15ème législature

Question N° 37348
de M. Paul-André Colombani (Libertés et Territoires - Corse-du-Sud )
Question écrite
Ministère interrogé > Transition écologique
Ministère attributaire > Agriculture et alimentation

Rubrique > agriculture

Titre > Sauvegarde de la filière apicole corse

Question publiée au JO le : 23/03/2021 page : 2534
Réponse publiée au JO le : 05/10/2021 page : 7357
Date de changement d'attribution: 30/03/2021
Date de signalement: 20/07/2021

Texte de la question

M. Paul-André Colombani alerte Mme la ministre de la transition écologique sur la situation particulièrement alarmante de la filière apicole en France et plus particulièrement en Corse. En effet, cette filière connaît depuis plusieurs année un effondrement de la production totale de miel, qui s'explique non seulement par l'impact du changement climatique sur le cheptel insulaire mais aussi par l'augmentation du nombre d'apiculteurs en AOP qui sont deux fois et demi plus nombreux aujourd'hui qu'en 1999. La diminution progressive de la population des abeilles est due à une atteinte contre la biodiversité (utilisation de pesticides comme le glyphosate et les néonicotinoïdes, importation d'espèces de prédateurs dangereux comme les frelons asiatiques) et menace l'espèce endémique d'abeille corse permettant la production d'un miel unique. Sa protection est donc essentielle. Les exploitations déjà bien installées sont en grande difficulté depuis plusieurs années et les jeunes installations, dont les investissements sont très importants, sont menacées à très court terme. Les difficultés sont telles que la filière apicole corse est menacée dans sa globalité, et sans le maintien de cette profession qui prend soin des pollinisateurs essentiels, tout laisse à penser qu'il n'y aura bientôt plus d'abeilles en Corse. À ces difficultés structurelles s'ajoutent des difficultés conjoncturelles provoquées par l'épidémie de covid-19 qui amplifie le manque de trésorerie des exploitations apicoles à court terme. La saison 2019 n'a pas permis aux exploitations de rémunérer l'apiculteur pour son travail et durant l'année 2020 les exploitations ont assumé seules financièrement les travaux indispensables au maintien du cheptel apicole de l'île. L'isolement géographique de la Corse a accentué ces phénomènes, particulièrement avec d'importants problèmes d'approvisionnement de matériel apicole qui a pénalisé les apiculteurs. De plus, les problèmes de vente (ainsi que les livraisons de produits) se font d'ores et déjà sentir pour 93 % des apiculteurs insulaires. Bien que des cas de commercialisation en direct se développent, cela ne permettra pas d'absorber le même volume de vente que pendant une année « classique » en saison touristique. Enfin, d'après l'enquête nationale ADA France lancée au mois de mars 2020 et les données régionales obtenues, la tendance générale pour les apiculteurs insulaires montre un impact financier « important à très important » à court et moyen termes, puis « moyen à important » à long terme. Il l'interroge donc sur les mesures que le Gouvernement compte mettre en œuvre à la fois pour préserver la population d'abeilles insulaires qui est un bien commun précieux et pour sauvegarder la filière apicole insulaire.

Texte de la réponse

Le ministère de l'agriculture et de l'alimentation est attentif à la situation de la filière apicole au regard de son rôle crucial tant pour la production de miel et des autres produits de l'apiculture que pour la pollinisation, dont dépend le développement économique de nombreuses autres productions végétales. Les soutiens à la filière prennent notamment la forme d'une aide au renouvellement du cheptel apicole, qui constitue une mesure majeure pour le maintien et le développement des exploitations apicoles. Il s'agit d'une action financée dans le cadre du programme apicole européen (PAE), qui représente le principal levier de financement pour améliorer les conditions de production et de commercialisation du miel et des autres produits de l'apiculture. Sur la période 2020-2022, ce programme, financé à 50 % par des crédits nationaux et à 50 % par des crédits européens, bénéficie d'un budget de 21,3 millions d'euros (M€) dont 1,7 M€ sont consacrés aux investissements des apiculteurs pour renouveler leur cheptel. Par ailleurs, l'accompagnement de la filière à long terme s'appuie sur les autres mesures du PAE : elles financent également des actions de lutte contre varroa, d'assistance technique, de formation des apiculteurs, ainsi que la majeure partie des actions de l'institut technique dédié à l'apiculture, qui a reçu un soutien financier significatif de l'État. En ce qui concerne l'accompagnement individuel des exploitants apicoles, ces derniers peuvent se rapprocher de la cellule d'accompagnement des agriculteurs en difficulté du département. Cela permettra d'étudier la solution la plus adaptée et pouvant contribuer à améliorer la situation, notamment grâce aux dispositifs d'accompagnement spécifiquement dédiés aux agriculteurs rencontrant des difficultés. Plus globalement, la mise en œuvre par la France de la politique agricole commune permet de favoriser le développement de cultures et de pratiques favorables à l'abeille, aussi bien dans le cadre du premier pilier, à travers le « verdissement », les surfaces d'intérêt écologique (SIE), la diversification des cultures et les soutiens couplés aux protéagineux et aux légumineuses, que du second pilier, au moyen des mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC). Demain, le plan stratégique national confortera les soutiens du second pilier sur les MAEC, intégrera les SIE et la diversité des cultures dans le socle de la conditionnalité, et mettra en place un nouvel écosystème comportant, par exemple une incitation à l'implantation d'infrastructures agroécologiques avec des jachères mellifères, un plus fort développement des cultures et pratiques favorables aux pollinisateurs. En outre, dans le cadre de l'élaboration du plan national en faveur des pollinisateurs et de repollinisation, porté conjointement par les ministères chargés de l'agriculture et de l'environnement, une concertation nationale de l'ensemble des parties prenantes a été lancée en décembre 2020, afin de définir collectivement des pistes d'actions concrètes. Le plan, mis à la consultation du public fin juin 2021, a pour objectif de mobiliser l'ensemble des acteurs et des leviers en faveur des pollinisateurs au travers d'actions qui concourent à leur préservation et à leur valorisation. Il s'appuiera sur l'ensemble des acteurs concernés sur le territoire national. Enfin, les actions qui sont déployées depuis 2020 par l'interprofession Interapi reconnue par les pouvoirs publics en 2019 viennent utilement en appui de la filière dans son ensemble, et notamment pour accompagner le développement de la production et de la commercialisation des miels.