyens pour augmenter l’aide médicale d'État, mais pas pour continuer à rembourser l’homéopathie !

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée . J'insiste : cette décision ne remet pas en cause la commercialisation de l'homéopathie, que vous connaissez bien, ni la liberté pour les patients d'y recourir. (M. Philippe Berta applaudit.)

Données clés

Auteur : Mme Josiane Corneloup

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Pharmacie et médicaments

Ministère interrogé : Autonomie

Ministère répondant : Autonomie

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 16 décembre 2020

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