Rubrique > politique extérieure
Titre > Élection présidentielle de 2021 au Congo-Brazzaville et processus démocratique
M. Sébastien Nadot interroge M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur l'élection présidentielle en République du Congo dont le premier tour aura lieu le 21 mars 2021. Partenaire privilégié du Congo-Brazzaville en tant que premier donateur d'aide publique au développement, la France ne peut ignorer le difficile contexte politique et social ainsi que la dérive autocratique à l'œuvre dans ce pays depuis de nombreuses années. Bien qu'il soit signataire de la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance rédigée en 2007, l'État congolais n'a jamais cru bon de la ratifier. Pour cause, le Président Denis Sassou-Nguesso cumule 37 années de pouvoir et brigue aujourd'hui un septième mandat. M. Sassou-Nguesso ne souhaitait pas s'encombrer de l'obligation faite par l'article 23 de cette Charte de ne pas amender ou réviser la Constitution d'une manière qui « porte atteinte aux principes de l'alternance démocratique ». En effet, en 2015 il a organisé un référendum portant sur une nouvelle constitution afin de se maintenir au pouvoir pour au moins dix années supplémentaires. Face aux importantes manifestations qui ont marqué cette séquence constitutionnelle et l'élection présidentielle de l'année suivante, M. Sassou-Nguesso a choisi la force pour taire toute contestation. Ainsi, l'Observatoire congolais des droits de l'Homme (OCDH) dénombrait 46 morts, 69 blessés et des dizaines de disparus parmi les manifestants et l'emprisonnement des principaux opposants politiques comme Jean-Marie Michel Mokoko, André Okombi Salissa et Paulin Makaya. Si le Congo semble offrir une stabilité dans une région marquée par les conflits en République centrafricaine et en République démocratique du Congo, l'actualité récente rappelle que ce régime ne tient que par l'usage de la force. Récemment, l'éviction de deux rédacteurs en chef en février 2021, Raymond Malonga et Henri-Michel Ngakeni, jugés trop virulents à l'approche de l'élection, a confirmé la réduction constante de l'espace civique et des libertés. D'autre part, les évêques de l'Église catholique ont publiquement émis leurs « sérieuses réserves » quant à la crédibilité de l'élection à venir dans ce pays pétrolier où 40 % de la population vit sous le seuil de pauvreté. Le Président Emmanuel Macron a émis plusieurs fois le souhait d'un renouvellement des élites politiques en Afrique sans que le cas du Congo-Brazzaville, où le seul horizon politique semble être une transmission dynastique du pouvoir, ne soit mis à l'agenda. La faible crédibilité du processus électoral en cours ne semble pas faire réagir la diplomatie française. Il lui demande s'il compte garder le silence sur cet important enjeu de droits humains et de démocratie, comme ce fut le cas à l'occasion des récentes élections guinéenne, ivoirienne et togolaise, ou bien au contraire accompagner aux côtés des partenaires européens un véritable programme d'appui à la réforme électorale, à la lutte contre l'impunité et de réconciliation nationale passant par la libération des prisonniers politiques au Congo-Brazzaville.