15ème législature

Question N° 38368
de Mme Claire O'Petit (La République en Marche - Eure )
Question écrite
Ministère interrogé > Intérieur
Ministère attributaire > Cohésion des territoires et relations avec les collectivités territoriales

Rubrique > publicité

Titre > Application de l'article L. 2122-1 du CGPPP

Question publiée au JO le : 20/04/2021 page : 3408
Réponse publiée au JO le : 07/12/2021 page : 8696
Date de changement d'attribution: 27/04/2021
Date de renouvellement: 07/09/2021

Texte de la question

Mme Claire O'Petit attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur l'application de l'article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques relatif aux surplombs sur la voie publique. En effet, en l'absence de règlement local de publicité, les maires ne disposent plus de la possibilité de s'opposer à l'implantation de panneaux publicitaires, la demande étant formulée par le pétitionnaire directement auprès des services de l'État. Lors, dans l'appréciation de ces derniers, la situation particulière de l'implantation ne rentre pas dans le cadre des critères de validation de l'autorisation. Pour autant, il arrive régulièrement que ces panneaux publicitaires, en surplomb d'une dizaine de centimètres - voire plus - de la voie publique, en additionnant l'épaisseur du panneau et la largeur du déport du mur sur lequel ils sont fixés liée au système de fixation, puissent poser des problèmes de sécurité ou de réduction de la largeur des voies. En effet, les arêtes de ces panneaux et les angles sont dangereux lorsqu'ils sont fixés à hauteur d'homme ou d'enfant, et la largeur de ces derniers, implantés souvent en angles de rues, peut compliquer les manœuvres des véhicules souhaitant tourner dans des rues déjà parfois étroites. En conséquence, elle lui demande si les communes sont fondées, au titre de l'article L. 2122-1 du CGPPP qui dispose notamment que « nul ne peut, sans disposer d'un titre l'y habilitant, occuper une dépendance du domaine public d'une personne publique », à refuser l'implantation d'un dispositif en surplomb du domaine public communal, ledit surplomb fût-il inférieur à 25 centimètres.

Texte de la réponse

En vertu de l'article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques (CGPPP), toute occupation privative du domaine public doit faire l'objet d'une autorisation préalable. Pour l'occupation privative des voies publiques, lesquelles relèvent du domaine public routier, l'article L.113-2 du code de la voirie routière (CVR) précise que « l'occupation du domaine public routier n'est autorisée que si elle a fait l'objet, soit d'une permission de voirie dans le cas où elle donne lieu à emprise, soit d'un permis de stationnement dans les autres cas ». Le juge se fonde sur la disposition spéciale de l'article L. 581-24 du code de l'environnement, selon lequel « nul ne peut apposer de publicité ni installer une préenseigne sur un immeuble sans l'autorisation écrite du propriétaire », pour dire que le maire est en droit de demander la suppression des panneaux publicitaires implantés sur un trottoir sans autorisation (CE, 26 juillet 1996, n° 127565 ; CAA Bordeaux, 14 mars 2006, n° 03BX01321). On pourra toutefois relever qu'aucune disposition du code de l'environnement relatif à la publicité ne prévoit que ce régime se substitue ou fasse échec aux règles de la domanialité publique de droit commun et qu'en l'occurrence, l'article L. 581-24 précité constitue une application des principes posés aux articles L. 2122-1 du CGPPP et L. 113-2 du CVR.  Concernant le cas d'une publicité murale en surplomb du domaine public communal, il convient de déterminer, quand il s'agit d'un mur d'une propriété privée, si le surplomb de la voie publique du fait de la longueur du déport du mur est suffisant pour permettre à la commune d'entrer dans le champ des articles L. 581-24 du code de l'environnement ou L. 2122-1 du CGPPP précités. En effet, l'article L. 581-24 du code de l'environnement impose l'autorisation du propriétaire privé du mur, mais son application simultanée à la commune du seul fait de l'aire du domaine public (double propriété) n'a pas encore été reconnu par le juge. En outre, l'article L. 2122-1 du CGPPP nécessite de caractériser une utilisation privative du domaine public. Il peut être fait référence par analogie à la jurisprudence relative aux enseignes des plaques professionnelles apposées sur un mur privé. Elles ne constituent pas une utilisation privative du domaine dès lors qu'elles ne dépassent que très légèrement en surplomb du trottoir et n'affectent en aucune façon la circulation des piétons (CAA Marseille, 19 mai 2016, n° 14MA03832). Par conséquent, les caractéristiques physiques du surplomb de la voie publique ainsi que la configuration des lieux pourraient conduire le juge à écarter l'exigence d'une autorisation du maire pour les publicités murales au titre des articles L. 581-24 du code de l'environnement ou L. 2122-1 du CGPPP. Les considérations de sécurité des usagers de la voie publique permettent, en revanche, d'envisager l'exercice des pouvoirs de police du maire. En effet, en application de l'article R. 418-9 du code de la route, lorsqu'un dispositif est non conforme à la règlementation en matière de publicité pour garantir la sécurité routière (articles R. 418-2 à R. 418-7 du même code), l'autorité investie des pouvoirs de police de la circulation peut, en cas d'urgence, ordonner soit la suppression du dispositif, soit sa mise en conformité et, le cas échéant, la remise en état des lieux. C'est ainsi le cas lorsqu'un dispositif publicitaire se situe sur l'emprise des voies ouvertes à la circulation publique (R. 418-5 du code de la route). À ce titre, le juge administratif considère que le trottoir fait partie de l'emprise des voies ouvertes à la circulation publique, et donc que les dispositions de l'article R. 418-5 y proscrivent également la publicité (CAA de Marseille, 19 mai 2016, n° 14MA04451). Il est toutefois nécessaire d'établir, d'une part, que le panneau publicitaire litigieux se situe, de par son surplomb, sur l'emprise de la voie publique et, d'autre part, que la présence de ce panneau du fait notamment de son emplacement et de sa taille, serait de nature à créer un danger pour les usagers de la voie publique faisant naître une situation d'urgence. Aussi, et en dépit de l'existence d'une police administrative spéciale, le maire peut, en vertu de son pouvoir de police générale, interdire l'installation de panneaux publicitaires en bordure de la voie publique, s'ils sont de nature à porter atteinte à l'ordre public, et notamment à la sûreté et à la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques (article L. 2212-2 1° du code général des collectivités territoriales). En effet, la jurisprudence a admis que l'autorité de police générale puisse réglementer voire interdire l'affichage publicitaire pour assurer la sûreté et la commodité du passage dans les voies publiques (CE, 16 octobre 1981, n° 12582). La mesure doit néanmoins être nécessaire et proportionnée au but recherché. Enfin, il convient de souligner que l'article 17 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets finalise la décentralisation des compétences en matière de publicité extérieure. Ainsi, à compter du 1er janvier 2024 et sous réserve de l'adoption en loi de finances des dispositions de compensation, les pouvoirs de police de la publicité seront exercés par le maire au nom de la commune et non plus par le préfet et ce même en l'absence d'un règlement local de publicité. Cet article permet également le transfert de ce pouvoir de police au président de l'établissement public de coopération intercommunale selon les modalités prévues à l'article L. 5211-9-2 du code général des collectivités territoriales.