15ème législature

Question N° 39812
de Mme Hélène Zannier (La République en Marche - Moselle )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture et alimentation
Ministère attributaire > Agriculture et alimentation

Rubrique > énergie et carburants

Titre > Révision tarifaire des contrats de rachat d'électricité photovoltaïque

Question publiée au JO le : 29/06/2021 page : 5125
Réponse publiée au JO le : 26/10/2021 page : 7819

Texte de la question

Mme Hélène Zannier alerte M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les conséquences de l'application de la révision tarifaire des contrats de rachat d'électricité photovoltaïque pour les agriculteurs. Présentée et votée par le Parlement fin 2020 dans le cadre de la loi de finances pour 2021, la mesure de révision tarifaire des contrats de rachat d'électricité photovoltaïque fait évoluer le prix de rachat de l'électricité d'origine solaire produite sur les exploitations de 65 centimes le kilowatts-crête à 2,5 centimes. Organisée avec la Commission de régulation de l'énergie (CRE) qui veille au bon fonctionnement des marchés de l'électricité et du gaz en France, la révision tarifaire concerne près de 500 agriculteurs français, dont 80 dans le Grand-Est et 4 en Moselle. Suite à ces annonces, les producteurs-agriculteurs, qui se décrivent comme les pionniers de l'électricité issue de la filière photovoltaïque paysanne en France, ont le sentiment d'être abandonnés par l'État et par la CRE. Selon eux, la nouvelle tarification mettrait en péril à la fois leur activité économique et leur patrimoine. En effet, les agriculteurs doivent rembourser des emprunts contractés pour financer l'installation de ces centrales à énergie solaire sur leurs exploitations. Avec la nouvelle tarification de la CRE, sans compter le coût de maintenance et d'exploitation de ces centrales, ils ne seront plus en mesure de supporter les charges. La chambre d'agriculture de la Moselle considère également que si les tarifs révisés s'appliquent, l'ensemble des projets agricoles concernés seront mis en faillite, malgré la clause de sauvegarde défendu par la CRE qui assurerait certes la survie, mais pas une viabilité sur le long terme. Elle craint aussi une baisse plus importante que prévu du gain estimé par la CRE. Initialement fixé à 1,2 milliard d'euros, il est passé à 800 millions par an et serait même estimé à 400 millions. Pour eux, l'avenir se caractérise désormais par le dépôt de bilan de ces exploitations photovoltaïques allant de pair avec des faillites personnelles et familiales. Chaque année, sans la révision tarifaire, c'est déjà plus de 1 500 dépôts de bilan par an faute de prix rémunérateurs chez les agriculteurs, amenant au chiffre tragique de près de deux suicides par jour (selon les plus hautes estimations). Cette décision suivie de la publication d'arrêtés et de décrets nécessaires à la mise en œuvre fait l'objet d'une consultation publique s'achevant le 18 juin 2021. Le processus d'élaboration du texte aboutira en juillet après sa publication au Journal officiel et à son application le 1er octobre 2021. Il reste ainsi une marge de manœuvre pour trouver un compromis et assurer la viabilité des exploitations des agriculteurs-producteurs. Elle souhaiterait savoir comment le Gouvernement envisage l'avenir de ces structures menacées de faillites, dont dépendent l'avenir de nombreux agriculteurs.

Texte de la réponse

Dès le début des années 2000, l'État a souhaité favoriser le développement des énergies renouvelables. Pour cela, il a fixé des tarifs d'achat pour les producteurs d'électricité d'origine photovoltaïque qui visaient à couvrir leurs coûts. Entre 2006 et 2010, ce tarif était de l'ordre de 600 euros (€) par mégawatt-heures (MWh), garanti pour vingt ans. Or sur la même période, les coûts d'installation du photovoltaïque ont été divisés par quatre, avant que les tarifs ne soient révisés, en 2010, puis à nouveau en 2011, pour tenir compte de cette forte baisse, qui s'est accélérée à la fin des années 2000. Dès 2010, les professionnels eux-mêmes convenaient que certains segments de marché bénéficiaient d'une rentabilité excessive. Environ 235 000 installations photovoltaïques, représentant une capacité de 3,6 gigawatt (GW), continuent de bénéficier de contrats signés avant la révision de l'arrêté tarifaire de 2010, et représentent une charge de soutien budgétaire de près de 2 milliards d'euros (Mds€) par an. Sur l'ensemble de leur durée de vie (de vingt ans, les derniers contrats arrivant à échéance dans les années 2030), ces aides représenteraient des dépenses budgétaires totales de l'ordre de 39,6 Mds€ (hors contrats dans les zones non interconnectées au réseau métropolitain), dont 25 Mds€ restent à payer selon le comité de gestion des charges de service public de l'électricité et les estimations réalisées au cours de l'élaboration de la programmation pluriannuelle de l'énergie. L'article 225 de la loi de finances n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 pour 2021 institue un dispositif visant à réviser le tarif applicable aux installations photovoltaïques de plus de 250 kilowatt-crête (kWc) bénéficiant d'un contrat d'obligation d'achat en application des arrêtés tarifaires S06, S10 et S10B. Cette mesure concerne un très petit nombre d'installations photovoltaïques (environ 1 000 sur les plus de 500 000 installations solaires photovoltaïques raccordées), qui représente moins de 0,5 % de la production d'électricité nationale et 5 % de la production d'électricité renouvelable, mais qui concentre une part importante des subventions publiques (près d'un Md€ par an). Le seuil de 250 kWc, prévu par le législateur, permet de distinguer entre les petites installations, moins susceptibles d'avoir capté une sur-rentabilité éventuelle, et les plus grandes, qui ont pu bénéficier d'un effet d'échelle. Il n'est donc pas prévu de le réviser, ni d'exempter spécifiquement les installations agricoles, ce qui créerait une inégalité devant la loi. Cependant, la mesure votée en loi de finances prévoit une clause, dite de sauvegarde, visant à maintenir la viabilité des producteurs, et prévoit à ce titre une possibilité d'analyse individuelle des dossiers pour tenir compte de leurs spécificités, dont celles, par exemple, des exploitations agricoles. Le Gouvernement a réalisé une consultation large sur les projets de texte d'application de cette mesure, et a pu en particulier écouter les remarques des producteurs photovoltaïques, de la filière agricole, et du secteur bancaire. Il ressort de cette consultation que les textes d'application devront prévoir que la Commission de régulation de l'énergie (CRE) s'assure que la réduction tarifaire ne mette en péril ni la viabilité économique du producteur et sa capacité à honorer ses paiements -et à rembourser ses dettes- liés à l'installation de production photovoltaïque, ni la capacité du producteur à maintenir la viabilité de ses autres activités (commerciales, artisanales, agricoles ou industrielles). L'État soutient par ailleurs massivement les énergies renouvelables. La loi de finances pour 2021 prévoit ainsi une hausse de 1,3 Mds€ du budget dédié aux énergies renouvelables par rapport à 2020, soit une hausse d'environ 25 %, pour dépasser les 6 Mds€, un record historique qui correspond à un doublement par rapport à 2012. Les économies générées par cette disposition de soutien de certains anciens contrats libéreront de nouvelles marges d'intervention. Sur la filière solaire photovoltaïque, le Gouvernement a prévu des volumes d'appels d'offres qui permettront de financer plus de 10 GW d'installation au cours des cinq prochaines années, soit un quasi-doublement de la puissance déjà installée. Une extension du guichet tarifaire à 500 kWc sera également mise en place pour accélérer le développement des nouveaux projets en toiture.