15ème législature

Question N° 36824
de Mme Muriel Ressiguier (La France insoumise - Hérault )
Question écrite
Ministère interrogé > Transition écologique
Ministère attributaire > Transition écologique

Rubrique > environnement

Titre > 6eme extinction de masse et réchauffement climatique : l'inaction tue !

Question publiée au JO le : 02/03/2021 page : 1836
Réponse publiée au JO le : 27/07/2021 page : 6080

Texte de la question

Mme Muriel Ressiguier alerte Mme la ministre de la transition écologique sur les mesures envisagées par le Gouvernement pour respecter ses engagements climatiques. Depuis de nombreuses années maintenant, l'alerte est donnée sur l'extinction et la disparition avérée et pronostiquée de nombreuses espèces animales et sur l'érosion de la nature. Sur ces 100 dernières années, 200 espèces ont disparu, là où il aurait fallu 10 000 ans en temps normal. Ainsi, la plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES), qui regroupe 132 États membres, sous l'égide de l'ONU, donne les chiffres inquiétants de 75 % d'altération de la surface terrestre, 66 % des océans subissant des modifications de plus en plus importantes et plus de 85 % de la surface des zones humides ayant disparu. Elle indique aussi que près d'un million d'espèces sont actuellement en voie de disparition. Depuis 1993, 43 % des lions ont disparu, et ils ne sont plus qu'environ 35 000, en 10 ans la population d'orang-outangs de Bornéo a baissé de 25 %, on dénombre 18 000 girafes en moins sur 30 ans et 95 % des lémuriens se sont éteints depuis 2000. Ces extinctions concernent toutes les régions et toutes les catégories animales, aussi bien les mammifères que les amphibiens, les reptiles ou les oiseaux. Les principales causes en sont le réchauffement climatique, l'urbanisation, la déforestation, l'agriculture intensive, la dégradation de l'habitat et la surexploitation des espèces. De plus, l'incursion de l'humain sur le territoire animal ainsi que le trafic d'animaux sauvages ont aussi pour conséquence l'émergence de nombreuses épidémies transmises de l'animal à l'homme. Déjà en 2017, les scientifiques recommandaient une réduction de la consommation, l'utilisation de technologies moins agressives envers l'environnement, la fin du commerce des espèces en voie de disparition ainsi que le maintien des habitats naturels et la protection de la biodiversité. Après l'espoir suscité par l'accord sur le climat en 2015, force est de constater que 5 ans plus tard aucune action notoire n'a été menée par la France pour préserver le climat et la planète. La loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire n'a pas permis d'avancées significatives, donnant la primeur à l'économie capitaliste. De même, alors que de nombreuses propositions ont été faites suite à la Convention citoyenne pour le climat, quasiment aucune n'a été retenue dans le projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets. Les mesures les plus structurantes ont été abandonnées ou amoindries. L'avis rendu par le Haut conseil pour le climat en fait lui-même le constat et estime que le texte manque d'ambition pour respecter les objectifs fixés par la France. De nombreuses mobilisations ont eu lieu, organisées par des citoyens de tout âge et de toute catégorie sociale, inquiets pour l'avenir de l'humanité. Les marches pour le climat ont réuni des millions de personnes, des actions non violentes sont menées, par ANV-COP 21 ou Alternatiba, contre, par exemple, l'exploitation des énergies fossiles et son financement notamment par les banques françaises, l'inaction des décideurs politiques et la surproduction. De nombreux scientifiques alertent sur une 6ème extinction de masse, déjà en cours, et une étude du service européen COPERNIC révèle que 2020 fait partie des années les plus chaudes, avec un réchauffement à plus de 2,2 % en Europe, ce qui est très loin des objectifs de la convention de 2015, fixés à + 1,5 %. C'est pourquoi Mme la députée interroge Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique, sur la politique du Gouvernement. Pourquoi avoir organisé une convention citoyenne sur le climat, si c'est pour ne pas en reprendre les propositions ? Que prévoit le Gouvernement pour respecter ses engagements pris lors de l'accord sur le climat et quels moyens va-t-il y allouer ? Quelles dispositions concrètes la France va-t-elle prendre pour contribuer à la préservation des espèces et dans quel délai ? Enfin, le 3 février 2021, l'État a été condamné par le tribunal administratif de Paris à verser 1 euro symbolique aux ONG qui ont porté plainte pour « inaction climatique » car les engagements en matière de réduction de gaz à effet de serre n'ont pas été respectés. Mme la ministre a déclaré que le Gouvernement avait pris acte de la décision du tribunal administratif. Elle lui demande, concrètement, comment elle compte rattraper le retard pris par la France et quelles mesures elle va prendre pour réduire de manière efficace et rapide l'émission de gaz à effet de serre.

Texte de la réponse

Le Président de la République s'est engagé à donner suite à 146 des 149 mesures proposées par la Convention citoyenne pour le climat, via différents vecteurs. Cette mise en œuvre s'inscrira dans la durée compte tenu de la portée très large des mesures. Pour autant, début 2021, déjà 75 mesures ont été partiellement ou totalement mises en œuvre, en particulier au travers du Plan de relance et de la loi de finances pour 2021. Le projet de loi climat et résilience qui reprend les mesures d'ordre législatif issues de la Convention citoyenne pour le climat permet de mettre en œuvre, partiellement ou totalement, 46 autres mesures. Les lettres de mission climat demandant aux ministres de décliner les orientations de la Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC) de façon opérationnelle et de mettre en œuvre le plan national d'adaptation au changement climatique (PNACC) apportent une réponse claire à l'objectif d'appropriation interministérielle des ambitions relatives au climat. Elles demandent à chaque ministre concerné d'élaborer un plan d'action précis assorti d'un calendrier et de livrables et d'intégrer les orientations dans les politiques portées par leur ministère et les établissements publics sous tutelle, mais aussi dans le fonctionnement de celui-ci, afin de mettre en cohérence l'action publique avec les engagements de la France en matière de climat. En ce qui le concerne, le Ministère de la transition écologique a publié son plan d'action le 26 avril 2021. Le Ministère de l'économie, des finances et de la relance a publié le sien le 29 avril 2021. S'agissant plus particulièrement des moyens financiers, les mesures de soutien destinées à faire face à la crise sanitaire ont été l'occasion pour l'Etat de réaffirmer son exigence en matière climatique. La 3e loi de finances rectificative pour 2020 intègre des dispositions visant à ce que les prises de participation de l'Etat dans les entreprises stratégiques soient accompagnées d'engagements et objectifs de réduction des émissions de la part des entreprises. Par ailleurs, un tiers du plan de relance, soit plus de 30 milliards d'euros, est consacré à des mesures favorables à la diminution des émissions de gaz à effet de serre. La loi de finances pour 2021 prévoit des obligations de rapportage pour les entreprises concernées par les crédits de ce plan ainsi qu'une évaluation par un comité dédié. Dans le cadre de la préparation de la loi climat et résilience, le Ministère de la transition écologique a souhaité faire expertiser l'impact carbone de l'ensemble des mesures prises en matière de lutte contre le dérèglement climatique depuis le début du quinquennat. Réalisée par le Boston Consulting Group, cette étude indique notamment que le potentiel de réduction des émissions de gaz à effet de serre visé par l'ensemble des mesures déjà prises au cours du quinquennat et proposées dans le projet de loi Climat et Résilience est globalement à la hauteur de l'objectif de 2030, sous réserve de leur exécution intégrale et volontariste. Face au déclin de la biodiversité, la France agit sur son territoire et au-delà de ses frontières. Le Gouvernement a ainsi adopté le 12 janvier 2021 une nouvelle stratégie nationale des aires protégées pour les 10 ans à venir. Pour la première fois, une stratégie des aires protégées unifiée pour la France hexagonale et les territoires d'outre-mer et qui intègre à la fois les enjeux terrestres et maritimes est adoptée. Elle prévoit le doublement des zones humides placées sous protection forte. Elle concrétise l'ambition du président de la République de protéger dès 2022 30 % de notre territoire national et des espaces maritimes sous juridiction, dont un tiers sous protection forte. Cette nouvelle stratégie sera accompagnée de trois plans d'actions nationaux qui seront déclinés et alimentés par des travaux dans les territoires. Lors du One Planet Summit du 11 janvier 2021, le président de la République avait annoncé que les moyens humains consacrés à la gestion des aires protégées par les opérateurs de l'Etat seraient renforcés sur les trois années à venir. Barbara Pompili et Bérangère Abba ont confirmé que, dès 2021, les aires protégées bénéficieront d'une augmentation de 40 ETP qui viendront renforcer les effectifs des parcs nationaux et des parcs naturels marins gérés par l'Office français de la biodiversité. Ce renforcement des effectifs des opérateurs de l'Etat, et notamment des parcs nationaux et parcs naturels marins, s'inscrit dans le cadre de la Stratégie nationale des Aires protégées et complète les efforts de moyens déjà prévus par l'Etat en faveur de cette stratégie, notamment au travers du plan France Relance (60 millions d'euros au titre des aires protégées, pour restaurer, accueillir, accompagner la transition des pratiques, mieux connaître), et de la loi de finances 2021 (augmentation de 11 millions d'euros pour accompagner la création de nouvelles aires protégées). Outre ces moyens en faveur des aires protégées, l'engagement de l'Etat à travers le plan France Relance se traduit par :135 millions d'euros pour la restauration écologique (rétablissement de continuités écologiques terrestres et aquatiques notamment sur le Rhin, en particulier les secteurs prioritaires de restauration identifiés dans les schémas régionaux et atlas de la biodiversité communale pour la biodiversité),40 millions d'euros pour la protection du littoral, pour accompagner la transition de modèles de gestion des espaces littoraux vers davantage de résilience face aux effets du changement climatique (lutte contre l'érosion et valorisation du patrimoine littoral),50 millions d'euros sur la mise en place de haies,250 millions d'euros pour la gestion de l'eau, dont une grande partie est bénéfique à la biodiversité. La stratégie nationale pour la biodiversité (SNB), adoptée en 2010 pour la période 2011-2020, concrétise la mise en œuvre par la France de la Convention sur la biodiversité biologique (CDB). L'élaboration de la prochaine SNB, pour la période 2021-2030, a été lancée par Bérangère ABBA le 15 mars 2021. La secrétaire d'Etat mène, dans toutes les régions, en concertation avec les comités régionaux de la biodiversité, une large consultation des acteurs de terrain. Ces rencontres visent à réunir et consolider la matière première essentielle à la rédaction de la SNB. Mme ABBA a ainsi fait le choix de ne pas rédiger la stratégie avant d'avoir pris connaissance de tous ces retours. Cette consultation durera jusqu'au 10 mai et constituera le socle de la future stratégie. Elle sera enrichie dès le mois de mai par une consultation auprès du grand public sur la plateforme www.biodiversité.gouv.fr afin d'associer aussi les citoyens à la démarche. Elle intégrera les dimensions Terre/Mer, Métropole/Outre-Mer soutenue par un engagement politique et interministériel fort. La future stratégie devra être ancrée dans les territoires et dans la vie quotidienne des Français, à travers des mesures concrètes, de nature à répondre aux enjeux d'aujourd'hui, dont la crise sanitaire est un révélateur. La prochaine stratégie nationale pour la biodiversité devra enfin ouvrir les portes des politiques sectorielles afin que le vivant devienne une composante positive de toutes les politiques sectorielles. Cette ambition, la France la porte à l'international. Alors que les forêts abritent 75 % de la biodiversité mondiale, la Stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée (SDNI) vise à mettre fin, d'ici à 2030, à l'importation de produits forestiers ou agricoles non durables, contribuant directement ou indirectement à la déforestation au-delà de nos frontières. cette fin, Bérangère ABBA a lancé le 20 janvier la plateforme multisectorielle d'observation et de lutte contre la déforestation importée. Cet outil unique en Europe et dans le monde vise à mieux informer les consommateurs sur les produits qui portent un risque de déforestation importée et sur l'engagement des grandes entreprises de la distribution dans ce domaine. Enfin, après l'organisation du One Planet Summit en janvier 2021, l'investissement de la France ne se dément pas. Elle participe ainsi pleinement à la préparation des grandes échéances mondiales de 2021 relatives à la biodiversité :le congrès mondial de la nature de l'UICN reporté du 3 au 11 septembre 2021 à Marseille ;la 15e conférence des Parties à la convention sur la diversité biologique, qui se tiendra en octobre en Chine, afin de construire un nouveau cadre mondial pour l'environnement.