Affrontements mortels entre jeunes
Question de :
Mme Marie Guévenoux
Essonne (9e circonscription) - La République en Marche
Question posée en séance, et publiée le 3 mars 2021
AFFRONTEMENTS MORTELS ENTRE JEUNES
M. le président. La parole est à Mme Marie Guévenoux.
Mme Marie Guévenoux. Monsieur le garde des sceaux, je me fais la porte-voix des familles et des élus de Dourdan, Saint-Chéron, Draveil, Boussy-Saint-Antoine, Quincy-sous-Sénart ou Épinay-sous-Sénart. La semaine dernière, à quarante-huit heures d’intervalle, en Essonne, deux enfants de 14 ans ont trouvé la mort lors d’affrontements entre bandes. Comment l’admettre ? Comment ne pas ressentir un terrible sentiment d’échec, celui de notre société tout entière ?
Un député du groupe LR. C'est un échec de ce Gouvernement !
Mme Marie Guévenoux. Ces affrontements ne datent pas d’hier ; bien connus, ils se répètent depuis vingt ans. Mais malgré les politiques de prévention comme de répression, force est de constater que nous n’avons pas réussi, collectivement, à les éteindre.
La tâche est éminemment difficile. Les rixes entre quartiers sont parfois liées à des trafics, mais parfois, on n’en connaît même pas la cause ; elles se propagent sans retenue sur les réseaux sociaux ou les messageries cryptées. Souvent, elles se déroulent dans l’ignorance des parents qui travaillent et pensent leur enfant en sécurité. Les mineurs y sont de plus en plus jeunes, et – ce qui est sans doute lié – n’ont pas de limites. Très peu portent plainte, et c’est la loi du silence qui l’emporte. Des quartiers, parfois des villes entières, se trouvent ainsi plongés dans la peur.
Hier, les maires, le président de mon département et mes collègues, dont Laëtitia Romeiro Dias et Francis Chouat, nous sommes réunis avec la volonté d'unir nos forces pour participer à une approche globale qui mobilise la police, la justice, mais aussi l'éducation nationale, la politique de la ville et le logement, ainsi que la jeunesse et les sports. C'est ce message d'unité et de détermination que je viens porter aujourd'hui. Nous avons besoin, nous, élus de l'Essonne et de l'Île-de-France, de vous entendre sur les moyens – et je ne parle pas seulement d'effectifs ou de financements – que va mobiliser le Gouvernement pour faire en sorte que cette tragédie cesse. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice. Vous avez raison, il est impossible d'imaginer que la vie d'un enfant de quatorze ans s'arrête, qu'il soit frappé mortellement pour un quartier, pour un regard, pour rien du tout. Je pense d'abord, évidemment, aux familles. Elle est impossible à imaginer, mais c'est une triste réalité qui a endeuillé tous nos quartiers et votre département de l'Essonne.
Nous avons le devoir de réagir. Hier, le ministre de l'intérieur, le ministre de l'éducation nationale et moi-même avons réuni les forces de l'ordre, les magistrats, les recteurs d'académie, les préfets et le monde de la protection judiciaire de la jeunesse. Les chiffres au niveau national augmentent, et c'est infiniment inquiétant, mais les chiffres à Paris sont en baisse constante : depuis 2016, nous sommes passés du double au simple, notamment grâce au groupe local de traitement de la délinquance, qui a fait ses preuves. Mais, vous le savez, les bandes ne s'arrêtent pas aux limites du périphérique. C'est la raison pour laquelle, dès hier, j'ai pris une dépêche pour créer un conseil général de la politique pénale qui aura vocation à coordonner à l'échelle de la région, et je dirai même des régions, une action concertée et résolue. Je souhaite également développer les interdictions de paraître dont l'efficacité est aujourd'hui reconnue.
Mais, avant de passer à ces actes graves, ces jeunes hommes, ces mineurs parfois, ont souvent commis des infractions sans recevoir aucun avertissement judiciaire. Pour les infractions les moins graves, nous avons mis en place, avec le Premier ministre, le doublement du nombre de délégués du procureur pour permettre une réponse pénale ultra-rapide. Pour les actes les plus graves, nous attendons avec impatience l'entrée en vigueur du code de la justice pénale des mineurs qui permettra lui aussi une réponse pénale plus rapide, puisqu'elle passera de dix-huit mois en moyenne à trois mois. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)
Auteur : Mme Marie Guévenoux
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Sécurité des biens et des personnes
Ministère interrogé : Justice
Ministère répondant : Justice
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 3 mars 2021