15ème législature

Question N° 3986
de M. Jacques Maire (La République en Marche - Hauts-de-Seine )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Affaires européennes
Ministère attributaire > Affaires européennes

Rubrique > politique extérieure

Titre > Sanctions diplomatiques de la Russie

Question publiée au JO le : 05/05/2021
Réponse publiée au JO le : 05/05/2021 page : 4725

Texte de la question

Texte de la réponse

SANCTIONS DIPLOMATIQUES DE LA RUSSIE


M. le président. La parole est à M. Jacques Maire.

M. Jacques Maire. Monsieur le secrétaire d'État chargé des affaires européennes, Alexeï Navalny est en détention depuis le 17 janvier 2021, au titre d'un jugement que la Cour européenne des droits de l'homme a considéré comme non fondé en droit. Cette détention a fait l'objet d'un rapport que j'ai présenté, au nom de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (APCE), le 22 avril dernier.

Ce rapport prend en compte le point de vue des Russes et démontre le caractère illégal de sa détention et les atteintes aux droits qu'il subit en prison. L'Assemblée parlementaire a donc voté sa libération immédiate, l'accès à des soins de médecins indépendants, la visite du comité contre la torture, et a recommandé au Comité des ministres de recourir à tous les moyens juridiques pour conduire la Russie à respecter ses obligations.

Je rappelle que la Russie a tout fait, en 2019, pour revenir comme membre à part entière du Conseil de l'Europe. Je rappelle aussi que la délégation française, à l'unanimité de ses bancs, a voté en faveur de ce retour, dans une démarche collective engagée avec sa présidente, Nicole Trisse, ici présente.

Ainsi, les Français de l'APCE ne sont pas anti-russes. Mais accepter le retour des Russes n'était pas un chèque en blanc : c'était vouloir assurer la protection des citoyens russes par la Cour européenne des droits de l'homme. Or, depuis 2019, la Russie n'a pas tenu sa promesse : Navalny en est le symbole.

Vendredi dernier, elle s'est reniée une fois de plus en m'interdisant l'accès à son territoire, tout comme à sept autres Européens. Dès lors, je m'interroge : pourquoi la Russie sanctionne-t-elle le rapporteur, alors que le Conseil de l'Europe n'a, à ce jour, pris aucune décision contre la Russie ?

Une telle sanction n'a aucun effet sur mon mandat. Elle ne fait qu'une victime : la Russie, qui s'interdit de défendre pleinement son point de vue. Face à l'escalade des sanctions contre la Russie, il existe encore un lieu où le dialogue est possible : le Conseil de l'Europe. Dans un mois, son Comité des ministres sera un moment de vérité : que fera la France si la Russie ne fait aucun geste ? (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem et Agir ens.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des affaires européennes.

M. Clément Beaune, secrétaire d'État chargé des affaires européennes. Monsieur le député Jacques Maire, je veux d'abord réitérer notre plein soutien à la suite des mesures inacceptables dont vous avez été l'objet en fin de semaine dernière. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem et Agir ens, ainsi que sur quelques bancs du groupe LR. – Mme Christine Pires Beaune applaudit également.) Comme nous l'avons indiqué dès samedi avec Jean-Yves Le Drian, ce soutien est celui de tout le Gouvernement, qui ne peut rester insensible à cette situation.

Vous l'avez rappelé, cette mesure touche aussi un certain nombre de responsables politiques européens, dont le président du Parlement européen et la vice-présidente de la Commission européenne en charge des valeurs et de la transparence : cela n'est pas innocent.

Cette mesure intervient aussi dans un contexte de dégradation très grave, d'abord marqué par l'engrenage que vous avez décrit. La République tchèque, notre partenaire de l'Union européenne, a pris des mesures d'expulsion justifiées à l'égard de diplomates russes, à la suite d'ingérences très sérieuses, et la Russie y a répondu de manière disproportionnée, par différentes expulsions et par les mesures que vous avez rappelées, lesquelles vous concernent également.

Bien sûr, cela intervient aussi dans le contexte de l'affaire Navalny, de l'emprisonnement dont la France a redit à plusieurs reprises, par la voix de Jean-Yves Le Drian, le caractère inacceptable, je le répète aujourd'hui, ainsi que dans celui de la détention parfaitement arbitraire d'un certain nombre de personnes qui n'ont commis pour seul crime ou délit que de soutenir M. Navalny dans sa volonté d'expression.

Nous continuerons à porter cette voix avec la plus grande fermeté, notamment après les événements de la fin de semaine. Le Conseil de l'Europe est en effet une enceinte essentielle, et je veux à cet égard saluer votre action de rapporteur en son sein : elle doit se poursuivre, tout comme l'action de Nicole Trisse, qui a écrit ce matin même au président de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et à la secrétaire générale du Conseil de l'Europe pour tenir cette ligne de fermeté absolue tout en laissant ouvert un espace de dialogue. Vous en avez d'ailleurs été l'acteur avec vos collègues français, notamment en permettant le retour de la Russie pour protéger les droits des Russes à travers l'action de la Convention et de la Cour européenne des droits de l'homme.

Cette ligne de fermeté, nous la défendrons en examinant toutes les options, à la fin du mois, lors d'un sommet de l'Union européenne auquel participera le Président de la République. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM, Dem et Agir ens.)