plateformes de location et fraude fiscale
Question de :
M. Charles de Courson
Marne (5e circonscription) - UDI, Agir et Indépendants
Question posée en séance, et publiée le 6 décembre 2017
PLATEFORMES DE LOCATION ET FRAUDE FISCALE
M. le président. La parole est à M. Charles de Courson, pour le groupe UDI, Agir et indépendants.
M. Charles de Courson. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie et des finances. Monsieur le ministre, d'après des informations parues dans la presse, la société Airbnb offre la possibilité aux propriétaires d'appartements dont elle s'occupe de la location de leur verser le loyer net qui leur revient via une carte de crédit rechargeable émise depuis Gibraltar par la société Payoneer. Cette société américaine a obtenu le statut d'electronic money institution, c'est-à-dire qu'elle est autorisée à délivrer des moyens de paiement dans toute l’Union européenne. Et le compte adossé à cette carte de crédit prépayée, qu'on peut même ouvrir sous un faux nom car la plateforme ne vérifie pas l'identité des clients, échappe aux accords d'échange d'informations bancaires et donc à l'administration fiscale.
Le risque est donc considérable que ce mécanisme encourage la fraude fiscale internationale pour les résidents français. On peut même se demander s'il n'y a pas là un risque de complicité de blanchiment de fraude fiscale. Ce risque est d'autant plus important que l'amendement Cherki, voté fin 2016 mais applicable au 1er janvier 2019 seulement, qui rendait obligatoire la transmission, par les plateformes de location, de manière automatique, au fisc français du montant des revenus versés aux propriétaires n'est toujours pas applicable du fait de l'absence de décret d'application. Aussi, ma question est très simple : quels dispositifs le Gouvernement entend-il mettre en œuvre pour éviter que ce mode de paiement soit un outil de fraude fiscale internationale ? Plus précisément, le Gouvernement compte-t-il accélérer la publication du décret d'application de l'amendement Cherki et avancer au 1er janvier 2018 la date d'application de ce dernier ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UAI, LR, NG et FI ainsi que sur quelques bancs du groupe REM.)
M. Ugo Bernalicis. Il faut en parler aux questeurs qui encouragent le recours à Airbnb !
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'action et des comptes publics.
M. Thibault Bazin. …et de la hausse de la CSG !
M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics. Monsieur le député, vous avez raison, il faut traduire l'esprit de l'amendement Cherki dans la loi. Cependant, il ne s'agit pas uniquement de publier un décret ; il faut aussi compléter l'appareil législatif. Depuis le 12 octobre, la DGFIP et les services de Bercy travaillent, à ma demande, avec les représentants des plateformes afin que le Gouvernement puisse vous soumettre cette transposition législative au mois de janvier ou de février, dans le texte que Bruno Le Maire vous présentera.
M. Ugo Bernalicis. C'est trop timide !
M. Gérald Darmanin, ministre . Ainsi, dès 2019, les plateformes devront déclarer quels revenus elles versent à quel particulier ; l'esprit de l'amendement Cherki sera ainsi complètement traduit dans la loi et il n'y aura plus de possibilité d'optimisation fiscale, voire – vous avez raison de vous poser la question ! – de complicité de blanchiment.
M. Ugo Bernalicis. En attendant, il y a de la fraude !
M. Gérald Darmanin, ministre. Il me semble que je vous ai rassuré quant à l'avenir. Pour ce qui est de l'année 2018, nous avons découvert comme vous cette possibilité offerte par la plateforme Airbnb. J'ai donc pris, avec Bruno Le Maire, la responsabilité de convoquer les dirigeants d'Airbnb la semaine prochaine à Bercy pour vérifier la conformité de leurs pratiques avec notre droit. J'ai demandé aux services fiscaux de regarder avec la plus grande…
M. Jean-Luc Mélenchon. Vigilance !
M. Gérald Darmanin, ministre. …vigilance – exactement, merci beaucoup ! (Rires) – si les dispositifs mis en place par la plateforme correspondent exactement à ce qui est autorisé, afin que chaque contribuable français qui bénéficierait de cette carte adossée à un compte ouvert à Gibraltar puisse être parallèlement déclaré au fisc français. Vous avez donc tout à fait raison, monsieur le député : pour 2018, il s'agit de mener un travail très fin pour éviter toute fraude ou optimisation fiscale contraire à la loi ; pour 2019, il s'agit d'appliquer l'amendement Cherki à tous les revenus déclarés par les plateformes. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM, MODEM et UAI.)
M. Thibault Bazin. Notamment à Paris !
Auteur : M. Charles de Courson
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Impôts et taxes
Ministère interrogé : Action et comptes publics
Ministère répondant : Action et comptes publics
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 6 décembre 2017