15ème législature

Question N° 39700
de Mme Justine Benin (Mouvement Démocrate (MoDem) et Démocrates apparentés - Guadeloupe )
Question écrite
Ministère interrogé > Mer
Ministère attributaire > Mer

Rubrique > outre-mer

Titre > Situation des marins-pêcheurs en Guadeloupe

Question publiée au JO le : 22/06/2021 page : 5009
Réponse publiée au JO le : 03/05/2022 page : 3058

Texte de la question

Mme Justine Benin alerte Mme la ministre de la mer sur la situation de la filière de la pêche en Guadeloupe. Un mouvement de blocage a été organisé par les marins-pêcheurs guadeloupéens début juin 2021, interrompant durant 4 jours la circulation au chenal de Pointe-à-Pitre, afin de contester la hausse des tarifs des carburants. Grâce à la mobilisation des partenaires sociaux, des élus et des services de l'État, un accord a été conclu ce samedi 12 juin 2021. Il prévoit 3 dispositions essentielles : la baisse de 40 centimes de l'essence marine et 24 centimes du marine gazole ; la mise en place d'un comité de suivi associant les parties signataires de l'accord, afin de poursuivre la réflexion sur les modalités de fixation du prix des carburants marins ; et le lancement d'une mission ministérielle pour la restructuration et la consolidation de la filière pêche de Guadeloupe. Cet accord, conclu entre les organisations de marins-pêcheurs, l'État et les élus locaux, est bienvenu : il a permis d'apaiser momentanément ce mouvement social, tout en donnant une bouffée d'air aux marins-pêcheurs qui sont depuis longtemps confrontés à des difficultés chroniques dans leurs activités. Pour autant, l'action de l'État, conduite sous l'égide du ministère de la mer, doit aller plus loin pour soutenir davantage ces métiers essentiels à l'économie et au patrimoine de la Guadeloupe. En effet, les problématiques liées aux activités des marins-pêcheurs sur ce territoire sont nombreuses : les arrêtés d'interdiction de pêche dans les zones côtières polluées par la chlordécone obligent les marins à réaliser d'importants investissements de renouvellement des flottes pour pouvoir pêcher au large ; investissements très difficiles à mettre en œuvre en raison de faibles capacités de financement ; les démarches administratives fastidieuses et complexes pour percevoir les aides liées aux fonds européens, tel que le FEAMP. Enfin, le modèle économique de la pêche guadeloupéenne est très contraint par la concurrence internationale et les charges locales élevées (prix des carburants, cotisations sociales, charges fiscales...). Aussi, elle souhaite connaître les intentions de Mme la ministre de la mer sur ce dossier, afin qu'un travail approfondi soit lancé conjointement avec les élus, les organisations professionnelles et les services de l'État pour la restructuration et la consolidation de la filière pêche en Guadeloupe.

Texte de la réponse

Le soutien de la filière pêche dans les régions ultrapériphériques (RUP) et en particulier en Guadeloupe est une priorité du ministère de la mer. Les aides aux secteurs de la pêche et de l'aquaculture, de l'ordre de 131M€ sur l'ensemble de la programmation, revêtent souvent un caractère indispensable à la viabilité des acteurs locaux. Concernant la programmation actuelle, le régime de plans de compensation des surcoûts (PCS), pour compenser les coûts dus à l'éloignement territorial, représente la part la plus importante des aides européennes. Concernant la programmation post 2020 du Fonds européen pour les affaires maritimes, la pêche et l'aquaculture (FEAMPA), les plans d'action RUP qui seront annexés doivent porter une vraie ambition locale afin d'utiliser au mieux l'enveloppe de 131 M€ pour les RUP sur la programmation avec un maximum de 50 % pour les PCS. Le renouvellement de la flotte de pêche revêt une dimension toute particulière dans les régions ultrapériphériques, au regard des problèmes de sécurité pour les équipages et d'exploitation durable de la ressource. Le cadre juridique européen proposé permet l'octroi d'aides d'État en faveur de l'acquisition de nouveaux navires dans les régions ultrapériphériques, sous réserve du respect de conditions garantissant une pêche durable. En effet le renouvellement de la flotte est prévu (à La Réunion, à Mayotte, en Guadeloupe, en Martinique et en Guyane). À Mayotte en particulier, il vise essentiellement le remplacement de petites unités de moins de 12m, de construction traditionnelle, faiblement motorisées, désormais totalement inadaptées aux pratiques et besoins actuels (éloignement des côtes, sécurité à bord, pénibilité du travail, etc.). Les cinq régimes ont été validés le 1er mars 2022, après deux années de discussion. Les décisions d'acceptation de la Commission permettent désormais d'avoir une base juridique pour mettre en place les régimes mais conditionnent toujours l'ouverture des guichets à un avis préalable annuel de la Commission sur le degré d'équilibre des segments de flotte visés par le renouvellement de la flotte tel que présenté dans le rapport « capacité » remis chaque année. Les échanges entre la France et la Commission se poursuivent donc pour bien analyser les données fournies et renvoyant la décision définitive à la remise du rapport de la Commission au Parlement européen sur le rapport capacité (mai-juin). Enfin, une modification des lignes directrices d'aides d'État pêche et aquaculture est actuellement en cours de discussion entre la Commission et les États membres. Dans le cadre de cette révision, les autorités françaises insistent sur le fait que, pour pouvoir répondre aux objectifs de développement durable prévus dans la PCP, et plus particulièrement au maintien d'une activité structurante dans ces régions sensibles, la mise en place d'une aide dédiée et ciblée doit s'accompagner de règles d'application ajustées à la réalité et à la spécificité de ces territoires et aux segments de flotte visés. Ainsi, conformément aux conclusions de la mission interministérielle de conseil pour un renouvellement de la flotte de pêche dans les RUP rendues en juin 2018, les efforts de la France se concentrent autour du renouvellement d'une flotte de navires de moins de 12m, dont l'activité et la pratique, respectueuses des ressources, ont un impact relatif sur l'environnement marin, et sont essentielles pour le développement et la valorisation des territoires. La France vise demandent donc à assouplir la proposition de la Commission, afin de permettre de prendre en compte la situation réelle des territoires ultrapériphériques et solliciter la poursuite d'une réflexion commune, tenant compte de la situation spéciale des RUP. Lutte contre la pêche INN (illégale) en Guyane : Concernant le plan Chordécone, depuis 2002, l'État et ses opérateurs ont mobilisé d'importants moyens, dans le cadre de trois plans d'actions, qui ont conduit notamment à la sensibilisation et à la protection de la population, au soutien des professionnels impactés mais aussi à l'amélioration des connaissances sur cette substance. Le plan chlordécone IV est entré en vigueur en 2021 pour assurer la continuité des actions menées en faveur de la Guadeloupe notamment. Sur le plan budgétaire, à partir de 2020, la contribution du ministère de l'agriculture et de l'alimentation au PITE (Programme des interventions territoriales de l'État) est de 480k€ avec une contribution de la Direction des pêches maritimes et de l'aquaculture de 140 k€ /an. En ce qui concerne les actions pêche et aquaculture, le FEAMPA 2021-2027 pourrait être mobilisé pour contribuer au financement de certaines actions prévues. Les mesures proposées du plan chlodécone IV portent sur 4 thématiques : l'amélioration des connaissances, favoriser la pêche durable, moderniser les outils de pêche et d'aquaculture et soutenir les entreprises par le biais. Dans ce cadre, le Gouvernement a mis en place par décret une aide sociale exceptionnelle en soutien au secteur de la petite pêche côtière aux Antilles, dans le cadre de la pollution des eaux marines par la chlordécone. Le financement de cette aide sera imputé sur le programme 149 « compétitivité et durabilité de l'agriculture, de l'agroalimentaire, de la forêt, de la pêche et de l'aquaculture » (ministère chargé de l'agriculture et ministère chargé de la mer). Applicable à la seule petite pêche, cette aide est versée de façon trimestrielle, via l'Agence de services et de paiement, démontrant ainsi le soutien du gouvernement à la pêche aux Antilles. Enfin, le 18 novembre 2021, lors des Assises de la pêche à Saint-Pol-de-Léon, la ministre de la mer a annoncé le lancement du Plan d'action pour une pêche durable. Après une consultation menée auprès de la filière et des parties prenantes, le ministère de la mer a mis au point le Plan d'action pour une pêche durable, dont l'objectif est de renforcer la pêche de demain avec l'ensemble de l'écosystème de la filière. Il s'articule autour de 3 axes : améliorer la connaissance des ressources halieutiques ; moderniser la filière et sa compétitivité ; renforcer l'attractivité du métier de marin-pêcheur. La filière pêche en Guadeloupe a toute sa place dans ce plan.