15ème législature

Question N° 36409
de M. Bruno Fuchs (Mouvement Démocrate (MoDem) et Démocrates apparentés - Haut-Rhin )
Question écrite
Ministère interrogé > Armées
Ministère attributaire > Armées

Rubrique > Parlement

Titre > Renforcement du contrôle parlementaire sur les exportations d'armes françaises.

Question publiée au JO le : 16/02/2021 page : 1286
Réponse publiée au JO le : 21/09/2021 page : 6993

Texte de la question

M. Bruno Fuchs interroge Mme la ministre des armées sur le contrôle parlementaire exercé sur les exportation d'armes françaises. Faisant suite à la mission d'information de décembre 2018 créée à l'Assemblée nationale pour répondre à la controverse sur les ventes d'armes françaises à l'Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis dans la guerre au Yémen, le rapport d'information de M. Jacques Maire et Mme Michèle Tabarot du 18 novembre 2020 visant un renforcement du contrôle parlementaire sur les exportations d'armement en France questionne le consensus français traditionnel sur l'exportation d'armement. Selon le rapport du 2 juin 2020 sur les exportations d'armement de la France publié par le ministère des armées, le montant des exportations s'élève à 8,33 milliards d'euros en 2019, le deuxième client export de la France étant les Émirats arabes unis. L'exportation de l'armement est un enjeu économique majeur ainsi qu'un instrument fondamental de la politique étrangère. Son contrôle permettrait de limiter les atteintes internationales aux droits humains et de conserver la position stratégique de la France, sans transferts de sa capacité industrielle et technologique aux concurrents sur le marché de l'armement. Or ce potentiel d'action est annulé car les pouvoirs du Parlement en matière de contrôle des exportations d'armement sont extrêmement limités, une exception française parmi les pays occidentaux. La Belgique, l'Allemagne, la Suède ou encore le Royaume-Uni se sont dotés d'un véhicule législatif permettant un contrôle a posteriori de l'activité gouvernementale. De cette manière, dans la proposition 30 du rapport sus-cité, le Parlement suggère d'instituer une délégation parlementaire bicamérale au contrôle des exportations d'armement et de donner une base juridique réglementaire à l'accès aux informations de la délégation comme précisé dans la proposition 32. Une présentation d'observations et de recommandations au Gouvernement est aussi suggérée dans la proposition 33. Ainsi, il lui demande quelles propositions du rapport d'information précité seront retenues et mises en œuvre par le Gouvernement afin d'impliquer davantage le Parlement dans le processus de contrôle des exportations d'armes.

Texte de la réponse

Le rapport de la mission d'information sur le contrôle des exportations d'armement, présenté par le député Jacques Maire et la députée Michèle Tabarot, présente les nombreux enjeux politiques, juridiques et économiques liés aux exportations de matériels de guerre (EMG). Il illustre notamment le rôle majeur que jouent les EMG pour l'équilibre et la pérennité de la base industrielle et technologique de défense (BITD) française, ainsi que pour le maintien de notre autonomie stratégique en lien avec la politique étrangère de la France. Ce rapport aborde la place jouée par les EMG dans la réponse apportée au besoin légitime de certains États partenaires de renforcer leur sécurité dans un contexte lourd de menaces. Celui-ci confirme l'efficacité et la rigueur du processus national d'attribution des licences d'exportations par la commission interministérielle pour l'étude des exportations des matériels de guerre (CIEEMG), et du contrôle assuré par le comité ministériel de contrôle a posteriori (CMCAP). Il est rappelé que ce processus garantit le strict respect de nos engagements internationaux dont les deux principaux sont la position commune de 2008 de l'Union européenne révisée en 2019 et le Traité sur le commerce des armes (TCA), entré en vigueur en 2014. Le document fait également mention des dispositifs étrangers qui, bien que marqués par des systèmes politiques et administratifs propres à chaque État, apportent des éléments de comparaison utiles à la réflexion en France. Il convient cependant de noter les spécificités françaises au regard des principes constitutionnels de séparation des pouvoirs, des prérogatives de l'exécutif pour la conduite de la politique étrangère de la France, et de la préservation des secrets protégés par la loi. Le rapport présente un ensemble de recommandations relatives à l'organisation interne et au fonctionnement du Parlement, sur lequel le Gouvernement ne saurait émettre de jugement. Il souligne la nécessité de préserver les équilibres institutionnels, fondés sur la Constitution, entre le pouvoir exécutif compétent en matière de préparation de la défense et de relations internationales, et le pouvoir législatif chargé de voter la loi, de contrôler l'action du Gouvernement, et d'évaluer les politiques publiques. Il importe en particulier de ne pas porter atteinte aux conditions de préservation du secret de la défense nationale, du secret des affaires, et de la confidentialité nécessaire aux relations entre la France et les pays partenaires stratégiques. S'agissant du contrôle parlementaire exercé sur les exportations d'armement, il convient de rappeler que le Gouvernement rend compte annuellement de ses exportations auprès de la représentation nationale dans le cadre d'un rapport extrêmement complet qui présente la politique d'exportation qu'il met en œuvre, le système de contrôle des exportations de matériels de guerre et assimilés, ainsi que les mesures de soutien. Ce rapport détaille les autorisations délivrées, les prises de commandes, mais aussi les principaux contrats ainsi que les livraisons effectuées. Ce rapport, dont la transmission a été faite le 1er juin dernier, est présenté par la ministre des Armées devant la commission de la défense nationale et des forces armées de l'Assemblée nationale. Cet exercice de transparence de l'action gouvernementale vis-à-vis de la représentation nationale permet donc au contrôle parlementaire de s'exercer a posteriori, notamment dans le cadre du débat en commission lors de la présentation dudit rapport. Cet exercice de transparence de l'action gouvernementale vient par ailleurs d'être étendu par décret n° 2021-885 du 2 juillet 2021 relatif à l'information du Parlement sur la politique d'exportation en matière d'armement et de biens à double usage, qui concerne les ministères des armées, de l'Europe et des affaires étrangères, ainsi que celui de l'économie, des finances et de la relance, qui effectueront une présentation périodique devant le Parlement pour apporter une vision d'ensemble de l'action du Gouvernement dans le domaine du contrôle des exportations de matériels de guerre et de biens à double usage, dans le plein respect des prérogatives constitutionnelles de l'exécutif et du Parlement.