15ème législature

Question N° 38222
de Mme Sandra Boëlle (Les Républicains - Paris )
Question écrite
Ministère interrogé > Europe et affaires étrangères
Ministère attributaire > Europe et affaires étrangères

Rubrique > droits fondamentaux

Titre > Lutte contre la traite des êtres humains

Question publiée au JO le : 20/04/2021 page : 3401
Réponse publiée au JO le : 03/08/2021 page : 6224

Texte de la question

Mme Sandra Boëlle attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la lutte contre la traite des êtres humains. En effet, le groupe d'experts sur la lutte contre la traite des êtres humains (GRETA) a appelé le 9 avril 2021 les États à agir face à l'aggravation du phénomène de la traite provoquée par la pandémie de covid-19. Les répercussions sont inquiétantes sur la traite des êtres humains en Europe et les États devraient renforcer la prévention de ce fléau, selon le dernier rapport annuel du groupe d'experts sur la lutte contre la traite des êtres humains (GRETA) du Conseil de l'Europe. Le rapport comporte une section spécialement consacrée à l'impact de la covid-19 sur la lutte contre la traite des êtres humains, ainsi qu'une section sur l'identification des personnes soumises à la traite parmi les demandeurs d'asile et sur l'accès des victimes de la traite à la protection internationale. Les effets de la pandémie ont rendu les victimes de la traite encore plus vulnérables ; les ONG qui sont en première ligne ont alerté sur des retards dans l'identification formelle des victimes de la traite, ce qui compromet gravement l'accès de ces personnes à un hébergement sûr, à des soins et au soutien dont elles ont cruellement besoin, tout en les exposant au risque de subir de nouveaux abus. Les trafiquants ont tiré parti de la crise en profitant de la précarité économique que connaissent nombre de personnes. De plus, alors que les autorités font état d'une augmentation de l'exploitation sexuelle et de la criminalité sur internet, le manque de ressources et les retards dans les procédures judiciaires entravent les efforts déployés pour faire condamner les trafiquants, pour que justice soit rendue aux victimes et pour qu'elles soient indemnisées. En conséquence, elle lui demande de bien vouloir lui préciser quelles seront les actions que la France prendra au niveau européen pour lutter contre ces actes inhumains.

Texte de la réponse

La lutte contre la traite des êtres humains (TEH) est une priorité de la France au niveau national comme international, à travers son adhésion à la Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée, dite convention de Palerme, et à son protocole additionnel visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, avec une attention particulière accordée aux femmes et aux enfants. La priorité accordée à cette question essentielle a conduit la France à rejoindre, en 2019, la campagne "Cœur bleu", lancée par l'Office des Nations unies contre les drogues et le crime (ONUDC), ainsi qu'à lancer un appel à un renforcement de la coopération internationale pour combattre la traite et soutenir les victimes, lors du 14e Congrès des Nations unies pour la prévention du crime et la justice pénale, qui s'est tenu à Kyoto, du 7 au 12 mars 2021. À cette occasion, la France a veillé à ce que la lutte contre la TEH soit reconnue comme une priorité collective dans le cadre de la déclaration politique adoptée à l'ouverture du Congrès par l'ensemble des parties. Cette déclaration constitue la feuille de route de la communauté internationale en matière de lutte contre la criminalité et de coopération judiciaire pénale pour les cinq prochaines années. Les ministres français et suédois des affaires étrangères se sont enfin engagés à renforcer la coopération entre nos deux pays afin de lutter contre la traite des personnes à des fins d'exploitation sexuelle. Cet engagement bilatéral se traduit notamment par la promotion active du modèle abolitionniste en matière de prostitution partout dans le monde. Forte de cet engagement international de premier plan et alors que l'année 2021 a été proclamée Année internationale de l'élimination du travail des enfants, la France a initié les démarches lui permettant d'acquérir le statut de "pays pionnier" au sein de l'Alliance 8.7, partenariat mondial contre le travail des enfants, le travail forcé, la TEH et les formes contemporaines de l'esclavage. Elle mène des travaux associant les administrations publiques, les réseaux d'entreprises, les partenaires sociaux, les associations et organisations européennes et internationales afin de mettre en synergie et consolider les actions déjà déployées et permettre, le cas échéant, de développer de nouvelles mesures. Au sein de l'Union européenne (UE), la traite des êtres humains, qui intègre la question de la traite aux fins du prélèvement d'organes, constituait l'une des 13 priorités du cycle politique européen de lutte contre la criminalité organisée (2014-2017) identifiées par EUROPOL. Cette priorité a été, avec le soutien de la France, maintenue dans le cycle 2018-2021 et permettra de renforcer l'action de l'UE en la matière, fondée sur la directive 2011/36 relative à la prévention de la TEH, ainsi qu'à la lutte contre ce phénomène et la protection des victimes. La France a également apporté son soutien à l'adoption, par la Commission européenne, en avril 2021, de la nouvelle stratégie de l'Union européenne 2021-2025 visant à lutter contre la TEH. Enfin, au sein du Conseil de l'Europe, la France a ratifié en 2008 la Convention de Varsovie sur la lutte contre la TEH, qui met la victime au cœur du dispositif. Elle coopère activement avec le groupe d'experts sur la lutte contre la TEH (GRETA), chargé de veiller à la bonne application de cette convention. Elle a accueilli ce groupe d'experts en février 2021 à l'occasion d'une mission d'évaluation, qui lui a permis de mettre en avant l'exemplarité de son modèle. À l'issue de cette visite, le GRETA a partagé certaines des observations qui seront développées dans son rapport d'évaluation prévu d'ici la fin 2021. Il a d'ores et déjà relevé des points positifs tels que l'adoption d'un 2nd plan d'action national de lutte contre la traite ; l'habilitation des inspecteurs du travail à relever l'infraction de TEH ; le renforcement de la formation sur la TEH, y compris pour les inspecteurs du travail ; la création de places spécialisées pour les femmes victimes de violences et victimes de traite dans le dispositif national d'accueil (DNA) des demandeurs d'asile ; la mise en place du dispositif de prise en charge et de protection des mineurs victimes de TEH ; l'engagement de la France dans la coopération internationale. Respectueuse de ses engagements européens et internationaux, et fidèle à ses valeurs, la France est particulièrement vigilante quant au respect, par tous, des règles collectivement agréées dans ce domaine.