Irresponsabilité pénale
Question de :
M. Éric Pauget
Alpes-Maritimes (7e circonscription) - Les Républicains
Question posée en séance, et publiée le 5 mai 2021
IRRESPONSABILITÉ PÉNALE
M. le président. La parole est à M. Éric Pauget.
M. Éric Pauget. Monsieur le président, avec l'ensemble des députés du groupe Les Républicains, je veux tout d'abord m'associer avec force et émotion à l'hommage que vous avez rendu à Stéphanie Montfermé. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR, LaREM, Dem, Agir ens, SOC, ainsi que parmi plusieurs députés non inscrits. - Mme Marie-George Buffet applaudit également.)
Monsieur le garde des sceaux, le meurtre antisémite, abject, de Sarah Halimi, battue et défenestrée en 2017, a choqué tous les Français. Aujourd'hui, il les choque doublement, par son extrême sauvagerie et parce que son auteur ne sera pas jugé. La cour d'appel de Paris, puis la Cour de cassation, le 14 avril dernier, en ont décidé ainsi. L'expertise psychiatrique a conclu à son irresponsabilité, car il a agi consécutivement à la consommation de cannabis.
Cette décision pose la question des conditions de l'abolition du discernement ; elle a suscité un débat controversé, et de nombreuses critiques sur le fonctionnement de notre justice. Comme l'insécurité alimente un sentiment d'insécurité, cette décision injuste alimente un sentiment de défiance envers l'institution judiciaire et d'impunité. Comment admettre, en effet, monsieur le garde des sceaux, que la consommation volontaire d'une quelconque substance altérant le comportement puisse exempter de toute responsabilité ?
Il est des limites morales qui appellent à des évolutions légales. Ce que vous qualifiez pudiquement de vide juridique ne confine-t-il pas plutôt tout simplement à l'absurdité ? Parce que le droit n'est rien sans les faits, parce qu'il doit s'en nourrir, il est impératif de clarifier, à l'aune de cette dramatique affaire, les causes et les conditions de l'irresponsabilité pénale et de prendre toutes les dispositions permettant de faire évoluer la loi. Jamais la consommation volontaire de drogue ne pourra servir de rempart à un procès. Aussi les Français…
M. le président. Merci, monsieur le député.
M. Éric Pauget. …attendent du Gouvernement des mesures qui renforcent notre pacte républicain, qui renforcent notre justice et sa vocation : la rendre. Monsieur le garde des sceaux, pouvez-vous…
M. le président. Merci, monsieur le député. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice. Je veux tout d'abord m'incliner avec respect devant le chagrin des familles Attal et Halimi. J'ai mesuré comme vous, bien sûr, l'émoi suscité dans notre pays par la décision rendue par la Cour de cassation. Le Président de la République m'a demandé d'intervenir et de préparer un texte. Doit-on distinguer entre le fou, qu'il n'est pas question de juger – ce serait une régression, un retour au Moyen-Âge – et celui qui doit sa folie à la consommation de produits psychotropes ? Je le dis ici, devant la représentation nationale : oui, il faut distinguer ces deux situations. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem, ainsi que sur quelques bancs du groupe LR.)
Pour autant, bien sûr, deux lignes rouges doivent limiter notre réflexion. Premièrement, je l'ai déjà dit, on ne juge pas les fous ; deuxièmement, bien évidemment, on ne peut condamner un homme pour un crime si son discernement est aboli. (M. Erwan Balanant applaudit.) Il existe une voie médiane.
Je vous l'ai dit, le Président de la République m'a demandé d'intervenir, je consulte des psychiatres, des magistrats, des avocats,…
M. Pierre Cordier. Il faut d'abord du bon sens !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux . …des représentants des cultes. Je me suis nourri du travail des anciens députés Dominique Raimbourg et Philippe Houillon, de l'avis de l'avocat général, de la lecture, bien sûr, de l'arrêt, et j'aurai l'honneur, fin mai, de présenter un texte que j'espère, vous voterez. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem.)
Un député . C'était nul !
Auteur : M. Éric Pauget
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Justice
Ministère interrogé : Justice
Ministère répondant : Justice
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 mai 2021