Question écrite n° 37122 :
Féminicides - guichet unique pour les familles des victimes

15e Législature

Question de : Mme Émilie Bonnivard
Savoie (3e circonscription) - Les Républicains

Mme Émilie Bonnivard alerte M. le ministre de l'intérieur sur les conséquences des féminicides pour leurs familles. Selon les chiffres de l'Observatoire national des violences faites aux femmes, ce sont 146 femmes qui ont été tuées par leur conjoint ou ex-compagnon en 2019. Les chiffres pour 2020 font encore état de 90 femmes tuées. Cette très légère baisse du nombre de féminicides ne doit pas occulter la réalité de cet échec sur la protection des femmes où une femme décède tous les trois jours sous les coups de son compagnon ou ex-compagnon. Or, derrière ces chiffres terribles, ce sont des familles exemplaires qui doivent faire face, seules, aux conséquences de ces crimes ! Ce sont les familles qui doivent faire face à un quotidien totalement bouleversé. Lorsque la mère est décédée, le père en prison, les enfants doivent être placés auprès des proches, qui sont démunis car ils ne reçoivent aucune aide, quelle qu'en soit la nature, psychologique ou financière. Ces familles qui recueillent ces enfants dans leur propre foyer ne reçoivent pas d'aide en vue des démarches, pourtant difficiles : s'acquitter de l'inscription scolaire, démarche si compliquée lorsqu'aucun document administratif n'est disponible car encore dans la maison sous scellés, trouver un psychologue pour les enfants, dont le coût mensuel ne peut pas toujours entrer dans le budget, habiller ces enfants, etc. C'est pourquoi elle lui demande quelles mesures il envisage pour répondre à cette urgence des dégâts collatéraux oubliés. Il convient d'apporter sans délai un soutien à ces familles afin d'alléger leurs difficultés et démarches administratives, ce qui pourrait être fait à travers un « guichet unique », comme il en existe pour les victimes du terrorisme.

Réponse publiée le 20 juillet 2021

La lutte contre les violences conjugales, et en particulier la lutte contre les violences faites aux femmes, est l'une des priorités d'action du Gouvernement. Conscient de la nécessité de développer encore davantage la prévention de ces drames, le ministère de la justice a diffusé le 9 mai 2019 une circulaire relative à l'amélioration du traitement des violences conjugales et à la protection des victimes. Les instructions de politique pénale délivrées aux procureurs de la République rappellent le rôle qu'ils doivent jouer en matière de protection des victimes, et notamment la prise en compte des mineurs exposés aux violences conjugales et en particulier des enfants victimes collatérales de l'homicide de l'un ou de leurs deux parents. Dans cet objectif, le protocole de prise en charge des enfants dans le cadre d'homicides conjugaux mis en place depuis 2014 à Bobigny, a été diffusé à l'ensemble des juridictions et sa généralisation encouragée. Le parquet général de Lyon a ainsi conclu récemment une convention régionale pour qu'un tel protocole, qui permet l'accueil de ces enfants victimes dans une structure hospitalière en urgence afin d'évaluer leur situation et mettre en place un suivi, s'applique à l'ensemble des juridictions du ressort de la cour. Le parquet de Paris a mis en place également un tel dispositif de protection des enfants. Outre les actions engagées au travers des analyses précises de ces drames demandées aux parquets et parquets généraux de manière à mieux prévenir leur survenance, le ministère de la justice poursuit son action en faveur de la protection des victimes de violences conjugales en renforçant les dispositifs existants, tels que l'éviction des conjoints violent, l'hébergement en urgence, le déploiement des TGD, la systématisation de l'évaluation personnalisée des victimes et des enfants mineurs, ou le recours à l'ordonnance de protection. Enfin, le bracelet électronique anti-rapprochement est généralisé à toutes les juridictions, y compris les territoires ultra-marins, depuis la mi-décembre 2020. Le ministère soutient activement le déploiement de ces dispositifs en juridictions par la diffusion d'outils pratiques et des visio-conférences régulières avec les tribunaux. Par ailleurs, Le ministère de la Justice qui coordonne l'action gouvernementale en matière d'aide aux victimes développe actuellement l'aide aux victimes en urgence, autour d'un cadre d'intervention commun à l'ensemble des associations d'aide aux victimes agréées par le ministère de la Justice, afin d'apporter une aide globale et individualisée aux victimes et à leurs proches dans les situations d'une particulière gravité, et ce en journée comme le soir et le week-end. Ainsi, pour répondre à ces besoins, le garde des Sceaux dans la circulaire CRIM 2020-19/E1 du 22/09/2020 relative à la politique pénale en matière de lutte contre les violences conjugales a appelé de ses vœux la généralisation des dispositifs d'aide en urgence développés dans quelques territoires « afin de restaurer un lien de proximité et de confiance des victimes dans les institutions ». Portés par les associations d'aide aux victimes agréées, ces dispositifs d'urgence sont activés par le procureur de la République au titre de l'article 41 alinéa 3 du Code de procédure pénale, dès la survenance de l'évènement. Dans le respect des nécessités de l'enquête, des professionnels formés se déplacent là où se trouvent la victime et ses proches (au commissariat, à domicile, à l'hôpital…), afin de leur apporter le soutien et l'aide appropriée et ce, y compris lorsque les services publics sont pour la plupart fermés. Outre le soutien moral apporté aux proches dans les suites de l'annonce du décès, les équipes de professionnels (juristes, travailleurs sociaux, psychologues cliniciens tous formés en victimologie et aide aux victimes), apportent une aide concrète dans les démarches juridiques, administratives, funéraires, et restent disponibles le temps nécessaire, avant de passer progressivement le relais aux professionnels assurant une prise en charge à long terme (avocat, services d'aide aux victimes « classiques », services médico-sociaux). Cette aide immédiate se veut facilitatrice et adaptée à la singularité de chaque situation. Ces dispositifs, qui sont notamment mis en œuvre au bénéfice des enfants de victimes de violences conjugales, répondent ainsi aux besoins des familles de victimes qui doivent pouvoir disposer d'un interlocuteur unique, en mesure de les accompagner dans les différentes démarches à accomplir, et de répondre à leur question. Cette intervention immédiate et pro-active, inscrite dans une dynamique partenariale, est l'une des priorités de la politique publique d'aide aux victimes pour les années à venir. Elle est également consacrée dans la nouvelle stratégie nationale de prévention de la délinquance 2020-2024 et implique une nécessaire coordination de l'ensemble des acteurs institutionnels et associatifs, sur le plan national comme sur les territoires. A cet effet, ainsi que Monsieur le Premier Ministre l'a annoncé, les instances locales de pilotage et de coordination vont être renforcées au profit d'une synergie plus grande des acteurs de terrain permettant ainsi de mettre en œuvre une prise en charge pluridisciplinaire des victimes.

Données clés

Auteur : Mme Émilie Bonnivard

Type de question : Question écrite

Rubrique : Aide aux victimes

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Justice

Dates :
Question publiée le 16 mars 2021
Réponse publiée le 20 juillet 2021

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