Question de : Mme Cécile Untermaier
Saône-et-Loire (4e circonscription) - Socialistes et apparentés

Mme Cécile Untermaier attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargée de l'industrie, sur la situation critique des industries mécaniques. Déjà durement éprouvés par la crise sanitaire, les industriels mécaniciens subissent en effet depuis le début de l'année des hausses de prix et des allongements de délai d'approvisionnement - voire de pénuries dans certains cas - qui mettent en danger leur activité. Pour les produits issus essentiellement de la filière fonte (produits plats et notamment les tôles ou bobines galvanisées), la situation est très tendue : les délais usine sont de trois mois minimum et les importations se font rares de la part des pays tiers. Pour les produits issus de la filière électrique et dépendant en partie de la valorisation des ferrailles, la hausse spectaculaire des prix de ces dernières a démarré en décembre 2020 et se poursuit de façon très prononcée sur janvier et février 2021, d'où un impact sensible sur les prix des produits type fil machine, profilés, laminés, etc. Pour les aciers inoxydables, les délais d'approvisionnement se sont allongés et les prix des intrants sont clairement à la hausse (nickel, ferraille). Des augmentations importantes de prix sont constatées sur trois mois (septembre à décembre 2020) sur certains métaux : tôle à chaud en bobine (+ 17,8 %), barre ronde acier allié (+ 11,2 %), rond à béton (+ 12,8 %). L'indice FIM Mécastar note de son côté des hausses de l'ordre de 10 % à 40 % sur la période septembre - décembre 2020, pour différentes matières premières (aluminium, bronze en lingot, fil de cuivre, laiton en lingot...). Plus grave encore que la hausse des prix des matières, la question des délais met certains industriels mécaniciens dans l'incapacité d'assurer les livraisons. Le risque de perdre des clients, faute de pouvoir produire, est de plus en plus fort. À terme, ce sont des fermetures d'usines qu'il faudra déplorer avec les conséquences sociales qu'elles entraînent. La filière s'est engagée résolument dans le cadre des mesures du plan de relance, mais les professionnels craignent que la situation actuelle ne vienne anéantir tous les efforts financiers consentis. Aussi, elle lui demande quelles mesures le Gouvernement entend mettre en place afin de débloquer rapidement la situation.

Réponse publiée le 13 avril 2021

Plusieurs secteurs industriels (mécanique, électronique, automobile) ont signalé depuis le début 2021 une augmentation des prix de certaines matières premières - notamment l'acier - et de certains sous-ensembles métalliques, ainsi qu'un allongement des délais de livraisons. Ces industriels mettent en avant des pénuries de matières intensifiées depuis l'automne 2020, avec pour conséquence des délais d'approvisionnement très allongés, atteignant parfois entre 4 et 6 mois. Cette situation, que le Gouvernement suit avec attention, est particulièrement pénalisante pour les industries organisées en flux tendu. Cette hausse générale semble s'expliquer par le stop and go de production dû à la crise de la Covid-19. Au printemps 2020 la demande s'est effondrée, entrainant l'arrêt provisoire de nombreuses installations lourdes comme les hauts fourneaux (notamment sur les sites ArcelorMittal de Dunkerque et de Fos-sur-Mer). L'outil industriel, notamment en France et en Europe, a redémarré depuis la fin d'année 2020, et reprend progressivement ses capacités nominales, dans le respect des procédures techniques et de sécurité de remise en fonction. La filière sidérurgique est dorénavant dans une période de reconstitution des stocks après le confinement de l'an dernier et l'arrêt des capacités, et après un redémarrage très rapide de la demande en 2021, créant de facto un assèchement des stocks des utilisateurs et de la distribution. Parallèlement, certains marchés domestiques ont repris très rapidement, notamment en Chine, dès l'été 2020, et se sont accélérés en fin d'année entrainant une tension mondiale sur la disponibilité en minerai de fer, coke, ferrailles et nickel – produits majoritairement à l'étranger et surtout en Chine, et qui avaient subi une baisse de leur production pendant le plus fort de la crise du Covid-19. Dans le même temps, les réductions de capacité de production de minerai de fer chez l'industriel Vale ont contribué à l'augmentation des prix de ces matières premières : + 98 % entre avril 2020 et janvier 2021 pour le minerai de fer importé de Chine, et aujourd'hui un cours du minerai de fer au niveau mondial qui reste élevé (+ 50 % par rapport à août 2020). Avant crise, sur la période 2019, le prix du minerai de fer fluctuait entre 85 et 95 €/tonne (en constante augmentation depuis 2015), et il atteint aujourd'hui environ 150 €/tonne. Quant à l'acier, son prix d'avant crise s'établissait en moyenne à 510 €/tonne en 2019 (en augmentation depuis 2015) et atteint aujourd'hui 600 €/tonne, ce qui reste toutefois en dessous des pics atteints en 2018, où il avait atteint 680 €/tonne, pour un cours moyen de 620 €/tonne. Les perturbations actuelles sont donc liées au choc temporaire d'ajustement offre/demande et amplifiées par un manque de prévisibilité. L'anticipation d'une telle situation a été mise à mal pendant les premières semaines de la crise de la Covid-19, car les clients et utilisateurs d'acier (pour la majorité des types d'applications) ont demandé assez rapidement à l'industrie sidérurgique d'arrêter les livraisons malgré un carnet de commandes rempli et initialement confirmé. L'industrie sidérurgique a ainsi suivi ces recommandations, en ne sur-expédiant pas d'acier aux clients finaux, alors que dans le même temps les importations d'acier des pays tiers se sont poursuivies entre mars et décembre 2020, contribuant à fragiliser l'ensemble du système clients/fournisseurs en France et en Europe. En outre, le manque de visibilité des entreprises de la sidérurgie, les contraintes de trésorerie et le manque d'espace de stockage disponible ont conduit à réduire la production non seulement des hauts-fourneaux, mais aussi des fours électriques, car même si ces outils sont plus flexibles et permettent des stop and go plus fréquents, cela se fait au détriment de la qualité des produits, et peut fragiliser l'outil industriel à long terme. Selon l'Alliance des minerais, minéraux et métaux (A3M), cet écart entre offre et demande, qui concerne d'ailleurs l'ensemble de l'Europe et au-delà, devrait se normaliser dans les mois à venir. Une stabilisation des prix du minerai de fer, combinée à un ralentissement de la demande en aval (dû à un restockage progressif des produits), et à la montée en charge des outils productifs français et européens devraient permettre de parvenir à une situation stabilisée. Certains analystes tels que Platts ou Oddo BHF, affirment que les prix des aciers sont en voie de stabilisation, et A3M que les retards de livraison devraient se résorber d'ici la fin du deuxième trimestre/début de l'été. L'expérience de la brutalité de cette crise et de ses conséquence doit amener les industriels à adapter leurs pratiques, améliorer collectivement les relations clients/fournisseurs au niveau de leurs chaînes d'approvisionnement, et la prévisibilité en termes de niveau et d'horizons de commandes. Dans le cadre de son comité stratégie, la filière Mines et Métallurgie proposera ainsi aux différentes filières en aval un travail en commun, visant notamment à ajuster les pratiques par plus de solidarité entre industriels, en accélérant notamment les pratiques de concertation et de communication en amont, y compris sur les enjeux de marchés. Ce travail a d'ores et déjà été initié avec la Fédération des industries mécaniques.

Données clés

Auteur : Mme Cécile Untermaier

Type de question : Question écrite

Rubrique : Industrie

Ministère interrogé : Industrie

Ministère répondant : Industrie

Dates :
Question publiée le 23 février 2021
Réponse publiée le 13 avril 2021

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