Question écrite n° 36867 :
Situation préocupante des enseignants français en Turquie

15e Législature

Question de : Mme Sonia Krimi
Manche (4e circonscription) - La République en Marche

Mme Sonia Krimi alerte M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la situation préoccupante des enseignants français de l'université de Galatasaray. On a appris les récentes mesures prises par les autorités turques vis-à-vis de l'université francophone de Galatasaray située à Istanbul. Dès le mois de décembre 2020, le Conseil de l'enseignement supérieur (YÖK), institution placée sous l'autorité de la présidence de la République, réclamait de tous les enseignants français une maîtrise de la langue turque égale ou supérieure au niveau B2. Selon la Turquie, ces nouvelles conditions imposées aux enseignants français répondent à la récente réforme, en France, des enseignements en langues et culture d'origine, les Elco, une réforme mise en œuvre depuis la rentrée 2020 dans le cadre de la lutte contre le « séparatisme islamiste » par le Président Emmanuel Macron. Créés dans les années 1970 pour permettre aux enfants d'immigrés de garder le contact avec la culture d'origine de leurs parents, les Elco sont délivrés par des enseignants de neuf pays partenaires, dont la Turquie. Selon le ministère français de l'éducation, entre 12 000 et 15 000 élèves d'origine turque profitent de ces cours. Mais certains profs recrutés par ces pays sont soupçonnés de promouvoir le communautarisme et de favoriser un éloignement des valeurs républicaines. Ces accords sur les Elco ont donc été renégociés avec les pays partenaires sur de nouveaux critères d'admission, dont un niveau minimum B2 de maîtrise de la langue française. En réponse à cela, le « YÖK » prend cette décision éminemment politique. Les enseignants français se voient refuser la prolongation de leur titre de séjour et doivent s'adapter à cette situation d'irrégularité. Cela signifie ne pas pouvoir quitter le territoire turc, ni pouvoir y entrer. La situation s'avère particulièrement difficile pour les nouveaux arrivants, qui n'ont pas de numéro de permis de séjour à faire valoir dans leurs démarches administratives. Ainsi, elle souhaite savoir par quels moyens le Gouvernement compte agir pour mettre fin à ces agissements insensés de la part des autorités turques, qui remettent profondément en cause l'existence de cet accord bilatéral entre la France et la Turquie depuis 1992.

Réponse publiée le 11 mai 2021

Les autorités françaises suivent avec une grande attention la situation des enseignants français de l'université Galatasaray. Depuis la rentrée académique de septembre 2020, les demandes d'obtention ou de renouvellement de permis de travail, l'ikamet, concernant 21 des 29 enseignants-chercheurs détachés à Galatasaray n'ont pas obtenu de réponse, ce qui les place en difficulté puisqu'ils n'ont pas de titre de séjour valide. Interrogé par notre ambassade, le Conseil de l'enseignement supérieur turc (YÖK), autorité nationale compétente pour l'enseignement supérieur, lui a fait part de sa décision de demander aux enseignants-chercheurs français à Galatasaray de présenter des niveaux de compétences tels que définis par le règlement des universités turques, s'agissant en particulier de la connaissance de la langue turque. Selon la partie turque, l'obtention du niveau B2 du cadre européen commun de référence pour les langues (CECRL) conditionnerait l'obtention de l'ikamet. En outre, un niveau doctorat est désormais demandé aux enseignants français pour pouvoir enseigner au-delà des cours préparatoires et de la première année de licence. Dans ce contexte, la France a contesté le caractère réglementaire et légal de ces dispositions qui contreviennent à l'accord intergouvernemental de 1992. Plusieurs démarches ont été effectuées en vue de parvenir à une solution, en demandant à la partie turque de revenir à un cadre qui respecte l'accord. Celui-ci dispose, à son article 4, que "le français est la langue de l'enseignement dans l'établissement" de Galatasaray. L'ensemble des personnels concernés a été reçu à plusieurs reprises, par l'ambassadeur de France à Ankara, le consul général de France à Istanbul et le conseiller de coopération et d'action culturelle de l'ambassade. Grâce aux interventions menées au plus haut niveau de l'État, le YÖK s'est engagé, début mars, à la délivrance de permis de séjour d'une validité d'un an à tous les enseignants-chercheurs, dans les meilleurs délais. Cet engagement a été confirmé par la délivrance effective de l'ensemble des titres aux personnels concernés. En toute hypothèse, il ne règle pas le problème de manière définitive. Le ministère de l'Europe et des affaires étrangères continuera donc de s'investir pleinement pour trouver une solution à l'ensemble des difficultés auxquelles sont confrontés les enseignants-chercheurs français à l'université Galatasaray. Pour rappel, la France et la Turquie ont conclu, en septembre 2020, un accord réformant le dispositif des enseignements de la langue turque à l'école élementaire en France, dans le cadre des règles qui régissent les enseignements internationaux de langues étrangères (EILE) qui se sont substitués aux enseignements de langue et de culture d'origine (ELCO).

Données clés

Auteur : Mme Sonia Krimi

Type de question : Question écrite

Rubrique : Politique extérieure

Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères

Ministère répondant : Europe et affaires étrangères

Dates :
Question publiée le 2 mars 2021
Réponse publiée le 11 mai 2021

partager