15ème législature

Question N° 39817
de M. Dominique Potier (Socialistes et apparentés - Meurthe-et-Moselle )
Question écrite
Ministère interrogé > Solidarités et santé
Ministère attributaire > Solidarités et santé

Rubrique > enfants

Titre > Syndrome du bébé secoué (SBS) ou traumatisme non accidentel par secouement

Question publiée au JO le : 29/06/2021 page : 5152
Réponse publiée au JO le : 26/10/2021 page : 7877

Texte de la question

M. Dominique Potier attire l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé sur le syndrome du bébé secoué ou traumatisme non accidentel par secouement. Le terme de syndrome du bébé secoué (SBS) désigne un traumatisme crânien qui survient lorsqu'on secoue violemment un enfant, souvent âgé de moins de 6 mois, par exaspération ou parce qu'on ne supporte plus de l'entendre pleurer. Un saignement peut se produire entre deux membranes qui entourent le cerveau (l'arachnoïde et la dure-mère), provoquant un hématome sous-dural (HSD), mis en évidence par un scanner ou une IRM. Les secouements peuvent également provoquer des lésions du cerveau, de la moelle épinière, oculaires, parfois associées à des fractures, des ecchymoses, des hématomes. Les conséquences peuvent être graves avec des séquelles entravant le développement de l'enfant. Afin de sensibiliser les professionnels, des recommandations de bonne pratique ont été publiées par les experts de la Haute autorité de santé (HAS) en 2011, et mises à jour en 2017. Dans ses recommandations, la HAS aborde le SBS comme la cause essentielle des HSD, sans toutefois traiter de façon explicite les diagnostics différentiels ou en réfutant qu'ils puissent les provoquer, ni insister sur l'importance du dialogue pluridisciplinaire concernant tous les paramètres à prendre en compte. Histoire médicale de l'enfant, antécédents génétiques, prématurité, anomalie du périmètre crânien, hydrocéphalie externe, simple chute sont en effet susceptibles d'expliquer des saignements spontanés. L'HSD est ainsi trop considéré de façon quasi systématique comme l'unique conséquence du SBS. Dès sa mise en évidence par le neuroradiologue, un signalement judiciaire est rédigé, déclenchant une intervention policière, avec perquisition, garde à vue, placement immédiat de l'enfant et poursuites judiciaires. Sans négliger l'importance des SBS authentiques, des parents ou des assistantes maternelles sont ainsi accusés puis innocentés, des enfants ont été retirés de leur familles puis rendus après plusieurs mois ou années parfois. De fait, la justice abandonne les charges lorsque les arguments exposés par des médecins amènent à poser un autre diagnostic que le secouement. Certains magistrats eux-mêmes estiment aujourd'hui que « les expertises judiciaires sont trop systématiques et ne prennent pas en compte les particularités du dossier médical ». Afin d'éviter les conséquences graves induites par les accusations de secouements non fondées par interprétation trop systématique des préconisations actuelles, il souhaite l'interroger sur l'opportunité de reprendre les recommandations de bonne pratique, de les amender par l'analyse de situations et de tenir compte des récents travaux de chercheurs alertés par l'augmentation d'accusations erronées. Cela permettrait, à son sens, aux professionnels d'affiner les éléments diagnostiques et rendre le dialogue interdisciplinaire plus efficient.

Texte de la réponse

Chaque année, force est de constater que plusieurs centaines d'enfants sont victimes en France d'un traumatisme crânien non accidentel par secouement. Il est donc essentiel que les professionnels qui les prennent en charge, puissent disposer d'outils qui leur permettent d'améliorer leur démarche clinique et qui les guident, le cas échéant, dans les procédures à mettre en œuvre pour les protéger. En effet, la méconnaissance du diagnostic est fréquente et expose au risque de récidive et donc de séquelles sévères persistantes ou de décès, ce d'autant que dans la majorité des cas, les lésions observées résultent d'une répétition des épisodes de secouement. C'est dans cet objectif qu'ont été élaborées les recommandations de bonne pratique de 2017 dans le cadre d'un groupe de travail multidisciplinaire où les différents champs de la pédiatrie étaient largement représentés. Ces recommandations, disponibles sur le site de la Haute autorité de santé (HAS), sont déclinées en plusieurs volets. Dans l'un d'eux, consacré à la démarche diagnostique, sont exposés les différents diagnostics différentiels que les médecins doivent évoquer devant toute suspicion de traumatisme crânien non accidentel. Il est notamment prévu qu'en cas de doute, le médecin puisse demander conseil par téléphone à la permanence du parquet et/ou solliciter le médecin référent de la prise en charge des violences faites aux enfants dans son établissement. Mais, dès lors qu'un risque de maltraitance par secouements répétés ne peut être éliminé, il est de la responsabilité de chacun et tout particulièrement des professionnels de santé de protéger l'enfant par un signalement au procureur de la République, en attendant de lever les incertitudes diagnostiques. Ainsi, l'esprit dans lequel ont été élaborées ces règles de bonne pratique n'est pas de mettre en difficulté les familles mais bien de protéger les trop nombreux enfants qui subissent ce type de maltraitance. Pour cette raison, il n'est donc pas pertinent de reprendre les dernières recommandations de la HAS sur le sujet.