Fermetures de caisses de la Banque de France
Question de :
M. Éric Coquerel
Seine-Saint-Denis (1re circonscription) - La France insoumise
M. Éric Coquerel alerte M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance sur la fermeture annoncée en janvier 2021 d'au moins 14 caisses sur les 37 caisses de tri. En 40 ans, le nombre de caisses est ainsi passé de 210 à seulement 23. Ce plan de restructuration au sein de la banque centrale est inquiétant à plusieurs titres. La première question à poser est celle des emplois mis en danger par ces fermetures de caisse. Le gouverneur a d'ores et déjà admis la suppression de 134 postes à laquelle pourraient s'ajouter 600 suppressions d'emploi d'ici 2024 selon l'intersyndicale. S'il a été annoncé que les agents concernés devraient garder leur emploi au sein de la Banque de France, aucune garantie n'a pour autant été donnée. Les mobilités contraintes inquiètent tout particulièrement les syndicats, d'autant plus dans ce climat d'incertitude anxiogène persistant depuis des années concernant la pérennité des postes au sein de la Banque de France. La seconde crainte que souhaite partager M. le député concerne les conséquences de ces fermetures de caisses sur les transports de fonds. Les trajets des fourgons vont à la fois devoir couvrir de plus grandes distances et transporter des montants plus importants, ce qui fait craindre une multiplication du nombre d'attaques. À cette inquiétude se joint celle de l'avancée d'un processus de privatisation de l'entretien de la monnaie via les transporteurs de fonds privés, auxquels une place de plus en plus importante est donnée. La Banque de France va notamment mettre en place des « stocks auxiliaires de billets » (SAB), c'est-à-dire qu'une part des stocks de billets sera localisée chez ces transporteurs privés et non plus directement au sein de la Banque centrale, ce à quoi s'ajoute l'augmentation de la part de tri de la monnaie confiée aux transporteurs de fonds privés. M. le député interroge donc M. le ministre sur ce nouveau pas vers la privatisation des missions de la Banque de France et sur tous les risques que ce processus fait peser en termes de sécurité et de souveraineté. Il l'interroge également sur l'affaiblissement et la fragilisation du réseau fiduciaire de la Banque de France via ces fermetures de caisses ainsi que sur les emplois qui y sont liés et ainsi mis en danger.
Réponse publiée le 12 octobre 2021
Le Gouvernement porte une attention particulière aux réorganisations territoriales de la Banque de France. Il convient de rappeler que la Banque de France est garante de l'entretien de la monnaie fiduciaire et de la qualité de sa circulation, elle n'a cependant pas le monopole du tri des espèces. C'est ainsi que les acteurs privés de la filière fiduciaire (transporteurs de fonds et établissements de crédit) ont développé depuis plusieurs années une activité de recyclage de la monnaie, sous le contrôle et la supervision de la Banque de France dans le cadre de sa mission de « garante de la qualité » telle que prévue par le code monétaire et financier. La Banque de France dispose actuellement d'un réseau de 36 caisses, qui conserve pour fonction d'assurer la distribution d'espèces aux établissements bancaires par l'intermédiaire des transporteurs de fonds. Or, notamment sous l'effet de la dématérialisation des moyens de paiement et du développement de l'activité de recyclage de billets directement par les transporteurs de fonds et les établissements de crédit, la distribution d'espèces, déjà en baisse depuis plusieurs années (-14% pour les billets entre 2014 et 2019), devrait continuer à se réduire très sensiblement (estimé à -30% supplémentaires pour les billets d'ici 2025). Face à ces phénomènes, le réseau actuel est surdimensionné. Certaines caisses sont déjà en situation de sous-emploi malgré la fermeture d'une vingtaine de caisses départementales entre 2013 et 2018. Pour autant, ces fermetures n'ont en rien affecté les conditions dans lesquelles la banque remplit sa mission de garante de la qualité de la circulation de la monnaie fiduciaire ainsi que, plus globalement, de la bonne alimentation en espèces de l'économie. Ces fermetures ont été réalisées dans le cadre du plan de modernisation de la Banque de France, Ambitions 2020, récemment achevé et qui a permis à la Banque de France de se transformer en profondeur pour s'adapter aux mutations en cours. Afin de prendre en compte ces évolutions, une décision a été prise dans le cadre du nouveau plan stratégique 2020-2024 afin de rationaliser le réseau de caisses fiduciaires. Cette mesure nécessaire induit pour les transporteurs de fonds un allongement des temps indispensables pour s'approvisionner auprès des caisses de la Banque de France. Elle s'accompagne cependant de réflexions pour en parer les effets notamment en fluidifiant la circulation des billets. Plusieurs pistes sont ainsi actuellement à l'étude comme la création d'espaces dédiés aux stocks auxiliaires de billets (SAB) plus connu sous l'acronyme NHTO (notes-held-to-holder en anglais) qui se situeraient au sein des centres forts des transporteurs de fonds. Cette solution permettrait à la Banque de France de disposer de dépôts avancés et de relever le plafond de recyclage de stockage des billets autorisés. Il convient de souligner que la restructuration précitée s'appuie principalement sur le non-remplacement des agents partant en retraite (indemnisation ou accompagnement renforcé) et sur d'importantes mesures d'accompagnement social (par exemple de mobilité fonctionnelle (promotion interne) avec une mobilité géographique aussi limitée que possible). Cette nouvelle réforme permettra à la Banque de France d'exercer avec une efficacité accrue toutes ses missions en s'appuyant sur des implantations rénovées et dynamiques de son réseau qui demeure le plus dense du système européen de banques centrales.
Auteur : M. Éric Coquerel
Type de question : Question écrite
Rubrique : Administration
Ministère interrogé : Économie, finances et relance
Ministère répondant : Économie, finances et relance
Dates :
Question publiée le 30 mars 2021
Réponse publiée le 12 octobre 2021