15ème législature

Question N° 3982
de M. Paul Molac (Libertés et Territoires - Morbihan )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Éducation nationale, jeunesse et sports
Ministère attributaire > Éducation nationale, jeunesse et sports

Rubrique > lois

Titre > Proposition de loi relative aux langues régionales

Question publiée au JO le : 05/05/2021
Réponse publiée au JO le : 05/05/2021 page : 4722

Texte de la question

Texte de la réponse

PROPOSITION DE LOI RELATIVE AUX LANGUES RÉGIONALES


M. le président. La parole est à M. Paul Molac.

M. Paul Molac. Monsieur le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, le 8 avril, le Parlement a adopté à une très large majorité une loi relative aux langues régionales. Je tiens à remercier l'ensemble de mes collègues qui l'ont soutenue, notamment ceux de la majorité. Bravo à vous tous ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LT, LR, Agir ens et UDI-I, ainsi que sur de nombreux bancs des groupes LaREM et Dem.)

Ce vote est un symbole de l'affirmation du rôle du Parlement, Assemblée nationale et Sénat, dans l'élaboration transpartisane de la loi. Il s'agissait du premier vote définitif d'une loi relative aux langues régionales sous la Ve République ! Pourtant, un recours au Conseil constitutionnel a été déposé par des membres de la majorité, que vous y avez vous-même incités ! (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

M. David Habib. Exactement !

M. Paul Molac. Car c'est bien un membre de votre cabinet qui a rédigé le recours. La presse s'est fait l'écho des conditions très obscures de cette saisine. Certains collègues signataires témoignent d'ailleurs avoir été trompés sur la démarche.

Je ne remets pas en cause le pouvoir des parlementaires de saisir le Conseil constitutionnel et je reste très serein quant à l'issue de l'examen. Toutefois, l'influence que vous avez exercée auprès de ces parlementaires pose la question de la séparation des pouvoirs,…

M. Patrick Hetzel. Très juste !

M. Paul Molac. …puisque ni le Premier ministre, ni le Président de la République n'ont souhaité user de leur droit de saisine.

M. Vincent Descoeur. C'est cousu de fil blanc !

M. Paul Molac. Dès lors, ce recours nous place une situation ubuesque, relativement au respect des règles démocratiques et des droits du Parlement. En effet, il revient normalement au secrétariat général du Gouvernement, placé sous l'autorité du Premier ministre, de défendre la loi devant le Conseil constitutionnel ; or le recours a été rédigé de l'intérieur même d'un cabinet ministériel !

M. Vincent Descoeur. Eh oui !

M. Paul Molac. Pouvez-vous nous dire si le Gouvernement défendra devant le Conseil constitutionnel la position du Parlement, notamment de sa majorité, qui a voté le texte ? (Applaudissements sur les bancs des groupe LT et GDR et sur plusieurs bancs des groupes LR et UDI-I. – Mme Christine Pires Beaune applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports. Je vous remercie de votre question qui permet de rappeler le processus législatif. Il s'agit d'une proposition de loi que vous avez vous-même déposée, donc issue de l'opposition. Votre texte était intéressant, je m'y suis d'ailleurs montré favorable lors de sa première lecture à l'Assemblée nationale. Il a ensuite été examiné au Sénat, où la majorité, qui appartient au parti Les Républicains, a adopté deux dispositions, qui ont ensuite été débattues à l'Assemblée nationale. Il est vrai qu'à leur égard, j'ai formulé dans l'hémicycle des questions de nature constitutionnelle. En effet, de telles questions se posent – j'ai bien exprimé des questions, et non des réponses –, au titre de la conformité à l'article 2 de la Constitution. Le sujet n'est pas négligeable, puisqu'il s'agit de l'affirmation du français comme langue de la République.

Comme vous l'avez dit vous-même, je crois qu'il faut être très serein. Il est normal en démocratie, dans notre République, de poser une question au Conseil constitutionnel. Il y a deux semaines, le Premier ministre lui-même a déféré au Conseil constitutionnel la loi pour une sécurité globale préservant les libertés, d'origine gouvernementale. Il est classique que des députés ou une autorité institutionnelle posent des questions au Conseil constitutionnel.

En tant que proposition de loi, votre texte n'a pu être examiné auparavant par le Conseil d'État ; s'il est validé par le Conseil constitutionnel, il en sortira renforcé,…

Mme Laurence Dumont. C'est pour rendre service !

M. Patrick Hetzel. Et la séparation des pouvoirs, qu'en faites-vous ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre . …ce qui vaut beaucoup mieux que s'il était contesté dans quelques mois par le biais d'une question prioritaire de constitutionnalité. En matière de sécurité juridique comme de démocratie, on doit tous s'en réjouir.

Permettez-moi donc répéter les propos que j'ai déjà tenus dans l'hémicycle : nous devons être tous militants de la Constitution. Il est normal de poser des questions constitutionnelles. Bien entendu, chacun tiendra son rôle ; l'administration défendra la position qu'elle doit défendre. En outre, vous le savez, quasiment tout groupe, ou tout citoyen, peut faire parvenir au Conseil constitutionnel une argumentation. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)

M. le président. La parole est à M. Paul Molac.

M. Paul Molac. Le droit est une question d'interprétation. Vous n'avez pas répondu à ma question relative à ce que fera le secrétariat général du Gouvernement.

M. Maxime Minot. Ils ne répondent à rien !

M. Paul Molac. Je le regrette : j'aurais bien aimé le savoir. J'ai un peu l'impression, monsieur le ministre, que vous devenez le Premier ministre – je trouve ça inquiétant. (Applaudissements sur les bancs du groupe LT et sur quelques bancs du groupe LR.)

M. Fabien Di Filippo. Quelle hypocrisie !