15ème législature

Question N° 37
de M. Olivier Faure (Nouvelle Gauche - Seine-et-Marne )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Premier ministre
Ministère attributaire > Premier ministre

Rubrique > défense

Titre > démissoin du chef d'état-major des armées

Question publiée au JO le : 20/07/2017
Réponse publiée au JO le : 20/07/2017 page : 1684

Texte de la question

Texte de la réponse

DÉMISSION DU CHEF D'ÉTAT-MAJOR DES ARMÉES


M. le président. La parole est à M. Olivier Faure, pour le groupe Nouvelle Gauche.

M. Olivier Faure. Monsieur le Premier ministre, avant de poser ma question, je voudrais rendre un hommage appuyé, au nom du groupe Nouvelle Gauche, au général Pierre de Villiers. (Applaudissements sur les bancs des groupes NG et LR et plusieurs bancs de chacun des autres groupes.– Les applaudissements se prolongent sur les bancs des groupes NG et LR.)

M. le président. Poursuivez, monsieur Faure.

M. Olivier Faure. Son professionnalisme et son sens de l’honneur lui valaient à la fois le respect de ses hommes et celui, je l’espère et je le crois, de tous les parlementaires. Sa démission, ce matin, ouvre donc une double crise.

C'est d’abord une crise de confiance entre le chef de l’État et nos armées. « (« Tout à fait ! » sur les bancs du groupe LR.) Le pouvoir politique affiche une volonté de fer contre le terrorisme. Il envoie nos soldats en première ligne mais ne leur donne plus aujourd'hui les moyens de combattre et d’assumer leurs missions (Applaudissements sur les bancs des groupes NG et LR et plusieurs bancs du groupe LC), en rompant avec l’effort budgétaire engagé sous le précédent quinquennat.

C'est ensuite une crise démocratique : les recadrages et l’humiliation volontaire du volontaire du chef d’état-major, au lendemain de son intervention devant notre commission de la défense,…

M. Christian Hutin. Bravo !

M. Olivier Faure. …sont aussi une violation des droits du Parlement. (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs des groupes NG et LR et sur quelques bancs des groupes FI et LC.)

M. Christian Hutin. Honteux !

M. Damien Abad. Il a raison !

M. Olivier Faure. Le message ainsi adressé par le chef de l’État à tous ceux qui viendront devant notre assemblée est limpide : silence dans les rangs ! Ce message est forcément incompatible avec les missions de contrôle du Parlement. (Mêmes mouvements.)

Cette double crise est enfin un avertissement pour le pouvoir. Même Jupiter devrait savoir distinguer l’autorité, louable, de l’autoritarisme, indécente jouissance d’un pouvoir personnel. (Applaudissements sur les bancs des groupes NG et LR.)

M. Christian Hutin. Bravo !

M. Olivier Faure. Monsieur le Premier ministre, dans ce contexte, comment comptez-vous renouer les fils ténus de la confiance ? (Mêmes mouvements.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Edouard Philippe, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur le président Faure, je voudrais en premier lieu m’associer à tout ce qu’a dit Mme la ministre des armées sur le salut républicain que nous adressons au général de Villiers après qu’il a, ce matin, présenté sa démission au Président de la République. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM. – Rires et exclamations sur les bancs des groupes NG et LR.)

Plusieurs députés du groupe LR . Quelle hypocrisie ! Honteux !

M. Edouard Philippe, Premier ministre . Je peux également m’associer au salut républicain qu’elle a formulé à l’égard du général Lecointre, qui va prendre ses fonctions. Il était, voilà quelques heures encore, le chef du cabinet militaire du Premier ministre et mon conseiller défense. Il avait été pendant plus d’un an le chef du cabinet militaire de mes prédécesseurs. Vous savez comme moi, puisque vous vous intéressez aux questions de défense, qu’il est lui aussi un remarquable officier de l’armée française, à laquelle il fait honneur. Je lui souhaite beaucoup de succès dans ses fonctions. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM, MODEM et LC.)

M. Christian Hutin. Il ne faut surtout pas qu’il vienne parler au Parlement !

M. Edouard Philippe, Premier ministre . Je suis heureux, monsieur Faure, que vous me posiez cette question et je suis heureux de vous répondre, très simplement. Le général de Villiers a exprimé, il l’a d’ailleurs redit ce matin, un désaccord. Il en a, bien sûr, parfaitement le droit. (Exclamations et « Heureusement ! » sur les bancs du groupe LR.)

Il a parfaitement le droit d’exprimer un désaccord avec le chef des armées. Mais, comme un militaire, avec honneur, il ne peut pas contester le choix fait par son chef. Il a donc tiré les conséquences du désaccord qu'il avait lui-même exprimé.

Mesdames et messieurs les députés, dans cette affaire,…

M. Laurent Furst. Car c'est une affaire !

M. Edouard Philippe, Premier ministre. …chacun est dans son rôle : le chef d’état-major des armées, qui exprime son avis et en tire les conséquences, et le Président de la République, qui est l’autorité en la matière et exprime les choix portés par l’autorité légitime. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM et plusieurs bancs du groupe LC. - « Et le Parlement ? » sur plusieurs bancs des groupes NG et LR.)

Mesdames et messieurs les députés, je ne pense pas qu'il y ait dans cette primauté du politique sur le militaire quelque chose qui puisse choquer l'Assemblée nationale. (Mêmes mouvements.)

M. Pierre Cordier. Moins 900 millions !

M. Christian Hutin. Et le Parlement ? Il a parlé devant une commission parlementaire !

M. Edouard Philippe, Premier ministre. Ne vous énervez pas, monsieur le député. Les sujets militaires sont assez sérieux pour qu’on les aborde avec le calme qui prévaut dans cette assemblée et que vous êtes le seul à rompre. (Applaudissements sur les bancs du groupe REM et quelques bancs des groupes MODEM et LC.– Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

M. le président. Monsieur Hutin, je vous en prie.

M. Edouard Philippe, Premier ministre. Il est faux de dire que les engagements pris par le Président de la République auraient été méconnus. Le Président de la République s’est engagé à faire en sorte que, parce que le monde est instable et dangereux, l’effort de défense de notre pays soit porté à 2 % du PIB en 2025. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

Un député du groupe LR . Ça n’en prend pas le chemin !

M. Pierre Cordier. Moins 900 millions !

M. Christian Jacob. Les promesses de campagne, c’est fini !

M. Edouard Philippe, Premier ministre. Mesdames et messieurs les députés, puisque vous évoquez les propos tenus par le Président de la République le 13 juillet, vous devriez les redire en entier : il a lui-même indiqué qu’à l’occasion du budget pour 2018, le budget de la défense serait porté à un minimum de 34,2 milliards d’euros, hors recettes exceptionnelles – REX –,…

M. Christian Jacob. Hors pensions ?

M. Edouard Philippe, Premier ministre . …soit 1,8 milliard de plus que ce qui était inscrit dans la loi de finances initiale pour 2017. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe REM.)

Monsieur Faure, lorsqu’en 2017, dans la loi de finances initiale, l’effort a été accru de 600 millions par rapport à l'année précédente, vous avez déclaré sur ces bancs qu’il fallait saluer un effort exceptionnel. L’année prochaine, en 2018, cet effort sera porté à 34,2 milliards d’euros hors REX,…

M. Olivier Faure. Moins 800 millions !

M. Edouard Philippe, Premier ministre . …ce qui représente une progression de plus de 1,8 milliard – et ce sera probablement la seule–, une progression considérable en volume, plus rapide que celles du PIB et de l’inflation, bref un passage qui nous permet d’envisager la courbe qui nous mènera jusqu’en 2025 pour atteindre 2 % du PIB. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe REM.)

Je terminerai par un chiffre : pour ce qui concerne le budget militaire, l’exécution de la loi de finances initiale pour 2017 nous fera terminer l’année à un niveau de dépenses identique à celui qui était prévu. Le problème que vous mentionnez tient à l’intégration des dépenses liées aux opérations extérieures – OPEX,…

Mme Valérie Rabault. Comme chaque année !

M. Edouard Philippe, Premier ministre . Je ne vous le fais pas dire, madame la députée ! Comme depuis de très nombreuses années en effet, on se paie de mots en plaçant le budget des OPEX à l’extérieur du budget de la défense. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe REM.)

Nous voulons mettre fin à cette mauvaise pratique : nous allons augmenter les dépenses militaires et commencer la réintégration des dépenses d’OPEX, parce que c’est beaucoup plus sain.

M. Claude Goasguen. Le résultat est le même !

M. Edouard Philippe, Premier ministre. Les engagements pris par le Président de la République seront tenus. Je vous donne rendez-vous à l’automne : nous pourrons en reparler. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM et sur quelques bancs du groupe LC.).)