Déprogrammations de soins
Question de :
Mme Caroline Fiat
Meurthe-et-Moselle (6e circonscription) - La France insoumise
Question posée en séance, et publiée le 7 avril 2021
DÉPROGRAMMATIONS DE SOINS
M. le président. La parole est à Mme Caroline Fiat.
Mme Caroline Fiat. Le message d'Emmanuel Macron a bien été entendu par les soignants : il va falloir faire des efforts. Par exemple, au CHRU – centre hospitalier régional et universitaire – de Nancy, après quelques exercices physiques, ils se sont tous unis et ont essayé – de toute leur force – de bouger les murs pour avoir plus de place et ouvrir des lits. On ne peut pas dire qu'ils ménagent leurs efforts, et ce malgré la fatigue cumulée : à Nancy, les soignants n’ont pas eu de répit depuis mars 2020. Malgré leur acharnement, force est de constater qu'ils n'ont pas réussi. Ils ont donc transformé des lits de réanimation pédiatrique en lits de réanimation pour adultes. (Huées sur les bancs du groupe FI) Vous savez ce que cela signifie : désormais, des opérations sont également déprogrammées dans les services de pédiatrie et les enfants sont aussi concernés.
M. Jean-Luc Mélenchon. Quelle honte !
Mme Caroline Fiat. Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, j’hésite entre cynisme, ironie et colère. Cela fait dix mois que mon groupe vous demande d’auditionner les 180 000 infirmiers diplômés d'État ayant quitté la profession (Applaudissements sur les bancs du groupe FI – M. Sébastien Jumel applaudit également), pour savoir à quelles conditions ils seraient prêts à revenir. En tout cas, une chose est sûre : celles du Ségur de la santé ne sont pas suffisantes.
Nous avons perdu dix mois. Aujourd'hui, on déprogramme à tour de bras. Selon les professionnels concernés, les effets collatéraux pour les patients seront préjudiciables et irrattrapables, pour ne pas dire mortels. Ne trouvez-vous pas que le goût du risque a de graves conséquences ?
Il y a quelques semaines, non sans cynisme, vous avez jeté en pâture les soignants – dont je fais partie –, affirmant qu'ils étaient inconscients puisque, en ne se vaccinant pas, ils mettaient la vie de leurs patients en danger. Quel mépris ! Savez-vous qu’au CHRU de Nancy, aucune dose n'est disponible depuis trois semaines pour vacciner le personnel soignant ?
M. Jean-Luc Mélenchon et M. Adrien Quatennens . Alors ?
Mme Caroline Fiat. Plutôt que de nous accuser de tous les maux, donnez-nous les moyens de nous protéger. Monsieur le ministre, vous nous avez conduits dans le mur ; allez-vous – au moins – admettre votre responsabilité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe FI et sur plusieurs bancs du groupe GDR.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Madame la députée, merci pour cette question, encore une fois toute en modération… (Exclamations sur les bancs du groupe FI.)
M. Sébastien Jumel. Ça suffit ! Quelle condescendance de classe !
M. Olivier Véran, ministre . …à laquelle je vais bien sûr répondre. Tout d'abord, je tiens à saluer le travail extraordinaire des soignants, dans tous les hôpitaux comme en médecine de ville, et, évidemment, au CHRU de Nancy.
À ce propos, comme vous ne l’avez pas souligné, je vais me permettre de le rappeler : grâce au Ségur de la santé, plus de 400 millions d'euros d'investissements ont été annoncés pour reconstruire l'hôpital de Nancy. De plus, comme je m'y étais engagé, j'ai renoncé à toutes les suppressions d'emplois programmées il y a quelques années, de même qu’aux suppressions de lits, dont le nombre va au contraire augmenter. Ces mesures sont soutenues – et c’est heureux – par le maire de Nancy, par la communauté médicale et paramédicale locale et par l’agence régionale de santé.
Mme Caroline Fiat. Mais on n'a pas de lits !
M. Pierre Cordier. Véran, socialiste !
M. Olivier Véran, ministre . Parmi les messages que vous avez souhaité faire passer, je crois comprendre que vous vous inquiétez au sujet des renforts médicaux et paramédicaux dont pourraient bénéficier, dans une période difficile, les personnels hospitaliers. Certes, nous comptons avant tout sur la mobilisation des personnels qui travaillent déjà à l'hôpital, et qui font des efforts énormes depuis plus d'un an.
M. Jean-Luc Mélenchon. Et la pédiatrie ?
M. Olivier Véran, ministre . Je ne trouverai jamais suffisamment de mots pour les remercier pour leur courage, leur abnégation et leur détermination à soigner et à sauver des vies, de jour comme de nuit. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe Dem.)
Ces soignants pourront compter sur les renforts issus de la réserve sanitaire, sur la mobilisation des médecins retraités, des soignants retraités, des étudiants et des professionnels de santé libéraux.
Mme Caroline Fiat. Il n'y a personne !
M. Adrien Quatennens. Et la pédiatrie ?
M. Ugo Bernalicis. Elle est déprogrammée ou pas ?
M. Olivier Véran, ministre . Je l’ai annoncé, j’ai signé un arrêté permettant de majorer de 50 à 100 % la rémunération des soignants, lorsqu'ils prêtent main forte à leurs collègues.
S'agissant des déprogrammations de soins, elles sont décidées progressivement, à mesure qu'il faut libérer des équipes et des lits pour sauver la vie des malades touchés par des formes graves du covid-19. Rassurez-vous, la déprogrammation de certains soins n'est pas dictée dans le bureau du ministre… (Interruptions persistantes sur les bancs du groupe FI – Brouhaha.)
Je ne m'entends pas parler ! La déprogrammation est décidée localement, par les directeurs, les équipes médicales et paramédicales, en fonction des besoins en lits de réanimation et en maintenant évidemment les interventions urgentes – notamment en cancérologie.
Mme Mathilde Panot et M. Jean-Luc Mélenchon . Et les enfants ? Répondez !
M. Olivier Véran, ministre . C'est pour cela que nous vous proposons depuis plus d'un an de voter avec nous des mesures de protection de la population. (Nouvelles interruptions sur les bancs du groupe FI.) Vous ne l’avez jamais fait, (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe Dem) jugeant plus intéressant de…
M. Ugo Bernalicis. Vous allez dans le mur !
M. le président. Merci, monsieur le ministre… M. Jean Lassalle n'étant pas présent, nous passons à la question suivante.
Auteur : Mme Caroline Fiat
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Établissements de santé
Ministère interrogé : Solidarités et santé
Ministère répondant : Solidarités et santé
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 7 avril 2021