15ème législature

Question N° 3884
de Mme Frédérique Dumas (Libertés et Territoires - Hauts-de-Seine )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Tourisme, Français de l'étranger et francophonie
Ministère attributaire > Tourisme, Français de l'étranger et francophonie

Rubrique > politique extérieure

Titre > Français détenus en Syrie

Question publiée au JO le : 24/03/2021
Réponse publiée au JO le : 24/03/2021 page : 2979

Texte de la question

Texte de la réponse

FRANÇAIS DÉTENUS EN SYRIE


M. le président. La parole est à Mme Frédérique Dumas.

Mme Frédérique Dumas. Monsieur le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, du 26 février au 3 mars, mon collègue Hubert Julien-Laferrière, deux députés européens, Sylvie Guillaume et Mounir Satouri, et moi-même nous sommes rendus au Kurdistan irakien et au Rojava, dans le Nord-Est syrien, avec des avocats de l'ONG Avocats sans frontières et avons constaté sur place que les enjeux, les défis sécuritaires et humanitaires étaient considérables.

En effet, dans le seul camp d'Al-Hol, où la situation est désormais hors de contrôle, s'entassent plus de 60 000 personnes. Les évasions se multiplient ; plusieurs Françaises ont ainsi rejoint la région d'Idlib, contrôlée par la rébellion syrienne, à l'instar de Hayat Boumeddiene, la compagne d'Amedy Coulibaly, l'auteur des attentats de l'Hypercasher à Paris. La radicalisation au sein des camps inquiète les experts de l'Organisation des Nations unies qui traquent l'État islamique. Des cas de radicalisation, d'entraînement, de collecte de fonds et d'incitation à des opérations extérieures ont été signalés. Des mineurs seraient endoctrinés et préparés pour devenir de futurs combattants.

Dans les camps de Roj I et II, plus de 200 enfants français vivent dorénavant dans des conditions insoutenables. Deux tiers ont moins de 6 ans. Ce sont des victimes de guerre. Ne pas les rapatrier est indigne ; les exposer à la violence physique, psychique et idéologique est irresponsable.

Nous avons appelé dès notre retour à des mesures urgentes (M. Bertrand Pancher applaudit), dans le respect du principe européen de l'intérêt supérieur de l'enfant. (M. Olivier Faure applaudit.) Nous avons également appelé les autorités françaises à ne pas laisser nos ressortissants présents dans ces camps échapper à la justice et à les rapatrier en France, seul pays où ils pourront être judiciarisés et rendre compte de leurs actes, tout comme l'ont fait l'ensemble des juges antiterroristes.

Un silence glaçant nous a été opposé. Pourtant, le 4 mars dernier, le Premier ministre belge Alexander De Croo annonçait que la Belgique, qui se rangeait jusque-là dans le camp des pays résolument hostiles au rapatriement, allait rapatrier tous les enfants de moins de 12 ans, dans l'intérêt supérieur de l'enfant – c'est-à-dire avec leur mère.

Monsieur le ministre, la France va-t-elle enfin accepter de traiter cette question en toute transparence et de prendre à son tour ses responsabilités ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LT et parmi les députés non inscrits.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du tourisme, des Français de l'étranger et de la francophonie.

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État chargé du tourisme, des Français de l'étranger et de la francophonie. Madame Dumas, vous vous êtes rendue en Irak et dans le Nord-Est syrien et avez pu constater que ces zones ne sont pas sous le contrôle effectif de la France ; il est donc plus difficile pour nous d'y agir.

Oui, nous nous attachons au sort des enfants, mais laissez-moi dire un mot des adultes, de ceux qui ont choisi de partir pour porter des coups aux populations locales et pour téléguider des actions ailleurs. Pour eux, aucune impunité n'est possible, eu égard aux victimes et d'un point de vue moral, tout simplement. Nous nous attachons, au sein de la coalition, à relever ce défi juridique.

S'agissant des enfants, oui, notre priorité absolue est de prendre en considération leur situation, au maximum.

M. Patrick Hetzel. C'est laborieux !

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État . Ils n'ont pas choisi ce combat, mais en subissent les conséquences. La France s'honore d'avoir déjà organisé le retour de trente-cinq jeunes enfants, qui ont pu, grâce aux juridictions familiales et à la protection judiciaire de la jeunesse, être suivis et bénéficier d'une prise en charge médicale, comme l'attestera le garde des sceaux. Nous continuerons. Notre volonté est intacte ; nous prendrons au maximum en considération la situation des enfants.

En ce 23 mars 2021, souvenons-nous qu'il y a trois ans, un terroriste animé par cette hydre islamiste haineuse enlevait la vie au colonel Arnaud Beltrame. J'ai une pensée pour les victimes et pour lui en particulier. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem.)

M. Bertrand Pancher. Mais le terroriste, ce n'était pas ces enfants !